7 octobre 2007
Edward Maxim Crawley-Boevey
Bien chers Amis de l’abbaye Saint-Joseph,
Le 24 août 1907, un jeune prêtre malade et épuisé entre dans la chapelle des Apparitions de Paray-le-Monial. «Là, j’ai prié, et soudain j’ai ressenti en moi-même un choc étrange. J’étais frappé par un coup de la grâce, en même temps très fort et infiniment doux. Lorsque je me suis levé, j’étais complètement guéri. Alors, à genoux dans le sanctuaire, absorbé dans l’action de grâces, j’ai compris ce que Notre-Seigneur voulait de moi. Le soir même, j’ai conçu le plan de conquérir le monde pour le gagner à l’amour du Coeur de Jésus, et cela maison par maison, famille par famille». Ce prêtre s’appelait le Père Mateo Crawley.
Edward Maxim Crawley-Boevey, le futur Père Mateo, est né le 18 novembre 1875 à Arequipa, au Pérou, d’un père anglais protestant et d’une mère espagnole très pieuse: chaque jour, celle-ci assiste à la Messe et y communie; le soir, elle fait réciter le chapelet en famille. Alors qu’Edward n’a que 18 mois, ses parents se rendent en Angleterre et, craignant qu’il ne supporte pas le voyage, le laissent entre les mains de ses grands-parents maternels. Ils ne reviendront au Pérou que sept ans plus tard, avec les deux aînés et trois autres enfants nés en Angleterre. Edward, qui a grandi comme un fils unique dans un milieu très catholique de langue espagnole, se trouve soudain avec cinq frères et soeurs dont les plus âgés ont reçu une éducation anglaise. Vers la fin de 1884, M. Crawley décide d’aller habiter à Valparaiso au Chili. Le jeune Edward quitte ainsi son pays natal, où il ne retournera que rarement. De sa tendre jeunesse, il gardera le souvenir d’une famille remplie de la chaleur du Christ, malgré l’attitude d’un père défiant à l’égard de la religion catholique. Peu à peu, germera chez Edward la résolution d’ouvrir les familles au Règne de Jésus-Christ.
Edward manifeste un zèle précoce pour le salut des âmes. Jeune garçon, il aime «dire la Messe» et faire un sermon à ses soeurs. Il excelle dans l’art de parler de la religion, à tel point qu’il est engagé comme prédicateur des Mois de Marie et du Sacré-Coeur dans une famille voisine. Ses paroles touchent le père de cette famille qui, mourant, demande à devenir catholique. Comme aucun prêtre n’est accessible, Edward a la joie de baptiser cet homme sur son lit de mort. Cette conversion émeut beaucoup son propre père qui, plus tard, se convertira et deviendra un catholique pratiquant et fervent.
En 1885, le garçon est placé dans le collège des Pères de la Congrégation des Saints Coeurs de Jésus et de Marie, connus aussi sous le nom de «Picpussiens». Cette Congrégation a été fondée en France, en pleine Terreur révolutionnaire, par le Père Pierre Coudrin et la Mère Henriette Aymer de la Chevalerie dans le but de faire réparation à Notre-Seigneur en imitant sa vie et en adorant le Saint-Sacrement, source de l’élan missionnaire des Religieux. Le désir du sacerdoce croît chez Edward qui veut se dévouer pour les âmes. Or, le 4 octobre de cette année, après avoir complimenté sa mère, lors d’une fête de famille, il lui présente un papier sur lequel il a écrit: «Comme cadeau de fête, je promets de laisser Edward entrer en religion à l’âge de 15 ans». – «Vous signerez, n’est-ce pas, Maman?», demande Edward. Les larmes aux yeux, Mme Crawley lit le papier et le signe. Obtenir le consentement de son père est plus difficile, mais ce dernier, après avoir demandé l’avis de ses maîtres d’école, dit à son fils: «Tu vas nous quitter pour te faire religieux. C’est volontairement que je te permets de partir, mais à une condition: si tu désires devenir prêtre, mon désir est que tu sois un saint prêtre».
