17 novembre 2007
Bienheureux Luigi et Maria Beltrame Quattrocchi
Bien chers Amis de l’abbaye Saint-Joseph,
«Le chemin de sainteté accompli ensemble, comme couple, est possible, beau, extraordinairement fécond; il est fondamental pour le bien de la famille, de l’Église et de la société». Jean-Paul II a prononcé ces paroles lors de la béatification des époux Luigi et Maria Beltrame Quattrocchi, le 21 octobre 2001.
Fille unique de deux Florentins, Maria Luisa Corsini est née le 24 juin 1884 à Florence. Son père, un officier, est irascible, et sa mère possède un caractère vif et dominateur. Dès son plus jeune âge, Maria Luisa, enfant au tempérament timide et sensible, prend l’habitude en mettant la table, de déposer une petite feuille d’olivier sous la serviette de ses parents, pour manifester son désir de paix. Un jour, elle affirme à son père: «Tu vois, papa, je ne t’aurais pas épousé comme l’a fait maman, avec ton mauvais caractère!» Toutefois, les époux Corsini aiment beaucoup leur fille. La famille s’installe à Rome en 1893. Maria Luisa y suit les cours d’une école de commerce où elle apprend la comptabilité ainsi que les langues française et anglaise. Ses goûts personnels la portent vers les lettres: elle acquiert une vaste culture littéraire. Développant aussi un talent pour la musique, Maria joue du piano.
Luigi Beltrame vient au monde le 12 janvier 1880, à Catane en Sicile, troisième enfant de ses parents. Il ajoutera au nom de son père celui de son oncle Quattrocchi qui, ne pouvant avoir d’enfants, l’adoptera. En 1891, il s’installe à Rome avec son oncle et sa tante. Après des études de droit, Luigi commence une carrière d’avocat. Il fréquente volontiers les grands classiques de la littérature, aime la musique, le théâtre, la beauté de la nature et les voyages. L’amitié entre les familles Corsini et Quattrocchi fournit le cadre de la rencontre de Maria et de Luigi. À la fin de l’année 1904, Luigi tombe gravement malade; Maria, très affectée, en ressent une grande souffrance et lui envoie une image de la Madone de Pompéi. Cet épisode révèle aux deux jeunes amis la profondeur de leur amour mutuel. Le 25 novembre 1905, ils se marient à la basilique Sainte-Marie-Majeure de Rome, puis s’installent dans la maison familiale des Corsini où ils sont à l’étroit du fait de la présence des parents et grands-parents de Maria. Luigi, cependant, fait preuve d’une grande déférence envers ses beaux-parents. Chaque soir, les époux se retrouvent avec joie et se détendent en famille. Chacun s’intéresse au travail de l’autre. Luigi doit souvent s’éloigner de Rome pour des raisons professionnelles. Les époux en souffrent mais s’écrivent alors beaucoup.
La première grossesse de Maria leur procure un bonheur indicible, bientôt contrarié par l’angoisse que ressent la future maman dans la perspective de l’accouchement; mais la joie est à son comble à la naissance de Filippo, le 15 octobre 1906. La jeune maman expérimente dans la maternité le nécessaire oubli de soi: «Certes, pour elle, habituée à se tenir au courant des nouveautés théâtrales, musicales, littéraires, ce ne devait pas être un moindre renoncement que de réduire à presque rien la lecture et à zéro les spectacles et les concerts…», écrira une de ses filles. En septembre 1907, Maria est à nouveau enceinte. Un sentiment de désarroi et de solitude l’envahit, d’autant plus que Luigi est en Sicile pour quelques jours. Elle lui écrit: «Qui me donnera la force de penser à deux enfants? de supporter la fatigue physique et physiologique de la grossesse et du reste? Crois bien que je suis vraiment désespérée». Peu à peu, grâce à la prière, la sérénité revient dans l’âme de Maria, avec l’acceptation de la volonté de Dieu. Le 9 mars 1908, naît une fille que l’on nomme Stefania.
