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3 décembre 2015 fête de saint François Xavier |
Le 2 octobre 1979, dans la cathédrale Saint-Patrick de New York, devant une foule immense de fidèles venus saluer le Souverain Pontife, savance péniblement, parmi les évêques américains, un vénérable octogénaire qui fléchit le genou. Jean-Paul II le relève et lembrasse en disant : « Vous avez bien écrit et parlé du Seigneur Jésus-Christ. Vous êtes un fils loyal de lÉglise. » La foule est touchée par le geste, mais le prélat est ému par les paroles du Pape : rien ne pouvait réjouir davantage Mgr Fulton Sheen, au terme de sa vie toute dévouée à lamour de Jésus-Christ et de son Église. Selon ses propres mots : « LÉglise est le Temple de la Vie et jen suis une pierre vivante ; elle est lArbre du Fruit éternel et jen suis une branche ; elle est le Corps mystique du Christ sur terre dont je suis membre. LÉglise est donc plus pour moi que je ne suis pour moi-même
Elle mabsorbe tellement que ses pensées sont mes pensées, ses amours mes amours, ses idéaux mes idéaux. Je considère que le fait de partager sa vie est le plus grand don que Dieu mait jamais fait, comme je considérerais le fait de perdre sa vie comme le plus grand malheur qui puisse marriver
Ma vie est sa vie, mon être est son être, elle a mon amour, mon dévouement. »
Mgr Sheen est venu au monde le 8 mai 1895, à El Paso (Illinois, États-Unis), premier-né de quatre garçons. Le jour de son Baptême, il est placé sur lautel de la Vierge en signe de consécration spéciale à la Reine du Ciel. Il reçoit alors les noms de Peter John, mais on lappellera couramment du nom de jeune fille de sa mère, Fulton, et cest sous ce vocable quil sera connu. Toute sa vie, il sera reconnaissant davoir eu des parents profondément catholiques. « Les influences les plus profitables, écrira?t?il, sont celles qui sont inconscientes, non délibérées, lorsque personne ne regarde, ou lorsque la réaction à la bonne action nest pas recherchée. Telle est linfluence à long terme dune mère à la maison ; remplissant ses devoirs quotidiens avec amour et esprit de sacrifice, elle laisse sa trace imprimée dans les enfants, trace qui se creuse avec les années. »
Fulton suit une scolarité classique et se révèle en tout point un excellent élève. Durant lété, il aide son père à la ferme, malgré son manque dattrait pour ces travaux car ses centres dintérêt sont plutôt intellectuels. Un voisin dit un jour à son père : « Ton fils aîné ne vaudra jamais rien : il a toujours le nez dans un livre. » Après ses études secondaires, le jeune homme entre à luniversité, où ses succès lui valent une bourse en vue dobtenir un doctorat. Cependant, il a perçu lappel du Seigneur au sacerdoce. Il demande conseil à un bon prêtre, labbé Bergan, qui lui répond avec netteté : « Renonce à ta bourse détudes : voilà ce que le Seigneur veut que tu fasses. Et si tu mets en Lui ta confiance, tu recevras, après ton ordination, une bien meilleure éducation universitaire. » Fulton décide alors dentrer au séminaire ; il ne le regrettera jamais.
