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8 avril 2012 Fête de Pâques |
«Ce sont les lois de lÉvangile et les commandements du Christ qui conduisent à la joie et au bonheur: telle est la vérité proclamée par saint Philippe Néri aux jeunes quil rencontrait dans son travail apostolique. Son annonce était dictée par une expérience intime de Dieu, effectuée surtout dans loraison» (Bienheureux Jean-Paul II, le 7 octobre 1994, à loccasion du quatrième centenaire de la mort du saint). Peu dhommes ont marqué la ville de Rome dune empreinte aussi forte, aussi profonde et durable que saint Philippe Néri, ce fou de Dieu. Il na pourtant jamais occupé de place importante dans lÉglise. Mais son rayonnement personnel considérable est perceptible encore aujourdhui.
Philippe naît à Florence, en Toscane, le 21 juillet 1515, deuxième dune famille de quatre enfants. Son père, Francesco, est notaire. Sa mère, Lucrezia, décède lorsquil a cinq ans. Elle est bientôt remplacée au foyer par Alessandra, deuxième épouse de Francesco, qui entoure lenfant dune tendresse particulière. Florence est alors cette capitale des arts et des banquiers qui rayonne au loin. Très jeune, Philippe, déjà remarqué pour son caractère enjoué et docile, fréquente les Pères dominicains du couvent Saint-Marc. Il y reçoit une double influence: celle de la beauté artistique, grâce aux peintures réalisées sur les murs par le bienheureux Fra Angelico; et celle de Savonarole, ce dominicain qui, par sa prédication, a soulevé la ville quelque trente ans plus tôt. Philippe en retient un ardent amour de Jésus et lappel à la conversion, mais, loin de partager lexaltation de Savonarole, il manifestera équilibre et douceur.
Après le sac (pillage) de Rome par les lansquenets impériaux, en 1527, suivi de celui de Florence, en 1530, Philippe est envoyé chez un riche parent qui a fait fortune dans les textiles. Il y commence une vie remplie de calculs de rentabilité sur le commerce des tissus et des laines, où seul le gain compte; bientôt, le jeune homme, troublé, se demande comment on peut licitement amasser tant dargent alors que les pauvres sont si nombreux. Il décide de quitter son généreux bienfaiteur pour aller mener à Rome une vie plus évangélique. Là, il est accueilli par un compatriote florentin, directeur des douanes, devient précepteur des deux fils de son hôte et mène une vie très ascétique, se nourrissant dolives, de pain et deau. Rome se relève avec peine des dévastations du terrible sac de 1527. On la tient pour une ville mal famée; elle abrite pourtant des courants spirituels qui laissent augurer dune renaissance de la vie religieuse. Philippe profite du voisinage de lUniversité pontificale de Rome, La Sapience, pour étudier la philosophie et la théologie, non pas selon un programme systématique mais en approfondissant les matières les plus utiles pour aider les personnes qui sadresseront à lui.
Lembrasement de la charité
Le jeune homme se rend souvent la nuit à la cata-combe de Saint-Sébastien pour prier. Là, la veille de la Pentecôte 1544, lEsprit Saint lui donne une grâce exceptionnelle: il ressent un embrasement de charité dans son cur et voit une flamme en forme de globe franchir ses lèvres; il sent que cette flamme parvient jusquà son cur et le fait vibrer très intensément. Cette grâce aura une répercussion sur toute sa vie, son cur ayant été comme agrandi par lamour divin. Lors dune visite médicale pour une bronchite ordinaire, le médecin aura la stupéfaction de constater que des côtes ont été rompues par lélargissement physique du cur. Par la suite, le Seigneur gratifiera souvent Philippe dextases et de dons surnaturels.
Philippe puise dans ses longues heures de prière un intense amour du prochain qui le porte à visiter les hôpitaux et à acquérir une solide compétence dinfirmier. À lépoque, il sagit dun ministère quasi héroïque, vu létat des établissements de soins pour les pauvres; toutefois, le jeune homme comprend bientôt que les malades ont surtout besoin de se sentir aimés. Il soccupe aussi des pèlerins pauvres et malades qui arrivent à Rome, pour lesquels, avec son confesseur, Persiano Rosa, il ouvre une maison daccueil. Bientôt, il y reçoit également des convalescents, qui, dès que leur état commence à saméliorer, sont chassés des hôpitaux pour faire place à dautres et se trouvent souvent à la rue, avec de graves dangers de rechute. Cette activité se développe tellement quen 1548, il fonde la Confrérie de la Trinité des Pèlerins.