Un «non» catégorique
Le 27 novembre 1909, un troisième enfant, Cesarino, voit le jour après un accouchement laborieux. En septembre 1913, Maria conçoit un nouvel enfant. À partir du quatrième mois, elle est prise de violentes hémorragies. Le diagnostic tombe: «Placenta prævia», ce qui équivaut, à l’époque, à une sentence de mort pour la mère et l’enfant. Le gynécologue, un professeur très renommé, déclare que seule une interruption de grossesse permettra peut-être de sauver la mère. Maria et Luigi sont atterrés; portant leurs regards sur le Crucifix accroché au mur, ils puisent en Lui la force pour opposer un non catégorique à l’avortement. Aucune raison, si «grave et dramatique qu’elle soit, ne peut jamais justifier la suppression délibérée d’un être humain innocent», rappellera le Pape Jean-Paul II (Encyclique Evangelium Vitæ, 25 mars 1995, n. 58). Interdit et désemparé, le professeur s’adresse à Luigi: «Vous ne vous rendez pas compte, Maître: vous vous préparez ainsi à rester veuf avec trois enfants à charge!» La réponse demeure inchangée: le «non» reste «non». Une angoisse terrible tombe sur la famille. La seule source de lumière vient d’une confiance illimitée en Dieu et en la Très Sainte Vierge Marie. La communion des deux époux, enracinée en Dieu, se fait plus forte que jamais. Quatre mois se passent ainsi; Maria garde le lit. Enfin, le 6 avril 1914, à la fin du huitième mois, devant l’état de faiblesse de la maman, le gynécologue intervient pour l’accouchement qui a lieu par les voies naturelles. Une petite Enrichetta vient au monde. Malgré les pronostics pessimistes, la mère et l’enfant sont sauvés.
«Apostolat de la plume»
Esprit très ouvert, Maria éprouve une soif de connaître qui ne diminuera pas avec le temps. Elle délègue beaucoup de tâches matérielles au personnel qui sert la famille, comme c’est alors l’usage dans les familles bourgeoises. Au fil des années, elle écrit des articles et des livres: c’est son «apostolat de la plume». Ses textes, auxquels travaille aussi son époux, s’adressent aux mères et aux familles. Maria s’engage aussi dans des oeuvres caritatives. En 1925, elle est appelée à collaborer à l’Action catholique féminine; mais les difficultés et incompréhensions ne lui sont pas épargnées et elle préfère se retirer. Chaque fois qu’ils le peuvent, Maria et Luigi participent aux activités de l’Union nationale italienne pour le transport des malades: ils accompagnent ceux-ci à Lorette ou à Lourdes. En politique, les époux Beltrame suivent, dans un premier temps, le fascisme afin de promouvoir les idéaux moraux, religieux, culturels et sociaux dont il se réclame. Peu à peu, cependant, ils se montrent plus circonspects vis-à-vis du régime et en arrivent à une désapprobation pure et simple à l’occasion des lois raciales. Ils se dépensent alors sans compter pour sauver des Juifs.
Luigi qui, en 1909, avait été reçu premier au concours national des avocats du Trésor public, exercera de grandes responsabilités dans différents ministères grâce à sa vaste culture juridique et administrative. En 1943, il sera pressenti par le président du Conseil des ministres pour devenir avocat général de l’État. «Personnalité éminente du barreau de l’État, dira un de ses amis, il aurait dû être le premier de tous à en assumer la charge suprême. Une campagne sournoise menée par des membres de ce même barreau, aux tendances laïques et anticléricales, lui fit barrage. Le serviteur de Dieu, pourtant profondément blessé en son for intérieur par l’injustice qu’il venait de subir, n’eut aucune réaction apparente». Luigi peut être considéré comme un exemple pour ceux qui paient par une marginalisation professionnelle, l’honnêteté et la cohérence d’une vie en accord avec la foi. En 1948, on lui offrira de présenter sa candidature pour un siège au Sénat. D’accord avec Maria, il décline cette offre, car il ne partage pas certaines orientations de ceux qui en sont les auteurs.