Un temps notable
Le 20 septembre 1919, jour de son ordination sacerdotale, il fait deux promesses : passer une heure devant le Saint-Sacrement chaque jour de sa vie, et célébrer la Messe tous les samedis en lhonneur de la Sainte Vierge afin de solliciter la protection de la Reine des cieux sur son sacerdoce. Il parlera plus tard du « sentiment profond et extatique damour qui vient avec lordination, et qui rend insipide tout autre amour. » LHeure sainte sera le sujet fréquent de ses réflexions et de ses prédications, surtout lorsquil sadressera aux prêtres. Il soutient quil est impossible au prêtre de donner le Christ aux autres, sil ne passe pas un temps notable chaque jour en sa présence : « Ni les connaissances théologiques, ni laction sociale, à elles seules, ne suffisent pour nous maintenir amoureux du Christ, si elles ne sont pas précédées par une rencontre personnelle avec Lui. » Car il sagit damour, et lamour exige de passer du temps avec lêtre aimé : « Bien peu dâmes méditent : soit le mot leur fait peur, soit elles nen connaissent pas même lexistence. Dans lordre humain, une personne amoureuse a toujours au cur la personne aimée, elle vit en présence de lautre, se résout à faire la volonté de lautre, et sapplique avec jalousie à ne pas se laisser dépasser, si peu que ce soit, dans le don de soi. Appliquez cela à lâme amoureuse de Dieu, et vous aurez les rudiments de la méditation. »
À peine ordonné prêtre, Fulton sinscrit à la Catholic University of America, à Washington, où il obtiendra ses grades en théologie et en droit canonique. Plutôt que de poursuivre ses études sur place, il demande à faire son doctorat dans une université européenne, et son choix sarrête sur celle de Louvain (Belgique). Après le doctorat, en juillet 1925, Sheen obtient lagrégation en philosophie dans la même université. Il est alors nommé vicaire dans une paroisse pauvre de son diocèse dorigine (Peoria). Après les études quil vient de faire, beaucoup sont surpris par cette nomination qui semble humiliante pour un prêtre si brillant. Mais lui accepte de bon gré ce ministère ; il se lance tout entier dans le soin pastoral des âmes, devient en peu de temps lami de tous et obtient de nombreuses conversions. Au bout de huit mois, lévêque lui avoue : « Il y a trois ans, je vous avais promis à la Catholic University of America comme membre du corps professoral. Mais à cause de vos succès en Europe, je voulais savoir si vous demeureriez obéissant. Vous pouvez maintenant aller enseigner avec ma bénédiction. » Labbé Sheen restera à Washington plus de vingt ans, apprécié des étudiants : « Durant ses cours, dira lun deux, on naurait pas plus eu lidée de lever la main que de dire au soleil de sarrêter de briller un instant. Et on nen avait pas envie, tellement cétait un professeur captivant. » Le jeune prêtre considère lenseignement comme « lune des plus nobles vocations sur terre, car en dernière analyse, le but de toute éducation est la connaissance et lamour de la vérité ». Ses capacités intellectuelles ne lempêcheront pas de rester toute sa vie très proche des simples fidèles. Faisant preuve dune grande amabilité envers tous, il néblouit jamais par sa science ; il tâche plutôt dapprendre toujours quelque chose de son interlocuteur. Dans son enseignement, il se place dabord au niveau de ses étudiants pour les élever graduellement plus haut.
Ôter les masques
Son professorat à temps plein ne lempêche pas daccepter de nombreuses invitations à prêcher des retraites ou à donner des conférences. Il prépare ses interventions avec un grand soin, parlant toujours debout et sans notes ; il aime à dire quon nallume pas de feu quand on est assis. Sa présentation claire et précise des vérités de la foi catholique est parsemée de plaisanteries qui maintiennent lattention en éveil. Très vite, sa renommée sétend au loin. La vraie foi est, à ses yeux, ce qui manque le plus cruellement au monde. Aussi nhésite-t-il pas à rappeler avec assurance les grandes vérités de lÉvangile, dont la méditation suscite la conversion des âmes : la mort, le jugement, le ciel et aussi lenfer. Pour lui, lhomme moderne veut limpossible : une religion sans croix, un Christ sans calvaire, un royaume sans justice, et, dans son église, « un curé qui ne parle jamais de lenfer ». Mais telle nest pas la foi de lÉglise. En effet, lors du jugement, rappelle-t-il, « chaque homme devra apprendre par lui-même que la porte est étroite et le chemin resserré qui mène à la Vie éternelle, et que peu trouvent cette porte
Là, tous les masques seront ôtés ; lhomme quittera le rang, loin de la foule, et la seule voix quil entendra sera la voix de sa conscience, qui le révélera tel quil est en réalité
Il ny aura pas de stupéfiants pour laider à oublier ou pour le faire entrer dans lirresponsabilité du sommeil ; pas de cocktails pour le rendre sourd à sa conscience ». Un demi-siècle plus tard, saint Jean-Paul II écrira de même : « LÉglise ne peut omettre, sans une grave mutilation de son message essentiel, une catéchèse constante sur ce que le langage chrétien traditionnel désigne comme les quatre fins dernières de lhomme : la mort, le jugement (particulier et universel), lenfer et le paradis
Cest seulement dans cette vision eschatologique que lon peut avoir la mesure exacte du péché et se sentir poussé de façon décisive à la pénitence et à la réconciliation » (Exhortation Reconciliatio et Pnitentia, 2 décembre 1984, n° 26).
