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11 juin 2008 Saint Barnabé |
Alphonse-Marie de Liguori vient au monde à Naples, le 27 septembre 1696, premier-né d'une famille qui comptera sept enfants. Sa mère leur enseigne les vérités de la foi dès le plus jeune âge et leur apprend à prier. Ce garçon est doté d'une intelligence vive, d'une mémoire prompte, d'une raison droite, d'un coeur ouvert à tous les nobles sentiments, d'une volonté ferme et énergique. Son père veut faire de lui un avocat. Ses progrès sont si rapides dans l'étude du droit que, à l'âge de seize ans, il passe avec succès l'examen du doctorat en droit civil et ecclésiastique. Les juges sont étonnés par la sagesse de ses réponses et la justesse de ses réparties.
Avocat, Alphonse remporte succès sur succès, ce qui ne manque pas de lui donner le goût de la réussite et de la gloire du monde. Toutefois, il est tenté d'abandonner cette voie: la ruse et le mensonge dénaturent trop souvent les causes les plus justes, et ce spectacle révolte sa nature droite. Assidu à la prière et à diverses oeuvres de charité, il conserve son âme pure. Une fois par an, il se rend dans une maison religieuse pour s'y livrer aux exercices spirituels. Il avouera plus tard que ces retraites avaient singulièrement contribué à le détacher des biens temporels pour l'orienter vers Dieu. Durant le Carême 1722, notamment, le prédicateur rappelle les motifs qui doivent porter l'âme à se donner tout à Dieu; il dépeint au vif la caducité des choses de ce monde, et ne craint pas de mettre sous les yeux des retraitants les tourments éternels de l'enfer, tels que Jésus les a révélés. La lumière se fait alors dans l'esprit du jeune Alphonse: les vanités du monde se dissipent comme autant de nuages! Il se voue sans réserve à la volonté divine et, quelque temps après, décide de garder le célibat.
En 1723, on parle beaucoup à Naples d'un important procès intenté par le duc Orsini au grand-duc de Toscane. Nombreux sont les avocats qui convoitent ce cas, mais Orsini confie sa défense à Alphonse qui, jusqu'alors, n'a perdu aucun procès. Le jour prévu, celui-ci se présente au barreau et étaye avec clarté les revendications de son client. Tous les assistants sont dans l'admiration. Mais son adversaire produit alors une pièce qu'Alphonse avait eue entre les mains, et qui infirme de manière décisive son argumentation. Celui-ci est atterré: comment a-t-il pu négliger ce texte? Le procès perdu, Alphonse se sent écrasé sous le poids de l'humiliation. Cependant, trois jours après, une clarté subite lui fait découvrir la raison de sa distraction: Dieu ne l'avait aveuglé que pour l'arracher aux vanités de la terre. Sous l'impulsion de la grâce divine, il répète maintenant la parole que, dans un sentiment de dépit, il avait murmuré au sortir de l'audience: «Tribunaux, vous ne me verrez plus!» Après un temps de prière et de pénitence, il perçoit que Dieu l'appelle à l'état ecclésiastique. Sa formation achevée, il est ordonné prêtre le 21 décembre 1726.
La tentation du prêtre
Le jeune prêtre prêche l'Évangile à tous, mais plus volontiers aux pauvres. Pénétré de la science sacrée, éloigné de toute affectation, il paraît en chaire avec l'autorité d'un homme de Dieu communiquant au peuple, non sa doctrine propre, mais celle du Maître qui l'a envoyé. Touché de compassion devant l'ignorance religieuse des gens des campagnes, Don Alphonse fonde avec plusieurs compagnons, en novembre 1732, un nouvel Institut religieux qui prendra pour nom «Congrégation du Très Saint Rédempteur». Pénétrés de la surabondance de la Rédemption acquise par le Christ sur la Croix, les Rédemptoristes se consacrent à prêcher des missions aux pauvres gens, afin de les instruire des vérités fondamentales de la foi, et de les éclairer sur la grande affaire.