Luigi est un homme discret, doté par nature d’une certaine distinction et d’amabilité dans ses relations. Plus intéressé par l’apostolat actif que par les charges, il s’engage dans des activités paroissiales et nationales, notamment pour la formation des jeunes et en particulier des scouts; pour eux, il sacrifie des heures qu’il aurait pu donner à la détente et au repos. Les charges assumées dans la société lui valent de nombreux titres honorifiques et décorations, mais une fois reçus, il les range au fond d’un tiroir et n’en parle plus. Un de ses fils écrira de lui: «Il ne se surestimait pas par rapport aux autres, mais ne se dévaluait pas non plus systématiquement… Avec ceux qui étaient «loin de la foi», il faisait preuve d’un tact particulier qui attirait toujours leur amitié… Et ceux qui étaient «loin de la morale», il évitait de les importuner, à moins qu’ils ne missent eux-mêmes le sujet sur le tapis». Luigi écrit: «Nous ne devons pas cacher nos sentiments religieux, nous devons les professer publiquement, mais, avant tout et principalement, nous devons le faire par nos oeuvres. C’est par l’honnêteté et l’esprit chrétien qui imprègnent notre conduite dans les relations humaines, par le désintéressement, l’amour envers le prochain, la charité vécue et mise en pratique que nous faisons profession d’hommes aux convictions religieuses». Un ami de Luigi, incroyant et franc-maçon, ému devant la dépouille mortelle de celui-ci, avouera à l’un des fils du défunt: «Vois-tu, durant toutes ces années où nous avons travaillé ensemble, ton père ne m’a jamais cassé les pieds avec des sermons. Mais je veux te dire que c’est par sa vie que j’ai découvert Dieu et que j’ai aimé l’Évangile. Prie pour moi!»
Prier ne signifie pas fuir la réalité
L’engagement principal de Maria et de Luigi reste en faveur du soin de la famille. La prière y tient une grande place et Luigi en est l’âme: «Dès notre enfance…, écrit un de ses fils, nous étions frappés par l’attitude particulière (de grand recueillement) de papa durant les visites au Saint-Sacrement, à l’église… C’était toujours mon père qui, après le dîner, commençait et guidait la récitation du chapelet familial… D’après mes souvenirs, mon père et ma mère ont reçu chaque jour l’Eucharistie et ils nous ont transmis cette habitude… Je me souviens aussi avec émotion combien mon père aimait servir la Messe… en particulier celle des nombreux prêtres qui fréquentaient la maison». Pour un chrétien, remarquera le Pape Benoît XVI, « prier ne signifie pas fuir la réalité et les responsabilités qu’elle comporte, mais les assumer jusqu’au bout, en ayant confiance dans l’amour fidèle et inépuisable du Seigneur» (4 mars 2007). Aussi, Luigi se dépense-t-il sans compter auprès de sa femme pour alléger le plus possible les inévitables fatigues de la maternité. Il comprend l’enseignement que le Pape Jean-Paul II donnera dans la Lettre apostolique Mulieris dignitatem du 15 août 1988: «L’engendrement humain est commun à l’homme et à la femme… Pourtant, même si tous deux sont ensemble les parents de leur enfant, la maternité de la femme constitue un «rôle» particulier dans leur rôle commun de parents et même le rôle le plus exigeant… Il faut donc que l’homme ait pleinement conscience de contracter une dette particulière envers la femme, dans leur fonction commune de parents… L’homme – même s’il prend toute sa part dans cette fonction des parents – se trouve toujours «à l’extérieur» du processus de la gestation et de la naissance de l’enfant et, à bien des égards, il lui faut apprendre de la mère sa propre «paternité»» (n. 18).
En 1922, les fils Filippo et Cesarino manifestent le désir de se donner à Dieu. Le 6 novembre 1924, Filippo entre au séminaire et Cesarino à l’abbaye bénédictine de Saint-Paul-hors-les-Murs. Ce dernier deviendra le Père Paolino. «Le départ de la maison des deux garçons produisit un vide énorme, relate leur soeur Stefania. Celui qui s’en ressentit le plus, jusqu’à en avoir des maux physiques, ce fut papa». Toutefois, ces souffrances affectives sont bientôt dépassées. Maria écrira à ses fils: «Penser à vous est donc pour moi, après la Messe et la communion, l’unique repos et comme l’unique refuge lumineux de mon âme bénissant le Seigneur». À l’issue de la première année de philosophie, Filippo doit quitter le séminaire pour raison de santé. Peu après, il rejoint son frère et se fait Bénédictin: il deviendra le Père Tarcisio.