Lheure de faire le bien
Philippe Néri rencontre fréquemment saint Ignace deLoyola et ses premiers compagnons, surtout saint François Xavier; il envisage même, un moment, de se joindre à eux. Grâce à son influence, la dévotion eucharistique dite des Quarante Heures, temps dadoration en réparation des scandales occasionnés par les fêtes du carnaval, est introduite à Rome. Il prend part à lorganisation des groupes dadorateurs, et exhorte ceux qui ont terminé leur temps doraison en disant: «Allez, lheure de votre prière est finie, mais non celle de faire le bien.»
Convaincu par son confesseur, malgré la résistance de son humilité, de recevoir le sacerdoce, Philippe est ordonné le 23 mai 1551, à lâge de 35 ans. Conscient de son indignité, il retarde la célébration de sa première Messe, mais peu à peu, il en arrive à concevoir le Saint-Sacrifice comme un bonheur divin et lacte le plus sublime que puisse accomplir un homme. Toutefois, ses extases et lévitations devenant de plus en plus fréquentes, il évite de célébrer en public. Dautre part, ladministration du sacrement de Pénitence rend son ministère auprès des âmes beaucoup plus fécond. Dès 1551, il sinstalle à la communauté sacerdotale de San Girolamo della Carità. De laube à midi, il entend les confessions dans léglise; puis il célèbre la sainte Messe, reçoit et confesse à nouveau, dans sa chambre. Il sait mettre ses pénitents à laise et leur faire sentir demblée sa bienveillance et sa charité sacerdotale, parlant à chacun de la part du Seigneur et conseillant la communion fréquente. On repart de chez lui soulagé et réconforté; le nombre de ses fidèles croît sans cesse. Mais son influence lui attire des persécutions et des calomnies; un désarroi profond et une très vive souffrance lenvahissent alors, à la pensée que ses détracteurs empêchent laccomplissement du bien. « Ô Jésus, dit-il dans sa prière, je nai cessé de te demander la vertu de patience, pourquoi ne me laccordes-tu pas? Pourquoi permets-tu que se présentent à moi tant doccasions dinquiétude, de colère, dimpatience?» Sa demande est justifiée, car, comme le soulignait sainte Thérèse dAvila dans un célèbre poème: «La patience obtient tout.»
Philippe Néri réunit des jeunes gens en cénacle. Il possède lart dexpliquer les choses difficiles, mais sait également faire participer ses auditeurs à la conversation. Son humour, parfois audacieux, lui attire lestime de beaucoup de jeunes curieux, bientôt emportés dans le sillage de sa foi brûlante. Un jour, un étudiant lui expose ses rêves et ses ambitions, et le saint se contente de répondre par une question, toujours la même: «Et après?» Le jeune homme finit par sapercevoir de la vanité de ses projets quand on les pèse au poids de léternité.
Dans son message pour le carême 2012, le Pape Benoît XVI écrivait: «Je désire rappeler un aspect de la vie chrétienne qui me semble être tombé en désuétude: la correction fraternelle en vue du salut éternel. En général, aujourdhui, on est très sensible au thème des soins et de la charité à prodiguer pour le bien physique et matériel des autres, mais on ne parle pour ainsi dire pas de notre responsabilité spirituelle envers les frères... Dans les communautés vraiment mûres dans leur foi, on se soucie non seulement de la santé corporelle du frère, mais aussi de celle de son âme en vue de son destin ultime.»
