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10 août 2011

Vénérable Marie Potter

Bien chers Amis de l’abbaye Saint-Joseph,

«Le Christ n’est pas mort seul. Deux autres sont morts avec Lui. Comme Notre-Dame s’est tenue auprès de son Fils mourant, aussi s’est-elle tenue auprès des deux larrons dans leur agonie. Il faut prier pour ceux qui meurent abandonnés ou isolés dans la misère ou dans le péché.» Cette réflexion d’une religieuse anglaise, la vénérable Marie Potter, est à l’origine de la fondation d’une congrégation religieuse vouée à l’assistance des mourants.

Marie Potter est née le 22 novembre 1847 à Newington, au sud de Londres, dernière de cinq enfants. Son père, qui n’a pas accepté la conversion de sa femme au catholicisme, quitte le foyer un an après la naissance de Marie: sa famille ne le reverra plus jamais. Madame Potter, affectueusement appelée «Reine Victoria» par les siens, se trouve sans ressources, mais grâce à la charité de ses proches, elle peut pourvoir au nécessaire. La petite dernière devient vite l’idole de tous. Longtemps après, Marie écrira: «Ce qui me cause le plus de peine dans ma vie passée, c’est d’avoir aimé être ce que j’étais: une idole dans ma maison et dans le cercle de nos connaissances, aimant être aimée pour moi-même et non pour Dieu. Dès mon enfance, je voulais être aimée par les autres et me dévouer à eux. Lorsque j’étais devenue grande, l’amour de mes frères ne me suffisait pas. Je voulais avoir quelqu’un qui me soit entièrement dévoué.»

Un avis catégorique

Cette personne entièrement dévouée, elle la trouve chez Godfrey King, à qui elle se fiance vers le milieu de 1868. Homme très intègre, Godfrey encourage Marie à prendre plus au sérieux le soin de son âme. Ses admonitions produisent un tel effet que Marie perçoit un appel de Dieu à la vie religieuse. Pour en avoir le coeur net, elle consulte Mgr Thomas Grant, évêque de Southwark. Celui-ci l’exhorte sans ambages à rompre ses fiançailles: «Que votre vie se passe dans le monde ou dans un couvent, vous ne devez avoir qu’un Époux, Jésus.» Ce conseil est rude, mais Marie le suit.

Le 8 décembre de cette année, elle est reçue comme postulante chez les Soeurs de la Merci à Brighton. Ces religieuses, fondées en 1831, se dévouent au service des pauvres. Le 30 juillet 1869, Marie en revêt l’habit et reçoit le nom de Soeur Marie-Angèle. Novice modèle, elle fait l’admiration de tous. Cependant, sa santé peu robuste est vite usée dans ce nouveau cadre, et il lui faut retourner dans le monde pour refaire ses forces. Au grand déplaisir de sa mère, Marie n’abandonne pourtant pas l’idée de la vie religieuse, et continue, autant qu’elle le peut, à pratiquer ce qu’elle a appris au couvent, en particulier l’oraison quotidienne. Elle est aidée par un prêtre pieux, Mgr John Virtue. Elle lit le Traité de la Vraie Dévotion à Marie, de saint Louis-Marie Grignion de Montfort, tout récemment traduit en anglais. Cet ouvrage aura une influence prépondérante sur sa vie. Le 8 décembre 1872, Marie prononce sa «consécration à Jésus par Marie» selon la formule préconisée par saint Louis-Marie. Constatant qu’il manque un commentaire du Traité de la Vraie Dévotion en langue anglaise, elle rédige le Path of Mary (Le Chemin de Marie), dont la teneur est résumée par le passage suivant: «Aime ce Coeur (de Marie), consacre-toi à Lui… Que tes souffrances, tes actions, tes paroles, tout ton être renouvellent, sur cette terre, la vie de Marie. Pour cela, tu dois étudier Marie ; pour l’étudier, tu dois entrer dans son Coeur et en observer le fonctionnement.» Plus tard, Marie Potter choisira pour l’oeuvre qu’elle aura fondée la devise: «Un dans le Coeur de Marie.»