Garder la mesure
Le 2 février 1891 à Santiago, Edward reçoit l’habit religieux et le nom de Frère Joseph Stanislas. Le noviciat se déroule dans une ancienne «hacienda» (exploitation agricole) perdue au milieu d’une immense solitude à Los Perales. Pendant les quatre premiers mois, le novice souffre profondément de cette vie à laquelle il n’est pas habitué. Après s’être adonné à des austérités au-dessus de ses forces, il finit par comprendre qu’il lui faut modérer son zèle et garder la mesure dans les mortifications. Le 11 septembre 1892, Frère Stanislas est admis à prononcer ses voeux de religion. Peu de temps après, pour éviter toute confusion avec un Père qui porte le même prénom, il prend celui de Frère Mateo (Matthieu). Pendant ses années d’études, il est appelé à servir de secrétaire au Père provincial. Un jour, Frère Mateo découvre dans les archives un tableau de Notre-Seigneur qui porte dans sa main gauche un globe terrestre; des rayons partent de son Sacré-Coeur vers l’Équateur. C’est devant ce tableau réalisé à la demande de García Moreno, alors Président, que ce pays avait été consacré au Sacré-Coeur de Jésus. Ce tableau tiendra une place importante dans l’apostolat du Frère Mateo. Le 17 décembre 1898, il reçoit l’ordination sacerdotale dans la cathédrale de Santiago, ayant eu peu auparavant la douleur de perdre son père.
Lors de sa première mission dans la ville de Valparaiso, le Père Mateo est ému par le dénuement spirituel du peuple. Il ouvre donc un centre social où les jeunes gens, après leur sortie du collège, peuvent parfaire leur formation chrétienne et civique, et devenir le levain d’une société spirituellement régénérée. À cette époque, beaucoup préconisent des moyens politiques pour remédier aux problèmes de la société. Le Père Mateo comprend que le mal qui ronge la société est le laïcisme, «c’est-à-dire l’exclusion absolue et totale de Dieu et de la loi morale naturelle de tous les domaines de la vie humaine» (Jean-Paul II, 23 février 2002). «Ainsi, le laïcisme est diamétralement opposé au Règne du Christ, lequel est la source non seulement du bonheur du croyant, mais de l’harmonie de la vie publique elle-même» (Benoît XVI, Discours inaugural du CELAM, 13 mai 2007). Le Père Mateo se propose de combattre ce mal par l’établissement d’une École de Droit où les principes de la loi morale et de la conscience chrétienne seront les fondements de la formation.
«Qu’est-ce que le réel ?»
La priorité donnée à la foi au Christ, que le Père Mateo veut établir dans son nouvel institut, est-elle un abandon de la réalité urgente des grands problèmes économiques, sociaux et politiques? N’est-ce pas là une fuite en dehors de cette réalité? À cette objection, nous répondons par ces paroles du Pape Benoît XVI: «Qu’est-ce que le réel? La «réalité» n’est-elle constituée que des biens matériels, des problèmes sociaux, économiques et politiques? C’est là, précisément, la grande erreur des tendances dominantes du siècle dernier, une erreur destructrice, comme le démontrent les résultats des systèmes marxistes aussi bien que capitalistes. Ils falsifient le concept de réalité en l’amputant de la réalité fondamentale, et donc décisive, qu’est Dieu. Qui exclut Dieu de son horizon falsifie le concept de «réalité» et, par conséquent, ne peut qu’aboutir à des chemins erronés et des recettes destructrices. La première affirmation fondamentale est donc la suivante: seul celui qui reconnaît Dieu connaît la réalité et peut y répondre de manière adéquate et réellement humaine. La véracité de cette thèse apparaît évidente face à l’échec de tous les systèmes qui mettent Dieu entre parenthèses. Mais surgit aussitôt une autre question: Qui connaît Dieu? Comment pouvons-nous le connaître?… Pour le Chrétien, le coeur de la réponse est simple: seul Dieu connaît Dieu, seul son Fils qui est Dieu né de Dieu, vrai Dieu, le connaît. Et lui, qui est dans le sein du Père, nous l’a dévoilé (Jn 1, 18). D’où l’importance unique et irremplaçable du Christ pour nous, pour l’humanité. Si nous ne connaissons pas Dieu dans et par le Christ, toute la réalité se transforme en énigme indéchiffrable; il n’y a pas de chemin, et, s’il n’y a pas de chemin, il n’y a ni vie ni vérité. Dieu est la réalité fondamentale, il n’est pas un Dieu seulement pensé ou hypothétique, mais le Dieu à visage humain; il est le Dieu-avec-nous, le Dieu de l’amour jusqu’à la croix. Lorsque le disciple parvient à la compréhension de cet amour du Christ jusqu’à l’extrême, il ne peut que répondre à cet amour par un amour semblable: Je te suivrai partout où tu iras (Lc 9, 57)» (ibid.).