Réunis en Son Nom
Lors des réunions organisées pour les jeunes on sen-tretient sur les Saintes Écritures, surtout lÉvangile selon saint Jean, mais aussi sur les auteurs spirituels tels que Jean Cassien, sainte Gertrude, etc. Chacun peut exprimer librement sa pensée sur le passage qui a été lu, sous le contrôle de Philippe; celui-ci est persuadé que le Saint-Esprit opère grandement dans ces réunions, car là où deux ou trois seront réunis en mon nom, je serai au milieu deux, a promis Jésus (Mt 18, 20). Peu à peu, ces jeunes se forment à la vie spirituelle, gage denthousiasme et de renouvellement des curs. Cest la naissance de lOratoire. Ce terme désigne dabord le local où lon se réunit pour prier, puis le groupe de ceux qui le fréquentent, dénommés Oratoriens. Les réunions comportent deux séances, lune de prière et lautre de réflexion dans quatre domaines: lhistoire de lÉglise, la vie des saints, les questions touchant à la vie morale, enfin loraison et ses difficultés. Les jeunes gens préparent eux-mêmes des exposés; Philippe souhaite que lon parle de réalités concrètes, illustrées par des expériences prises dans la vie des saints ou dans lhistoire de lÉglise. Après les réunions, il entraîne ses disciples dans la visite dune église ou dun hôpital; puis tous se retrouvent en plein air, par exemple sur le Mont Janicule; là, des récréations musicales deviennent bientôt de véritables concerts, grâce à la participation de musiciens comme Palestrina et des membres de la chapelle pontificale. Cette musique de première qualité attire, à son tour, dautres personnes. Convaincu que le beau mène au bien, Philippe Néri fait entrer lart dans son dessein éducatif, promouvant des initiatives capables de porter au vrai et au bien.
Parmi les personnalités qui se confient à Philippe, on compte Jean-Baptiste Salviati, cousin éloigné de la reine Catherine de Médicis. Celui-ci se convertit et passe du grand faste à lextrême humilité; le saint doit intervenir pour le dissuader de chercher trop dhumiliations.
César Baronius entre encore jeune à lOratoire, en 1557. Discernant la trempe de son âme, Philippe le soumet à une série dépreuves qui lui procurent patience et humilité. Puis, dans un dessein apologétique face à lhistoriographie protestante, il loriente vers létude de lhistoire de lÉglise où il excellera, notamment par les Annales Ecclésiastiques, uvre monumentale qui deviendra une des bases de la science moderne de lhistoire de lÉglise. Plus tard il sera créé cardinal.
Gabriel Tana, jeune homme atteint de la tuberculose, se révolte contre cette maladie. Il passe par une période de tentations de désespoir et de désert spirituel avec des visions diaboliques. Philippe ramène la paix dans son âme: le jeune homme retrouve la sérénité et, au moment de mourir, manifeste une grande joie. Philippe Néri est souvent appelé au lit des mourants. Leffet de sa présence est impressionnant, fréquemment accompagné de guérisons miraculeuses. Avec ses disciples, il visite assidûment les malades, et il envoie ses jeunes mendier pour les pauvres à la porte des églises, ce qui est particulièrement difficile aux gentilshommes habillés à la dernière mode.
Recueillement et allégresse
Dès 1559, Philippe inaugure les pèlerinages aux septbasiliques majeures de Rome, en esprit de pénitence. Lambiance est au recueillement et à lallégresse spirituelle. Au début, une trentaine de jeunes participent à ce pèlerinage, mais plus tard, ils seront des centaines voire des milliers. La veille, on commence par visiter Saint-Pierre; le lendemain, on se retrouve à Saint-Paul, puis à la catacombe de Saint-Sébastien, à Saint-Jean-de-Latran, à Sainte-Croix-de-Jérusalem, à Saint-Laurent-hors-les-murs, pour finir à Sainte-Marie-Majeure. À cette même époque, les débats autour de la mémoire de Savonarole se réveillent et certains veulent faire condamner ses ouvrages; Philippe contribue à faire abandonner ce projet, mais sa prise de position a attiré lattention sur lui et lont rendu suspect aux yeux de ceux qui napprécient pas Savonarole. Le Cardinal-Vicaire (cest-à-dire le vicaire du Pape pour le diocèse de Rome) intervient et, craignant que les grandes processions de lOratoire ne dégénèrent en émeutes, il intime à Philippe linterdiction dorganiser des réunions et celle de confesser, pendant quinze jours. Le saint se soumet et dissuade ses fidèles de protester contre les décisions de lautorité ecclésiastique: «Pour moi, les ordres de mes supérieurs ont toujours passé avant tout le reste, et il mest doux dêtre obéissant.» Le Cardinal-Vicaire étant venu soudainement à mourir, toutes les sanctions sont levées.