Durant sa période de convalescence, Marie est profondément touchée du besoin d’assistance des malades et des mourants, et elle conçoit un très vif désir de se consacrer au salut éternel de ceux-ci. Le 6 novembre 1874, résonne au fond de son coeur l’inspiration de fonder une oeuvre qui se consacrera principalement à assister les mourants.

L’inspiration de Mary Potter est d’une grande importance pour les âmes, car la mort est le moment unique qui marque le passage à l’éternité. «La mort est la fin du pèlerinage terrestre de l’homme, du temps de grâce et de miséricorde que Dieu lui offre pour réaliser sa vie terrestre selon le dessein divin et pour décider son destin ultime. Quand aura pris fin l’unique cours de notre vie terrestre, nous ne reviendrons plus à d’autres vies terrestres. Les hommes ne meurent qu’une fois (He 9, 27). Il n’y a pas de «réincarnation» après la mort… Chaque homme reçoit dans son âme immortelle sa rétribution éternelle dès sa mort en un jugement particulier qui réfère sa vie au Christ, soit à travers une purification, soit pour entrer immédiatement dans la béatitude du ciel, soit pour se damner immédiatement pour toujours» (Catéchisme de l’Église Catholique, CEC, n. 1013, 1022).

Être prêt

L’Église nous encourage à nous préparer à la mort… à demander à la Mère de Dieu d’intercéder pour nous « à l’heure de notre mort» (Prière du «Je vous salue, Marie»), et à nous confier à saint Joseph, patron de la bonne mort. «Dans toutes tes actions, dans toutes tes pensées, tu devrais te comporter comme si tu devais mourir aujourd’hui, recommande le livre de l’Imitation de Jésus-Christ. Si ta conscience était en bon état, tu ne craindrais pas beaucoup la mort. Il vaudrait mieux se garder de pécher que de fuir la mort. Si aujourd’hui tu n’es pas prêt, comment le seras-tu demain?» (1, 23, 1).

La mort est une conséquence du péché. À la suite de la Sainte Écriture, l’Église enseigne que la mort est entrée dans le monde à cause du péché de l’homme (Rm 5, 12 ; 6, 23). Dieu le destinait à ne pas mourir. Toutefois, la mort est transformée par le Christ. Jésus, le Fils de Dieu, a souffert Lui aussi la mort, propre de la condition humaine. Mais, malgré son effroi face à elle, Il l’a assumée dans un acte de soumission totale et libre à la volonté de son Père. L’obéissance de Jésus a transformé la malédiction de la mort en bénédiction. Grâce au Christ, la mort chrétienne a un sens positif. Pour moi, la vie c’est le Christ et mourir un gain (Ph 1, 21). C’est là une parole certaine : si nous mourons avec lui, nous vivrons avec lui (2 Tm 2, 11). Le chrétien peut transformer sa propre mort en un acte d’obéissance et d’amour envers le Père, à l’exemple du Christ.

La vision chrétienne de la mort est exprimée de façon privilégiée dans la liturgie de l’Église: «Pour tous ceux qui croient en toi, Seigneur, la vie n’est pas détruite, elle est transformée; et lorsque prend fin leur séjour sur la terre, ils ont déjà une demeure éternelle dans les cieux» (Missel Romain, Préface des défunts). Les saints ont aussi présenté la mort sous un aspect positif: «Je veux voir Dieu, et pour le voir il faut mourir» (Sainte Thérèse d’Avila). «Je ne meurs pas, j’entre dans la vie» (Sainte Thérèse de l’Enfant-Jésus. Cf. CEC, n. 1005-1014).

Dans un autre moment de grâce intime, Marie Potter est portée à une intense dévotion au Précieux Sang de Jésus, instrument de notre salut éternel, ainsi qu’à l’Esprit-Saint. Trois éléments se lient ainsi dans sa spiritualité: s’unir à la Très Sainte Vierge Marie pour demander que le Précieux Sang de Jésus soit déversé sur tous les mourants par la grâce du Saint-Esprit. En février 1875, elle écrit: «Le Coeur de Marie, le Précieux Sang, le Saint-Esprit: avec eux, tu combattras et tu vaincras!»

