Saint Benoît et l'héritage monastique

U.I.O.G.D.

Ut in omnibus glorificetur Deus.

Afin qu’en toutes choses, Dieu soit glorifié !

Règle Chap. 57

Au début de l’ére chrétienne, alors que les « grandes » persécutions des premiers siècles sévissent encore, un mouvement spirituel a émergé parmi les chrétiens des deux sexes qui va prendre une grande ampleur. Il aura une influence durable jusqu’à nos jours : c’est le monachisme. Quand et comment a-t-il émergé ? Il est difficile de dirimer cette question. Héritier de ce mouvement, saint Benoît de Nursie s’est distingué et a laissé derrière lui un héritage monastique dont les moines de l’abbaye Saint-Joseph de Clairval veulent vivre encore aujourd’hui.

L’émergence du monachisme

La naissance du monachisme

Après la période des persécutions, l’Édit de Milan en 313 assure la liberté de culte aux chrétiens dans l’Empire romain. De fait, la Paix, accordée à l’Église par l’empereur Constantin, favorise le développement du monachisme au grand jour, répondant au désir de beaucoup de tout quitter pour suivre le Christ. La vie monastique se propage dès lors comme une traînée de poudre.

Où a-t-elle pris naissance ? Il est difficile de répondre à cette question. Il semble bien que des foyers soient apparus de manière spontanée et simultanée en diverses régions, aussi bien en Orient qu’en Occident, mais d’une façon quelque peu éphémère.

La stabilisation du monachisme

Il faudra attendre le monachisme égyptien, avec saint Antoine le grand (251-356), père du monachisme anachorétique (vie solitaire), mais aussi saint Pacôme (292-346), père du cénobitisme (vie en commun) pour que se stabilise dans la durée ce mouvement de fuite du monde afin de se consacrer à la suite du Christ.

L’influence orientale

Ce monachisme antique va devenir une référence pour toute la vie monastique, en particulier en Occident, grâce à l’influence des écrits de saint Jean Cassien (360-435), Institutions cénobitiques & Conférences. L’auteur y relate l’expérience qu’il fait du monachisme oriental, tant celui des déserts de Palestine que celui d’Égypte. Ses livres ont profondément influencé le monachisme occidental, du Ve siècle à nos jours, notamment en raison de leur influence sur la Règle de saint Benoît.

Un autre lien entre l’Orient monastique et saint Benoît, est la grande figure de saint Basile, évêque de Césarée (329-379), Père de l’Église, et législateur du monachisme oriental actuel. Il rédigea une règle monastique, un ensemble de préceptes sous forme de questions-réponses. Dans le dernier chapitre de sa Règle, saint Benoît invite ses fils à s’inspirer de « la Règle de notre Père saint Basile… modèle de vie vertueuse pour moines vraiment bons et obéissants. »

Saint Benoît de Nursie

Benoît naît à Nursie en Ombrie vers 480, d’une famille noble. Il commence à étudier à Rome, mais, bien vite, il fuit l’ambiance délétère du milieu estudiantin de cette époque.

Après un temps de vie érémitique à Subiaco, rejoint par des disciples, il établit sur place un ensemble de douze petits monastères de douze moines.

Toutefois, à cause de la jalousie d’un prêtre voisin, il part au Mont-Cassin fonder un grand monastère, avec un oratoire dédié à saint Martin (316-397), initiateur du monachisme en Gaule. Là, il rédige sa Règle des moines vers 540.

Après avoir fondé deux autres monastères, l’un à Rome, l’autre à Terracine, il meurt le 21 mars 547.

Saint Benoît nous est connu grâce à deux écrits : sa Règle et les Dialogues de saint Grégoire le Grand, dans lequel, au livre II, l’auteur relate des épisodes de la vie du père du monachisme d’Occident.

La Règle des moines

Équilibrée entre prière et travail, remarquable par sa discrétion « pour permettre aux forts de désirer faire davantage et aux faibles de ne pas se dérober » (Règle chap. 64), elle établit un cadre de vie à la recherche de Dieu, une spiritualité telle que la postérité a pu donner au monachisme ainsi initié la devise : Pax, c’est-à-dire Paix.

Fondements de la Règle

Cette Règle, originale en son propos, s’appuie sur la tradition monastique antérieure, pour ne citer que quelques auteurs qui l’ont influencée : saint Basile, saint Jean Cassien, saint Augustin, saint Léon, saint Pacôme, et surtout le Maître (auteur inconnu, qui écrivit une règle ayant inspiré directement saint Benoît).

Elle invite le moine à la conversion par l’humilité, l’obéissance, la stabilité, c’est-à-dire un engagement à vivre jusqu’à la mort dans le même monastère.

Pérennité de la Règle

Cette règle est toujours suivie dans les monastères bénédictins répartis dans le monde entier, mais aussi cisterciens, camaldules… Elle a toujours un rayonnement hors pair, car elle fût adoptée par de nombreuses congrégations jusqu’à nos jours.

Dans son dernier chapitre : « Que toute la pratique de la justice n’est pas contenue dans cette Règle », saint Benoît invite ses fils, surtout s’ils se montrent avides d’atteindre la perfection, à lire d’autres sources, citant les auteurs connus de son époque.

C’est ainsi que pour nous, moines de Saint-Joseph de Clairval, les Exercices spirituels de saint Ignace de Loyola sont une source d’inspiration qui nous encourage dans notre recherche de Dieu. Ainsi, nous parviendrons, avec la protection de Dieu, « aux plus hautes cimes de la doctrine et des vertus, et, ainsi, mériterons d’avoir part à son Royaume. Amen » (cf. Règle chap. 73 et Prologue).

L’histoire complexe du monachisme chrétien trouve en Saint Benoît de Nursie une figure centrale et pérenne. Son influence s’étend bien au-delà de son époque, et aujourd’hui, les monastères bénédictins comme Saint-Joseph de Clairval, héritiers de cette tradition millénaire, perpétuent sa vision. Ils offrent un refuge spirituel dans un monde en perpétuel changement, où la quête de sens et de paix intérieure demeure essentielle.