En 1906, un violent tremblement de terre réduit la ville de Valparaiso en ruines. Le Père Mateo se dévoue jour et nuit auprès des innombrables indigents qui ont perdu leur domicile. Sa santé ne supporte pas le choc: il est tellement épuisé que les médecins lui interdisent tout travail pendant un an. Son supérieur décide alors de l’envoyer en Europe, voyage qui marque un tournant dans sa vie. En effet, en juin 1907, il a la grâce d’être reçu en audience privée par le Pape saint Pie X. Aux pieds du Saint-Père, il lui expose le projet qui lui tient à coeur et demande la permission de conquérir le monde au Sacré-Coeur par la consécration des familles. Après l’avoir écouté, le saint Pape répond: «Non, mon fils. Je ne vous le permets pas, je vous en donne l’ordre: vous consacrerez votre vie à cette oeuvre de salut».
L’intronisation du Sacré-Coeur
Il retourne au Chili et, en octobre 1908, procède à l’«intronisation du Sacré-Coeur» dans la maison d’une bienfaitrice insigne, à l’aide du tableau de García Moreno. Selon le Père Mateo, l’intronisation du Sacré-Coeur, cérémonie par laquelle on installe, en présence du prêtre, une image du Sacré-Coeur pour présider à la vie de famille, implique non seulement la dévotion au Sacré-Coeur qui mène à la transformation de toute la vie en famille, grâce à la prière en commun, mais aussi la visite d’autres familles, pour les conquérir elles aussi au Christ. Les années suivantes verront la propagation de l’oeuvre par l’établissement de secrétariats dans divers pays. En 1911, on estimait déjà à 120 000 le nombre des familles où le Sacré-Coeur avait été intronisé. Ces familles se distinguent par un puissant esprit de foi et de prière, ainsi que par leur zèle pour l’apostolat.
L’un des fruits de cette dévotion est la conversion de l’amiral Latorre, héros national du Chili après une victoire navale remportée sur le Pérou. Le Père Mateo sympathise avec cet homme indifférent à la religion. Un jour, il se présente chez lui: «Amiral, je suis venu aujourd’hui pour vous donner l’absolution. – C’est donc une déclaration de guerre au nom du Ciel», répond l’amiral en riant. «Oui, Amiral, au nom du Ciel», répond le Père. Puis, se tournant vers l’image du Sacré-Coeur, il continue: «Regardez cette image intronisée dans votre maison. Il est votre Roi et le mien, le Législateur suprême des puissants et des faibles, des amiraux et des marins. Il est le Roi de votre femme; tous ceux qui habitent cette maison l’adorent à genoux, ils vivent leur foi, ils respectent ses lois; tous, sauf vous. Au nom du Sacré-Coeur qui vous aime et qui m’a envoyé ici pour vous offrir sa miséricorde, rendez-vous à son Coeur». Latorre, qui ne rit plus, demande un temps de réflexion. Le Père reprend: «Et si la mort venait cette nuit, lui direz-vous de revenir parce que vous avez besoin de temps pour réfléchir? Or à l’instant présent, ce n’est pas la mort qui frappe, mais la Vie, c’est Jésus Lui-même». À genoux, l’amiral confesse les péchés de sa vie. Un an après, le Père Mateo l’aidera à faire une bonne mort.
En 1914, le Père Mateo se trouve de nouveau en Europe où il prêche et établit des secrétariats. L’oeuvre se développe, les difficultés aussi; certains évêques font des objections contre l’expression «intronisation» jugée contraire aux usages de l’Église et dépourvue de l’autorisation nécessaire. Le 6 avril 1915, le Père Mateo est reçu en audience par le Pape Benoît XV. Celui-ci, le 27 avril suivant, lui adresse une lettre d’approbation où il définit l’intronisation: «L’installation de l’image du Sacré-Coeur, comme sur un trône, dans l’endroit le plus noble de la maison, de telle sorte que Jésus-Christ Notre-Seigneur règne visiblement dans les foyers catholiques». L’essentiel de cette intronisation ne se réduit pas à une consécration passagère, une fête de famille sans lendemain; il s’agit de placer réellement Jésus sur un trône au sein de la famille, afin qu’Il y demeure comme son Roi, et que la famille s’unisse chaque jour autour de son trône pour Lui offrir son adoration et son amour.