Devant les angoisses engendrées chez les hommes par le matérialisme qui se développe, Marie Potter estime que seule l’espérance chrétienne est un profond et véritable apaisement; cette espérance s’appuie sur la Croix du Christ qui révèle la valeur infinie de chaque vie humaine. Pour Marie, les âmes les plus à plaindre sont celles qui n’ont personne pour les aimer ou pour partager leur fardeau. Aucune occasion de faire du bien à une âme ne doit donc être perdue. Elle écrira: «Le premier commandement de la loi est d’aimer Dieu par-dessus toutes choses; mais le second lui ressemble: aimer son prochain comme soi-même. Pourrais-tu dire que tu aimes ton prochain comme toi-même si tu le voyais seul et sans soins et que tu ne l’assistais pas?… À travers le monde, des âmes sont en train de mourir, de périr, de tomber dans l’abîme sans fond d’où on ne peut sortir. Avant qu’il ne soit trop tard, n’élèveras-tu pas un cri vers le Ciel pour demander miséricorde?… Mets-toi à genoux, prie, supplie, attire la miséricorde de Dieu.»

Une situation insupportable

L’appel de Dieu presse Marie: «Je me sens une res- ponsabilité. Des pécheurs sont en train de mourir, des âmes faites à l’image de la Sainte Trinité se perdent. Il me semble qu’elles m’appartiennent, et je ne puis supporter qu’on me les enlève. Il me serait terrible et insupportable de ne pouvoir leur venir en aide. Mais, avec l’aide de Dieu, je le peux.» Quand elle rapporte à Mgr Virtue toutes ses pensées, celui-ci lui ordonne de renoncer entièrement au projet qu’elle mûrit dans son esprit, sous peine de péché mortel. Plusieurs mois de véritables angoisses assaillent cette âme sensible, prise entre la certitude d’avoir reçu une inspiration divine et l’obéissance à son père spirituel. L’année suivante, Mgr Virtue est envoyé par ses supérieurs travailler en un autre lieu, et Marie rencontre un prêtre mariste, l’abbé Edward Selley, qui accepte de la prendre sous sa responsabilité et de l’aider à fonder l’oeuvre. Elle souhaite obtenir la bénédiction de sa mère, mais n’arrive pas à la convaincre que la volonté de Dieu est là.

Un jour de janvier 1877, elle va à Brighton avec Marguerite, sa belle-soeur, pour la journée. Au moment du retour, elle se souvient soudain de l’Évangile du jour, celui du recouvrement de Jésus au Temple, et elle se met en prière. Une grande paix l’envahit; elle se décide alors à se rendre à Londres au lieu de rentrer à Portsmouth chez sa mère. Lorsque Madame Potter apprend que sa fille ne revient pas, elle en est tellement fâchée qu’elle refusera ensuite de lui parler pendant dix-huit mois. De Londres, Marie se rend à Nottingham pour une rencontre avec l’évêque, Mgr Bagshawe, qui l’accueille et permet la fondation du nouvel institut dans son diocèse, sous le nom de «Petite Compagnie de Marie». Le 2 juillet suivant, Marie et cinq de ses compagnes reçoivent l’habit de la nouvelle communauté: une tunique noire et un voile bleu. C’est ainsi qu’elles seront connues sous le nom de «Soeurs Bleues» («Blue Sisters»).

Mère Marie gagne les âmes par sa douceur. Un dimanche soir, alors que les Soeurs assistent au fond de la chapelle du village à l’office de Complies suivi de la bénédiction du Très Saint Sacrement, un homme ivre entre au moment du sermon et se met à parler fort. Le prêtre demande au gardien de la chapelle de le mettre dehors. Mère Marie intervient en parlant à cet homme avec douceur mais le portier lui dit: «Ma Mère, je vais ramener cet homme chez lui.» Alors l’ivrogne crie: «Ne me touchez pas!» puis, en désignant la Mère: «J’irai avec elle.» Alors celle-ci l’accompagne jusque chez lui et revient à temps pour la bénédiction.