Un cadeau qui coûte
En 1920, le célèbre Père Mateo intronise le Sacré-Coeur de Jésus dans la famille Beltrame. Avec ses encouragements, Stefania décide de se consacrer à Dieu. En 1927, elle entre au couvent des Bénédictines de Milan et y prend le nom de soeur Cecilia. Enrichetta rapporte: «Le départ de ma soeur fit dans le coeur de papa une déchirure extrêmement violente. J’ai encore dans les yeux, à plus de soixante-dix ans de distance, les pleurs silencieux et pudiques de mon père agenouillé, tandis que de l’autre côté de la grille, se déroulait la cérémonie de prise d’habit de sa fille». Maria s’était appliquée à donner à ses enfants une éducation humaine et chrétienne, pieuse sans excès: «Je me suis souvent demandé, écrit-elle, si une vie orientée de cette façon doit nécessairement conduire à la vocation. Ce n’est pas vous qui m’avez choisi, c’est moi qui vous ai choisis (Jn 15, 16), dit le Seigneur, et donc ma réponse est non… Aux parents à qui Dieu a fait ce cadeau royal et gratuit, il reste le devoir et le besoin éternel de s’humilier, de remercier, de vivre le Domine non sum dignus (Seigneur, je ne suis pas digne) dans une vie reconnaissante, de dévouement et de piété». D’ailleurs, Maria ne perd pas de vue la diversité des dons de Dieu: «Tous les états de vie, pourvu qu’ils soient vécus sous la douce pression de la volonté divine, sont nobles et saints, en tant que moyens efficaces pour atteindre le but (la sainteté)». Elle fait remarquer que si les enfants font le choix de se marier, «c’est certainement une grande et sublime vocation» mais cette voie n’est pas, elle non plus, une voie de facilité.
La maison représente, pour la famille Beltrame, le monde de l’intimité où règne l’amour réciproque en Dieu. Comme toute femme, Maria attribue une grande importance au soin de la maison, dans les plus petits détails. Elle met en oeuvre le talent de l’hospitalité et instaure avec ses hôtes le climat le plus conforme à l’esprit de l’Évangile: les rancoeurs, les ressentiments et la médisance en sont bannis. Dans les conversations, on s’en tient aux faits sans exprimer de jugement sur les personnes. Les vacances se passent habituellement à la campagne que Maria préfère à la mer. À partir de 1928, les Beltrame acquièrent à Serravalle un terrain sur lequel ils font bâtir une maison; ils y installent une petite chapelle où, grâce à une permission spéciale, ils peuvent conserver le Très Saint Sacrement.
Le retour de la sérénité
Dans la vie de tous les jours, Maria et Luigi rivalisent de charité. Un de leurs enfants écrit: «Leur vie de couple fut un véritable concours de respect, de donation, de dépendance amoureuse et d’obéissance réciproque, dans une recherche commune de ce qui était «le mieux» pour l’autre, à un niveau éminemment spirituel, dans un accord des âmes où le concept même d’obéissance était dépassé par une exigence transcendante de charité… jusque dans l’exercice amoureux de la correction fraternelle et d’une consultation sincère et humble de la pensée de l’autre». Toutefois, les opinions opposées, les discussions animées, et même les frictions ne manquent pas. Maria n’est pas très perméable aux influences étrangères et débattre avec elle pour la faire changer d’avis n’est pas chose facile. Dans ces moments-là, Luigi peut se sentir peiné et nerveux, tandis que Maria semble agressive. Mais cela ne dure jamais bien longtemps et les promptes demandes de pardon entraînent le retour de la sérénité. Le tabac est un motif de mésentente. Luigi a été grand fumeur dès sa jeunesse. Pour donner le bon exemple à ses enfants, il cesse de fumer à la naissance de Filippo. Lorsque les enfants ont choisi leur route, il se remet à fumer malgré l’avis défavorable de Maria.
Luigi laisse à son épouse le soin de la gestion de leurs biens, tout en évaluant avec elle les dépenses importantes. Maria souligne dans ses écrits que, pour se sanctifier, le dépouillement total des biens n’est pas requis. D’autre part, les deux époux exercent avec plaisir l’esprit de solidarité envers ceux qui les sollicitent pour mille requêtes. Outre les aides financières, Luigi met à leur service ses capacités professionnelles et le prestige qu’il a acquis dans les sphères les plus élevées. Quant à Maria, elle exerce à sa manière une sorte de «direction spirituelle» auprès des siens mais aussi des amis, même de prêtres et de religieuses qui s’adressent à elle avec confiance.