La famille sous la lumière de la foi
L’intronisation est donc une spiritualité conjugale et familiale fondée sur le sacrement de mariage considéré à la lumière du Sacré-Coeur. Une telle dévotion est particulièrement nécessaire à notre époque, en raison des menaces de plus en plus nombreuses contre la famille. Le Pape Jean-Paul II proclamait, le 19 février 1981: «Parce que le Créateur veut que la vie prenne son origine dans l’amour d’un homme et d’une femme unis dans une alliance de partage dans le mariage, et parce que le Christ a élevé cette union des époux à la dignité d’un sacrement, nous devons regarder la famille, sa nature et sa mission, à la lumière éclatante de notre foi chrétienne… L’Église catholique a toujours enseigné que le mariage a été fondé par Dieu; que le mariage est un pacte d’amour entre un seul homme et une seule femme; que le lien unissant mari et femme est, par la volonté de Dieu, indissoluble; que le mariage entre Chrétiens est un sacrement qui symbolise l’union du Christ et de son Église; que le mariage doit être ouvert à la transmission de la vie humaine… Je dois à ma charge apostolique de réaffirmer aussi clairement et fortement que possible ce que l’Église du Christ enseigne à ce sujet, et de réitérer vigoureusement sa condamnation de la contraception et de l’avortement».
Dans sa lettre au Père Mateo, le Pape Benoît XV faisait état de trois plaies qui détruisent la famille: «Le divorce qui ébranle sa stabilité, le monopole de l’enseignement qui élimine l’autorité des parents, la recherche du plaisir qui souvent s’oppose à l’observance de la loi naturelle». L’intronisation apporte à ces maux le double remède d’une foi rayonnante et d’un amour effectif. Cette intronisation, écrit encore Benoît XV, «propage avant tout l’esprit chrétien en établissant dans chaque foyer le règne et l’amour de Jésus-Christ. En faisant cela, vous ne faites qu’obéir à Notre-Seigneur Lui-même, qui a promis de faire pleuvoir ses bénédictions sur les maisons où l’image de son Sacré-Coeur serait exposée et honorée avec dévotion. Et puisque suivre le Christ ne consiste pas dans le fait d’être mû par un sentiment religieux superficiel qui émeut les coeurs faibles et tendres mais laisse le vice intact, il est nécessaire de connaître le Christ, sa doctrine, sa vie, sa passion, sa gloire. Suivre le Christ, c’est être imbu d’une foi vivante et ferme qui agit non seulement sur l’esprit et le coeur, mais aussi gouverne et dirige notre conduite… Rien n’est plus adapté aux besoins de notre temps» (ibid.). Benoît XVI fait écho à son prédécesseur: «La famille a été et demeure une école de la foi, palestre de valeurs humaines et civiles, foyer où la vie humaine prend naissance et est accueillie avec générosité et de manière responsable. Cependant, elle souffre actuellement des situations difficiles provoquées par le sécularisme et le relativisme éthique, par les divers flux de migrations, intérieurs et extérieurs, par la pauvreté, par l’instabilité sociale et par les législations civiles contraires au mariage, qui, en favorisant la contraception et l’avortement, menacent l’avenir des peuples» (13 mai 2007).
Un mal encore plus grand
Le Père Mateo, durant une tournée de prédication en France, fait allusion aux ravages provoqués par la guerre, et ajoute: «N’oubliez jamais que la ruine des familles chrétiennes est un mal encore plus grand. La famille est le temple des temples. La famille est la source de la vie. Si la source de la vie nationale est empoisonnée, la nation périra. Nous nous efforçons d’imprégner les familles de la loi de Dieu et de l’amour du Sacré-Coeur de Jésus. Si Jésus-Christ est à la racine, l’arbre tout entier sera Jésus-Christ».
Approuvée par l’Église, confirmée par le prodige de son essor rapide, l’oeuvre de l’intronisation est également marquée par la croix. Sans cesse sur la brèche, le Père Crawley doit prêcher dans plusieurs pays en différentes langues; outre la fatigue liée aux multiples voyages et aux changements de régime, il est atteint par la goutte, maladie qui ne le quittera plus. En Italie, les secrétariats de l’oeuvre sont confiés à un autre organisme: l’Apostolat de la Prière; d’aucuns élèvent des objections contre l’intronisation, et le Père est obligé de demander une nouvelle intervention de Benoît XV. En France, où la guerre n’est pas encore achevée, le Père Mateo est dénoncé comme un agitateur: le gouvernement lui retire son passeport et l’empêche de quitter le pays. Le passeport ne lui sera rendu qu’en mars 1919.