À partir de 1928, la voix de labbé Sheen est retransmise régulièrement sur les ondes dans le programme Catholic Hour. Pendant plus de 20 ans, il sefforce de présenter aux auditeurs, en termes simples, le contenu de la foi catholique quil défend contre les attaques modernes. Ces émissions lui occasionnent un courrier abondant ; beaucoup de correspondants envoient de largent, quil redistribue largement aux nécessiteux : « Dieu remplace en temps, en énergie ou en argent tout ce qui est donné », répond-il à ceux qui se plaignent de ses largesses. Sa notoriété le fait nommer, en 1934, chambellan papal avec le titre de Monsignor. En 1951, cest la télévision qui linvite à prêcher lÉvangile dans la série démissions Life is Worth Living (La vie vaut la peine dêtre vécue). Cet apostolat se poursuivra sept ans.
Figure de proue
Au long de ces décennies, Mgr Sheen demeure une figure de proue de la lutte contre le communisme. Plutôt que de rendre les seuls révolutionnaires russes responsables du succès de cette idéologie, il nhésite pas à lattribuer à un Occident sécularisé qui a perdu la foi, source de sa grandeur : « Au fur et à mesure que lOccident perd son christianisme, il perd sa supériorité. Lidéologie du communisme a surgi des restes sécularisés dune civilisation occidentale dont lâme était jadis chrétienne. » Dailleurs, la décadence morale de lOccident lui fait prévoir son effondrement certain sil nopère pas une sérieuse réforme. Citant lhistorien Arnold Toynbee, Sheen souligne que « seize civilisations, parmi les dix-neuf qui se sont effondrées depuis le début de lhistoire, se sont décomposées de lintérieur. »
La rédaction de ses livres ainsi que la soigneuse préparation de ses prédications, conférences et émissions télévisées, lui prennent un temps considérable ; malgré cela, il trouve le moyen de visiter les pauvres, les malades et les missions lointaines dans le tiers-monde, de répondre personnellement à des dizaines de milliers de lettres et dinstruire de très nombreuses personnes qui viennent ou reviennent à la foi. Il insiste sur le fait que la grâce de Dieu cherche une âme qui lui soit ouverte. Il aime à répéter que « le loquet se trouve de notre côté », car « Dieu ne défonce pas les portes : cest nous qui lui barrons lentrée ». Le phénomène moderne de lathéisme est lobjet de ses réflexions : « Neuf fois sur dix, lathéisme naît du sein dune mauvaise conscience, affirme-t-il. Lincroyance naît du péché, non de la raison. » Et il conseille volontiers à ceux qui se trouvent dans cette situation : « Si vous voulez connaître Dieu, il ny a quun moyen : mettez-vous à genoux
Si vous nadorez pas Dieu, vous adorerez autre chose, et neuf fois sur dix, ce sera vous-même. » Il est impossible de compter le nombre de personnes qui se sont converties grâce à cet apôtre infatigable : « Je ne tiens jamais de registre des convertis, avoue-t-il, de peur de tomber dans lerreur de penser que cest moi qui les ai gagnés au Christ. Le Bon Dieu ne men donnerait pas dautres. Il me punirait de mon orgueil
» Un homme qui se promène sous des pommiers aux fruits mûrs les cueille sans peine : de même, reconnaît-il, toute conversion est dabord un don de Dieu, accordé à la prière, sans laquelle rien de bon ne peut se faire dans lordre de la grâce.
Où sont tes dieux ?