Dirigée pendant plus de vingt ans par le Père franciscain Pellegrino Paoli, la famille Beltrame s’affilie au Tiers-Ordre franciscain. Le Père Mateo tient également une grande place dans le cheminement spirituel de la famille. En août 1918, Luigi passe par une période difficile que l’un de ses fils évoque ainsi: «Notre père a traversé un moment de crise spirituelle aiguë, liée à la rude ascèse spirituelle entamée par sa femme sous l’impulsion apostolique du Père Mateo… Il s’est laissé prendre par un moment de découragement et il a fini par avoir «peur de Dieu», presque comme d’un rival qui, attirant trop haut son épouse, la lui dérobait d’une certaine manière… Celle-ci l’a aidé à dépasser cet obstacle dû à la nature et à se laisser, lui aussi, attirer par l’Esprit, en un amour qui n’a jamais diminué mais qui s’est trouvé augmenté par la présence vivante de la grâce». Bien plus tard, Maria émettra le voeu du «plus parfait», en présence du Père dominicain Garrigou-Lagrange, devenu son Père spirituel après le Père Mateo.
Intense communion
Après le départ de leurs enfants (sauf Enrichetta qui reste auprès de ses parents), Luigi et Maria envisagent de se retirer dans un monastère, mais ils comprennent que telle n’est pas la volonté de Dieu. Leur désir de perfection se réalisera en conservant la vie commune où l’union de leurs âmes deviendra de plus en plus profonde. En 1941, la santé de Luigi est ébranlée par deux crises cardiaques; mais, il s’en remet et recouvre une santé satisfaisante. Le 1er novembre 1951, il met à jour son testament: «J’espère que Dieu voudra m’accorder la grâce de la persévérance finale en cette foi que je ressens si vive aujourd’hui, et que j’essaie de conserver avec cohérence dans mes pensées et mes actes, comme je le sais et comme je le peux». Le 5, par un heureux concours de circonstances, la famille entière se trouve réunie à Rome pour la Sainte Messe. Dans la nuit du 7 au 8, une nouvelle crise cardiaque entraîne la mort de Luigi le 9 au soir, à l’âge de 71 ans. Quelques mois plus tard, Maria écrit: «Luigi est toujours – et de manière incessante – l’amour et le regret inguérissable de tous et de chacun de nous, lui pourtant qui nous assiste, qui nous est proche, qui nous aime autant et plus encore, si c’était possible, qu’avant… Peu à peu, il m’accompagne toujours plus, surtout dans la prière, à la communion, devant l’autel». S’adressant à elle-même, elle ajoute: «Tu t’aperçois que tous ces petits gestes d’amour, qui cherchaient à embellir la maison pour lui (Luigi) n’ont plus aucune raison d’être, aucun sens… Ce n’est que de la communication des âmes, de la communion entre elles, cimentée par la foi, que naît et vit l’unité, de laquelle tu ne peux plus jamais t’extraire». Dans les années qui suivent, Maria abandonne peu à peu ses activités extérieures, et emploie tout son temps à la prière, à l’écriture et au soin de sa famille. En 1962, le Père Paolino lui révèle sa décision d’entrer chez les Trappistes, ce qui la réjouit. Durant l’été de 1965, elle passe une belle période de vacances, mais le 26 août, elle est emportée par une crise cardiaque. Elle a 81 ans.
Les époux Beltrame Quattrocchi ont eu des épreuves dans leur vie, mais ils n’ont pas connu certaines souffrances qui atteignent d’autres familles, comme le remarquait le Pape Jean-Paul II dans l’homélie de leur béatification: «La vie conjugale et familiale peut aussi connaître des moments de désarroi. Nous savons que de nombreuses familles cèdent alors au découragement. Je pense, en particulier, à ceux qui vivent le drame de la séparation; je pense à ceux qui doivent affronter la maladie et à ceux qui souffrent de la disparition prématurée de leur conjoint ou d’un enfant. Dans ces situations, on peut également apporter un grand témoignage de fidélité dans l’amour… Je confie toutes les familles éprouvées à la main providentielle de Dieu et aux soins pleins d’amour de Marie… Très chers époux, ne vous laissez jamais vaincre par le découragement: la grâce du Sacrement vous soutient et vous aide à élever sans cesse les bras vers le ciel».
Cf. Une auréole pour deux, par Attilio Danese et Giulia Paola Di Nicola, Éd. de l’Emmanuel, 2004.
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