Don Alphonse écrira en effet: «Une affaire dépasse en importance toutes les autres: c'est l'affaire de notre salut éternel; il y va de notre fortune ou de notre ruine éternelle. Impossible, en effet, d'échapper à cette alternative: nous sauver ou nous perdre pour toujours, mériter une éternité de joies ou une éternité de supplices, vivre à jamais heureux ou malheureux» (Voie du Salut [VS], 1re Méditation). Le salut des âmes est au centre des préoccupations de l'Église, comme l'a rappelé le Pape Benoît XVI en s'adressant aux évêques d'Amérique latine: «Notre Sauveur veut que tous les hommes soient sauvés et arrivent à connaître pleinement la vérité (1 Tm 2, 4-6). Telle est la finalité de l'Église et il n'y en a aucune autre: le salut des âmes, une par une» (13 mai 2007). «Chose étonnante! écrit encore Don Alphonse. Il n'y a personne qui ne rougisse d'être taxé de négligence dans les affaires du monde; et il y en a tant qui ne rougissent pas de négliger la plus importante de toutes: celle de l'éternité!... Affaire importante, affaire unique, affaire irréparable. Assurément, le comble de l'erreur, c'est de méconnaître l'importance du salut éternel; et c'est par conséquent le comble du malheur que de manquer son salut. À tout autre mal il y a remède: on perd une somme d'argent, mais il y a moyen d'en gagner une autre; on perd son emploi, mais il se peut qu'on le recouvre; et quand même on perdrait la vie, si on sauve son âme, tout est réparé. Mais celui qui se damne, se damne sans remède. Car on ne meurt qu'une fois, et l'âme, une fois perdue, est perdue pour toujours» (Préparation à la Mort [PM], 12e Considération).
Sans attendre
Les gens de la campagne bénéficiant des missions reçoivent avec avidité ces saintes vérités, et se préparent au sacrement de Pénitence. Les missionnaires, fidèles ministres de la réconciliation, passent de longues heures au confessionnal. Là, en vrais médecins des âmes, ils savent consoler les affligés. «Plus une âme est enfoncée dans le mal, dit Don Alphonse, plus il faut la bien recevoir, afin de l'arracher aux griffes de l'ennemi». L'écoute du pénitent avec patience et douceur contribue à le disposer à l'absolution, soit immédiatement, soit après un temps d'épreuve. Comme pénitence sacramentelle, Don Alphonse impose des exercices de piété très simples, mais de nature à éloigner du péché et à ranimer la ferveur. Déchargées de leurs péchés, ces personnes reçoivent ensuite la sainte Communion, et s'en vont raconter leur bonheur aux habitants des hameaux plus éloignés, glorifiant ainsi la miséricorde de Dieu. «Dieu ne saurait dédaigner celui qui vient se jeter à ses pieds. Que dis-je? Lui-même invite le pécheur et Il s'engage à l'accueillir tout aussitôt. Reviens à moi, dit le Seigneur, et je te recevrai (Jr 3, 1). Tournez-vous vers moi et je me tournerai vers vous (Zac 1, 3). Oh! avec quel amour, avec quelle tendresse Dieu presse contre son coeur le pécheur qui revient à Lui!... Il met sa gloire à user de miséricorde envers les pécheurs et à leur pardonner...» (PM, 16e Considération).
L'abondance du rachat
Le plus important
Certains auteurs de cette époque, sous l'influence du protestantisme et du jansénisme, avaient tendance à détourner les fidèles de la dévotion à la Très Sainte Vierge. Aussi Don Alphonse publie-t-il en 1750 Les Gloires de Marie [GM], qui est un commentaire du Salve Regina; il y énonce les prérogatives de la Mère de Dieu: toutes les grâces passent par les mains de Marie, et par conséquent Marie est notre médiatrice nécessaire (cf. GM, ch. 5). En effet, de même que Marie est la Mère de Jésus, Dieu veut qu'elle soit la Mère de chaque homme racheté par Jésus. De même qu'elle a porté Jésus dans son sein, elle nous porte dans son coeur jusqu'à ce que le Christ soit formé en nous. «C'est en considération des mérites de Jésus-Christ que Marie fut investie de ce grand pouvoir qui la constitue Médiatrice, non pas à titre de justice, mais à titre de grâce et par intercession» (ibid.). Don Alphonse veut que l'on prêche toujours, dans les missions, un sermon sur la Vierge Marie, Mère de Miséricorde, et sur la nécessité, pour qui veut persévérer et se sauver, de recourir fréquemment à son intercession. Il écrit: «La bienheureuse Vierge a révélé à sainte Brigitte : «Je suis la Reine du Ciel et la Mère de Miséricorde ; je suis la joie des justes et la porte par laquelle les pécheurs ont accès auprès de Dieu. Il n'est pas de pécheur maudit au point d'être privé des effets de ma miséricorde tant qu'il vit sur la terre... Aucun pécheur n'est tellement rejeté de Dieu, qu'il ne puisse, en m'appelant à son aide, retourner à Dieu et obtenir miséricorde»... Marie a été établie Reine de Miséricorde pour sauver, par sa protection, les pécheurs les plus coupables et les plus désespérés, pourvu qu'ils se recommandent à elle» (GM, ch. 1).