Dans les guerres quil a connues au cours de sa vie, Fulton voit le résultat dune multitude de péchés. La violation de la loi morale entraîne, en effet, par elle-même de graves conséquences : cest le péché qui amène le malheur. Face à ceux qui pointent le doigt vers Dieu pour Le rendre responsable du mal, il écrit : « De tels hommes pensent à Dieu uniquement lorsquils cherchent un bouc émissaire pour leurs propres péchés. Sans jamais le dire, ils présument que lhomme est lauteur de tout ce qui est bien et beau dans le monde, mais que Dieu est responsable du mal et des guerres
Ils ignorent que Dieu ressemble à un écrivain qui aurait composé une pièce de théâtre. Il la donnée aux hommes avec toutes les indications pour la jouer à la perfection, mais ils lont bâclée. » Face aux incroyants qui demandent, quand tout va mal : « Où est Dieu ? », il réplique : « Où sont tes dieux maintenant ? Où est ton dieu Progrès face à ces deux guerres mondiales en lespace de vingt et un ans ? Où est ton dieu Science, à lheure où lon consacre ses énergies à la destruction ? Où est ton dieu Évolution, maintenant que le monde régresse et devient un immense abattoir ? »
Après avoir reçu la consécration épiscopale à Rome, le 11 juin 1951, Mgr Fulton Sheen est nommé évêque auxiliaire de New York. Il remplira ce ministère durant une quinzaine dannées tout en assurant la direction de la Society for the Propagation of the Faith, organisme chargé de coordonner laide aux missions de tous les diocèses américains, en lien avec le Saint-Siège. Dans ce rôle, il recueillera des sommes considérables pour les missions. Mais sa célébrité, dune part, et largent qui passe entre ses mains, dautre part, lui attirent jalousies et critiques. Une querelle avec un haut dignitaire ecclésiastique à propos dun don gouvernemental en faveur des missions demeurera pour lui, pendant dix ans, une épine douloureuse. Paradoxalement, cette contradiction le fera progresser dans la nuit de la foi et découvrir la joie mystérieuse de souffrir avec le Sauveur : « Sil ny a pas un Vendredi Saint dans notre vie, il ny aura jamais de Dimanche de Pâques, écrit-il
Le fait de mourir à soi est le prélude essentiel à la vraie vie pour soi. » Lors dun voyage en Terre Sainte et en dautres lieux liés à lhistoire biblique, Mgr Sheen sarrête à Éphèse, ville évangélisée par saint Paul, qui faillit y perdre la vie (cf. Actes 19). « Éphèse, dit le prélat, ma appris que le fait de prêcher la Parole provoquera toujours lantagonisme. Que ce soit contre le communisme ou contre lavarice, que ce soit contre le divorce ou lavortement, le prédicateur sera non seulement harcelé, mais aussi en butte à une révolte organisée. »
Mgr Sheen prend part à toutes les sessions du concile Vatican II : à plusieurs reprises, il intervient dans laula conciliaire. En 1966, il est nommé évêque de Rochester, charge quil remplira pendant trois années. En 1969, il prend officiellement sa retraite et reçoit à cette occasion le titre honorifique darchevêque. Toutefois son activité ne diminue pas : prédications et conférences devant les auditoires les plus variés le conduisent à parcourir les États-Unis et lEurope. Il trouve même la force dentreprendre une nouvelle série télévisée intitulée What Now, America ? (Que faire maintenant, Amérique ?). Il veut mourir à la tâche ! Les années qui suivent le concile sont marquées par de grandes souffrances : tout en se réjouissant de certaines réformes, il est profondément affligé par le désordre qui semble régner dans lÉglise : « Nous nous sommes éloignés de létendard du Christ pour aller vers celui du monde. Nous ne nous demandons pas, cela plaît-il au Christ ? mais cela plaît-il au monde ? Dans cette optique, je mhabillerai, pense-t-on, et jagirai de manière à ne pas me séparer du monde ; je veux être avec lui. Nous nous marions avec ce monde, et nous devenons veufs du monde à venir. Nous adoptons son verbiage, ses modes. Voilà une des raisons de tant dinstabilité dans lÉglise daujourdhui : le sable sur lequel nous marchons est mouvant. Nous avons abandonné le roc qui est le Christ. »
Un judas