Il arrive que lÉglise, dans la personne de ses ministres, fasse souffrir ses enfants. Dans de telles circonstances, les saints savent lui demeurer fidèles. La foi leur rappelle quentre « Jésus-Christ, notre Seigneur, qui est lÉpoux, et lÉglise, qui est son Épouse, il ny a quun même Esprit qui nous gouverne et nous dirige pour le salut de nos âmes, et que cest par le même Esprit et le même Seigneur qui donna les dix commandements quest dirigée et gouvernée notre Mère la sainte Église» (Exercices de saint Ignace, 365).
Une délégation de florentins, ses compatriotes, demande à Philippe Néri de prendre en charge léglise Saint-Jean-des-Florentins, sur les bords du Tibre; une communauté de lOratoire sy installe. À cette époque se met en place la vie communautaire des prêtres de lOratoire. Submergé par ceux qui sadressent à lui, le fondateur a, en effet, invité quelques-uns de ses plus anciens disciples à recevoir eux aussi les Ordres pour se consacrer aux fidèles de lOratoire. Il ne leur donne pas de Règle: sa direction spirituelle, agrémentée de quelques prescriptions de simple bon sens, qui reflètent une profonde connaissance du cur de lhomme, leur en tient lieu.
Un goût critiqué
En 1567, sous le Pape saint Pie V, un sourd complotest sur le point daboutir à la suppression de lOratoire. Saint Charles Borromée, alors archevêque de Milan, réussit à sauver cette fondation. Deux dominicains étant venus, sur lordre du Pape, écouter les sermons de Philippe, en sont tellement satisfaits et édifiés quaprès la fin de leur mission, ils continuent à venir les entendre. Sept ans plus tard, un jeune homme, exclu de lOratoire à cause de son inconduite, lance une campagne de calomnies. On critique le goût du fondateur pour le spectacle public et les plaisanteries, deux moyens dapostolat quil utilise volontiers. Philippe en est peiné; les persécutions dont il est lobjet laffectent toujours profondément. Après la mort de saint Pie V, le nouveau Pape, Grégoire XIII, confie à lOratoire une petite église délabrée dédiée à Marie, Santa Maria in Vallicelli. Bientôt, la nécessité se fait sentir de reconstruire entièrement léglise. Larchitecte est effrayé par le projet: «Comment va-t-on faire une église si grande?» Mais en creusant à lendroit indiqué par le saint, on trouve un mur solide, tout prêt à servir de fondation.
En 1575, lOratoire est officiellement érigé par le Pape, et, en 1577, le fondateur est élu à la charge de premier Préposé général. Les postulants affluent. Philippe ne désire pas voir lOratoire essaimer hors de Rome. Des fondations dOratoires indépendants se font pourtant à San Severino, Milan, Padoue, etc., prenant la maison romaine pour modèle, mais sans lui être soumises. En 1586, toutefois, lassemblée plénière des Oratoriens se prononce en faveur dune fondation à Naples. Par la suite, cette fondation évoluera vers une vie religieuse plus réglée, contrairement à lOratoire de Rome qui gardera le style informel voulu par le fondateur.
En mars 1583, Paolo Massimo, fils de noble famille, âgé de quatorze ans, tombe gravement malade; Philippe le visite chaque jour. Au moment de lagonie, ladolescent le fait appeler. Arrivé après sa mort, le saint le serre sur sa poitrine, se met en prière et lappelle deux fois par son nom. Lenfant ouvre les yeux: Philippe lui demande sil veut vivre ou sil préfère mourir. Lenfant répond clairement quil préfère mourir: «Va! lui dit Philippe, sois béni et prie pour moi», et Paolo meurt. Aujourdhui encore, chaque année, le 16 mars, lévénement est célébré au palais Massimi, près de la place Navone. Cette résurrection et des guérisons extraordinaires sont rapidement connues dans la ville; elles contribuent à la réputation de sainteté de Philippe Néri, qui invente toutes sortes dexcentricités pour essayer de détromper les gens. Il est ravi lorsquon dit de lui: «Voyez ce vieux fou!» Il prescrit aussi à ses compagnons et pénitents daccomplir telle ou telle chose humiliante, pour les préserver de lorgueil. En 1590, il résiste à Grégoire XIV, nouvellement élu Pape, qui souhaite lélever au cardinalat.