Vivre avec Jésus
Les épreuves ne manquent pas à la jeune Congrégation des Rédemptoristes. En 1752, le roi des Deux-Siciles, Charles III, décrète la spoliation des biens de l'institut, en les faisant passer aux mains des évêques. Plus tard, c'est Alphonse lui-même qui est obligé, par les intrigues de certains de ses fils, d'abandonner son poste et de s'éloigner. Sans se troubler, il prêche aux siens la soumission à la volonté divine: «Le Seigneur, dit-il, veut faire prospérer l'Institut non point par la faveur ou la protection des princes, mais par le mépris, la pauvreté, la souffrance et la persécution. Quand avez-vous vu les oeuvres de Dieu commencer au milieu des applaudissements? Saint Ignace augurait bien de l'avenir lorsqu'on lui apprenait quelque nouvelle tracasserie ou quelque nouveau revers».
En 1762, le Père Alphonse est nommé évêque de Sainte-Agathe-des-Goths, petit diocèse non loin de Naples. Malgré l'exemple de nombreux prélats de son temps, pour qui l'épiscopat exige luxe et apparat, il continue à mener une vie pauvre et mortifiée. Grâce à ses prédications, en peu de temps toute la ville épiscopale a changé de face: confessions et communions deviennent plus fréquentes, les églises se remplissent, la dévotion à la Sainte Vierge croît dans tous les coeurs. Soucieux de l'avenir du diocèse, il examine avec soin les candidats au sacerdoce avant de leur imposer les mains. À une époque où les postes ecclésiastiques rémunérés attirent nombre de sujets peu aptes à exercer le ministère, son zèle le conduit à refuser les candidats indignes. Le relâchement plus ou moins général de l'époque a amené la ruine de la ferveur, même à l'autel. Un des objets principaux de la sollicitude de Mgr de Liguori est de rétablir partout l'exacte observance des rites sacrés. En effet, hier comme aujourd'hui, la gloire de Dieu exige la dignité dans le service des divins mystères: «Le Mystère de l'Eucharistie est trop grand pour que quelqu'un puisse se permettre de le traiter à sa guise, en ne respectant ni son caractère sacré, ni sa dimension universelle... Tous les fidèles du Christ disposent du droit de bénéficier d'une véritable liturgie et cela vaut tout particulièrement pour la célébration de la sainte Messe qui soit conforme à ce que l'Église a voulu et établi» (Instruction Redemptionis Sacramentum de la Congrégation pour le Culte Divin, 25 mars 2004, nn. 11 et 12).
Perclus pendant dix-neuf ans
À l'occasion du deuxième centenaire de sa mort, le 1er août 1987, le Pape Jean-Paul II écrivait: «La popularité de notre saint repose sur sa concision, sa clarté, sa simplicité, son optimisme, son affabilité qui va parfois jusqu'à la tendresse. À la racine de cet amour du peuple qui est le sien, il y a l'angoisse du salut éternel: se sauver soi-même et sauver les autres. Et il désire ardemment non seulement le salut, mais la perfection et jusqu'à la sainteté. C'est pourquoi son action pastorale n'exclut personne: il écrit à tous, il écrit pour tous».
Saint Alphonse-Marie de Liguori, obtenez-nous la grâce de marcher résolument dans la voie du salut éternel et d'y entraîner le plus d'âmes possible!