En 1976, larchevêque émérite se rend à Rochester pour la dédicace des Sheen Archives, collection de ses écrits et enregistrements installée au séminaire diocésain. À cette occasion, il fait une confidence à ceux qui simaginent y trouver son secret : lors de ses voyages à Paris, il aime à visiter un ancien couvent de Carmes, transformé aujourdhui en foyer pour étudiants. Dans ce bâtiment, « il y a une chambre que je visite toujours, dit-il. Cest au bout dun corridor
Au-dessus du bureau il y a un judas. Cétait la chambre du grand prédicateur Lacordaire : lorsquil était assis à ce bureau, il pouvait regarder à travers le judas. Et que voyait-il ? Il voyait le tabernacle, il voyait le Très Saint Sacrement ! Voilà ce qui a fait la grandeur de Lacordaire. Il ny a pas dexplication complète de Fulton J. Sheen dans ces livres, dans ces bandes. Vous devez chercher un secret venant dailleurs, là où la science est convertie en sagesse, cest-à-dire uniquement aux pieds du Christ et de son Saint-Sacrement. Par conséquent, que tous ceux qui entrent dans cette salle se souviennent de ce judas. Regardez à travers lui, et vous aurez alors lexplication de Fulton John Sheen ! »
À partir de 1977, sa santé commence à décliner. On lopère à cur ouvert, ce qui na encore jamais été tenté sur un homme de son âge. Dès que possible, un prêtre vient célébrer la Messe au pied de son lit. Larchevêque souffrant arrive à prononcer tout bas les paroles de la consécration, et, haletant, il donne une explication de la Messe à une des assistantes qui nest pas catholique. Jusque dans cette extrémité, il prend au sérieux le mot de lApôtre saint Paul : Malheur à moi si je ne prêche pas lÉvangile (cf. 1 Co 9, 16). Un soir, alors quil est en soins intensifs et à peine conscient, il entend une infirmière parler dun autre patient qui se meurt dans un lit voisin. Incapable de lever la main, Sheen lève le doigt et trace le signe de la croix vers le moribond, lui donnant ainsi labsolution sous condition au seuil de léternité.
Sur le dos
En septembre 1978, il retourne à lhôpital pour quatre mois. Il écrit à un cousin : « Je ne me plains pas de ma condition : je crois fermement que le Seigneur nous met souvent couchés sur le dos pour que nous regardions constamment vers le ciel. » Pendant ce séjour, il console et ramène à la foi un homme âgé, éloigné de lÉglise depuis 45 ans et tenté de se suicider. Après plusieurs heures de conversation, Mgr Sheen le confesse, le réconcilie avec lÉglise et lui donne la sainte Eucharistie. Cet événement est une immense consolation pour le vieil archevêque qui y voit un fruit de ses propres souffrances volontairement acceptées : « Javais demandé au Seigneur de permettre que mes souffrances fassent du bien à une âme, et Il a exaucé ma prière. »
Inlassable, il reprend ensuite ses activités. En janvier 1979, il est invité au National Prayer Breakfast à Washington, en présence de Jimmy Carter, alors président des États-Unis. Le vénérable prélat commence ainsi son discours : « Monsieur le président, vous êtes un pécheur. » Après un moment de silence, il continue : « Je suis un pécheur. » Puis, promenant son regard sur les célébrités présentes : « Nous sommes tous pécheurs, et nous avons tous besoin de nous tourner vers Dieu. » Billy Graham, protestant évangélique, affirmera que ce fut lun des sermons les plus éloquents et les plus stimulants quil ait jamais entendus.
Le Vendredi Saint suivant, très affaibli par ses grandes souffrances, Mgr Sheen monte pour la dernière fois dans la chaire de léglise Sainte-Agnès de New York, bien déterminé à faire une homélie, dût-elle lui coûter la vie. Il a toujours estimé que la chaire serait un bon endroit pour mourir. Pourtant les mois passent
Enfin, le 9 décembre 1979, Fulton Sheen obtient la grâce quil a souvent demandée : mourir devant le Saint-Sacrement. Peu de temps auparavant, il avait avoué son désir de partir : « Ce nest pas que je naime pas la vie ; je laime en effet. Mais je veux voir le Seigneur. Jai passé des heures devant Lui présent dans le Saint-Sacrement. Je Lui ai parlé dans la prière, et jai parlé de Lui à tous ceux qui voulaient mentendre, et maintenant je veux Le voir face à face ! »
La cause de béatification de Mgr Fulton Scheen, ouverte en 2002, a abouti en 2012 à la déclaration de lhéroïcité de ses vertus ; il porte donc désormais le titre de Vénérable.
Tout en priant pour sa béatification, demandons-lui de partager avec nous son amour intense pour Jésus-Eucharistie et sa sollicitude pour la destinée éternelle des âmes.