En 1923, lors d’un tour de prédication en Angleterre, le Père Mateo encourage ainsi les instituteurs catholiques: «Notre-Seigneur vous a confié ses plus précieux trésors; ne soyez pas seulement instituteurs, mais apôtres, semeurs de vie et d’amour. Beaucoup de catholiques s’imaginent que l’apostolat est le monopole des prêtres. Ils disent: «Que puis-je faire, moi, ce n’est pas mon travail!» Mais vous ne pouvez pas dire cela. Ce n’est pas assez pour vous d’être des catholiques fervents; pour vous l’apostolat est un devoir, non un luxe. C’est votre devoir de sauver les âmes des autres, et pour le faire, vous devez être plus que des instituteurs. Vous devez aider Notre-Seigneur à pêcher des âmes pour l’éternité. Les ennemis du Christ se battent avec énergie et se sacrifient de toute manière pour empêcher les âmes d’aller au Ciel… Les ennemis de notre divin Roi ont souvent plus de zèle que ses amis».
Durant ces années, le Père écrit un livre sur les trois outrages infligés à Notre-Seigneur par les sociétés modernes: la crise de l’autorité et les désordres qu’elle entraîne constituent un affront à l’autorité du Christ-Roi; l’immoralité, et en particulier l’impudicité dans l’habillement, outragent la sainteté du Christ; la crise des vocations sacerdotales et religieuses diminue l’honneur dû au Christ. En Belgique, s’adressant à une foule de femmes et jeunes filles, le Père Mateo affirme: «Il n’y a pas de christianisme sans la chasteté. Il n’y a pas de chasteté sans modestie».
Le 25 janvier 1935, il s’embarque pour l’Extrême-Orient. Lors de cette tournée, il apprend le décès de sa mère. Sur son image mortuaire, il inscrit ces mots qu’elle lui avait écrits: «Comme je voudrais te voir avant de mourir! Mais je fais volontiers le sacrifice de ce désir afin d’être, avec toi, apôtre du Coeur de Jésus. Oui, prêche, prêche toujours, et les larmes de ta mère arroseront la graine semée par son prêtre». Le Père parcourt l’Orient, multipliant conférences et retraites, invitant prêtres, religieux et fidèles à revenir à la source de la vie chrétienne: l’amour du Coeur du Christ. Aux prêtres en particulier, appelés à devenir apôtres du Sacré-Coeur, son mot d’ordre est: «Qualis Missa, talis Sacerdos», un prêtre vaut ce que vaut sa Messe. Dans le même sens, le Pape Jean-Paul II disait: «Un prêtre vaut ce que vaut sa vie eucharistique, sa Messe surtout. Messe sans amour, prêtre stérile; Messe fervente, prêtre conquérant d’âmes. Dévotion eucharistique négligée et sans amour, prêtre en danger de se perdre» (16 février 1984).
«Mourir avant de mourir»
Les dernières années de la vie du Père Mateo sont un calvaire. Atteint par la maladie, il s’en remet totalement au Seigneur. «Il est sage de mourir avant de mourir, écrit-il. Voilà une pénitence dont j’avais besoin. Il m’est bon d’avoir été affligé (Ps. 118)». Il avait dit: «Lorsque je ne pourrai plus prêcher, j’écrirai; lorsque je ne pourrai plus écrire, je prierai; lorsque je ne pourrai plus prier, je pourrai toujours aimer en souffrant et souffrir en aimant». En février 1956, le Père Mateo regagne Valparaiso au Chili, berceau de sa vie religieuse. Atteint d’une leucémie, il doit consentir à l’amputation d’une jambe gangrenée. Le matin du 4 mai 1960, l’artère de la jambe amputée se rompt; emporté par l’hémorragie, le Père Mateo s’endort paisiblement après avoir reçu l’Extrême-Onction.
Dans les Litanies du Sacré-Coeur, l’Église invoque Jésus comme «Roi et Centre de tous les coeurs». Supplions-Le, à l’exemple du Père Mateo, d’accorder à toutes les familles de rester unies par la prière, la réception des sacrements, et le support mutuel. Ainsi, le monde entier, soumis enfin à son joug si doux, connaîtra un temps de paix, favorable au salut des âmes.
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