Philippe Néri accorde une grande importance aux sacrements. «Les confesseurs, dit-il, doivent faire pénétrer chez leurs pénitents quelque chose de la tendresse de lamour de Dieu... Efforcez-vous toujours de porter les pécheurs au Christ par votre amabilité et votre amour... Efforcez-vous de leur faire comprendre cet amour de Dieu, seul capable daccomplir réellement de grandes choses.» Lamour du Christ est le fondement de lapostolat du saint, caractérisé par laffabilité et la douceur: il accueille aimablement tous ceux qui se présentent, sait les écouter, se réjouir avec ceux qui sont dans la joie, saffliger avec ceux qui pleurent. Une religieuse dépressive se déclare perdue. Philippe lui affirme: «Je te dis que tu es destinée au paradis et je te le prouverai. Dis-moi donc pour qui le Christ est mort. Pour les pécheurs. Exact. Et qui es-tu, toi? Une pécheresse. Alors le paradis est pour toi puisque tu regrettes tes péchés.» Pour lui, lhumilité est le pendant de lamour: «Avant tout, il faut être très humble», répète-t-il souvent à ses disciples. Il sait que, dans la vie spirituelle, «on descend lorsquon sélève (par lorgueil) et on monte par lhumilité» (Règle de saint Benoît, ch. 7). Il vise à la sanctification de tous: «Les gens qui vivent dans le monde, affirme-t-il, doivent sefforcer de parvenir à la sainteté dans leur propre maison. La vie à la cour, la profession, le travail ne sont pas des obstacles pour qui veut servir Dieu».
«Je sais ce que je dis!»
Sa santé se détériorant de plus en plus, Philippe Néridémissionne, en décembre 1593, de sa charge de Préposé général, et lassemblée plénière de lOratoire élit Baronius pour lui succéder. Mais le saint continue à recevoir dans sa chambre et descend de temps en temps à léglise pour entendre la confession de trois ou quatre pauvres vieilles femmes. Quand ses forces le lui permettent, il va rendre visite à des amis dans la peine, ou à des malades, leur apportant un petit cadeau. Au printemps de 1594, la Sainte Vierge lui apparaît dans sa chambre. Il affirme aux médecins: «Je nai plus besoin de vous. La Madone ma guéri», ce qui se révèle exact. Philippe a toujours eu une dévotion profonde pour la Sainte Vierge: «Mes petits enfants, soyez des dévots de Marie, aime-t-il à recommander: je sais ce que je dis! Soyez des dévots de Marie !»
Un an plus tard, le 12 mai 1595, il a un grave malaise et perd connaissance. En présence de la sainte Eucharistie apportée par le Père Baronius, il se ranime soudainement et dit: «Voici mon Dieu! Donnez-le moi vite!» Le matin du 26 mai, fête du Très Saint-Sacrement, très tôt, il demande que lon fasse venir ceux qui veulent se confesser à lui. Dans la journée, le médecin lui dit: «Jamais je ne vous ai vu en aussi bonne santé!» La nuit suivante, un nouveau malaise survient et tous ses frères accourent à son chevet. Le Père Baronius fait la recommandation de lâme à Dieu et demande la bénédiction du moribond. Philippe lève la main et reste quelques instants dans cette position, les yeux tournés vers le ciel; puis, ayant abaissé la main et fermé les yeux, il expire aussi tranquillement que quelquun qui sendort.
Grégoire XV la canonisé le 12 mars 1622. Son corps, exposé dans un cercueil en verre, est conservé dans son église Sainte-Marie in Vallicelli. À la mort du saint, on comptait sept Oratoires en Italie. Aujourdhui existe une fédération denviron 80 communautés dite Congré-gation de lOratoire, comptant environ 500 religieux répartis dans 19 pays.
Ce saint de la joie a vécu à une époque difficile de lhistoire de lÉglise (relâchement moral de nombreux membres du clergé, Réforme protestante et bouleversements politiques), mais il nous enseigne que lÉglise, fondée sur Pierre (cf. Mt 16, 18), ne cesse jamais davoir les promesses de la vie éternelle.