«Ma confiance n’est pas ébranlée»

Cependant, bientôt, Mère Marie est replacée sur la croix. Bien que rempli de bonne volonté, Mgr Bagshawe n’a que des notions très incomplètes sur la vie religieuse. Au bout de trois semaines, trouvant la Mère trop exigeante, il la dépose et met une autre Soeur à la tête de la communauté. Mère Marie confie: «Si cette oeuvre avait été mon projet à moi, j’aurais probablement dit que je ne pouvais en céder l’entière direction à une autre. Comme je ne crois pas que ce soit un projet à moi, mais une oeuvre du Dieu tout-puissant – une oeuvre qui lui est particulièrement chère et par conséquent marquée du signe de la croix – je la laisse à Dieu, lui disant qu’il doit s’en charger. Alors que je ressens de la tristesse en voyant que les choses ne se passent pas comme j’aurais espéré, ma confiance en Dieu n’est cependant pas ébranlée… Bien qu’Il ne veuille pas tout ce qui se passe, Dieu le permet; Il peut tirer le bien du mal, et Il le fait.»

Quelques mois après, l’évêque donne à Mère Marie la charge de maîtresse des novices, en précisant qu’elle ne pourra ni recevoir les confidences des novices ni leur faire de reproches; elle est seulement autorisée à leur expliquer le sens de leur vocation. Pour Mère Marie, ces conditions rendent impossible l’accomplissement de sa tâche: «Il me semble, écrit-elle, que pour se vaincre il faut descendre jusqu’aux détails, ne pas regarder les choses d’une manière vague ou prendre des résolutions en général, mais plutôt s’appliquer avec résolution aux cas particuliers et accepter qu’on nous montre où nous avons failli.» Dans un esprit de foi, cependant, elle accepte cette épreuve comme un moyen de s’unir à la Passion du Christ. Après quelques semaines, Mère Marie fait toutefois connaître que sa situation est impossible, et l’évêque la destitue de sa fonction. Il lui permet, en revanche, d’écrire ses réflexions sur l’esprit de la Compagnie; ce texte sera d’un prix inestimable pour la postérité. En plus de ces croix spirituelles, Mère Marie souffre de graves difficultés de santé. En 1878, un cancer du sein l’oblige à subir deux opérations en six mois.

La Mère écrit: «Peut-être savez-vous quelque chose des diverses croix qui ont déjà assiégé cette petite société de Marie. Mais nous devons voir les choses dans la lumière de ce que notre père directeur a dit; il m’a écrit il y a plusieurs mois pour dire qu’il s’en réjouissait, car il n’a jamais vu une oeuvre de Dieu en manquer. La volonté de Dieu adoucit tout, de sorte que quand Il veut qu’on travaille, nous devons le vouloir aussi; quand Il veut qu’on souffre, quand Il nous appelle pour nous parler, nous devons répondre avec joie: «Seigneur, nous voici!»» Cependant, au début de 1879, l’état de la communauté, dû surtout au manque d’esprit religieux des supérieures, pousse Mgr Bagshawe à présider une nouvelle élection. Les voix se portent sur Mère Marie.

Amour maternel

Marie Potter a donné aux membres de son institut la mission de soigner le Christ dans tous ses membres, surtout les mourants et les plus pauvres; elle veut leur faire imiter «l’amour maternel de Jésus et de Marie». «L’amour de Dieu est un amour maternel», affirme la fondatrice. Si chaque être humain reflète en partie les attributs de Dieu, les femmes ont le don particulier de manifester son amour maternel, pense la Mère. Aussi désire-t-elle que ses Soeurs soient véritablement des mères, au sens spirituel. La maternité de Marie est leur modèle: Marie est «l’une des nôtres», affirme-t-elle. Elle souhaite que Notre-Dame soit proclamée Mère de l’Église. Dans une lettre adressée au bienheureux Pape Pie IX, le 18 juillet 1876, elle met dans la bouche de Marie ces paroles: «Mon enfant, Dieu tout-puissant ne peut me donner, après la possession de Lui-même, rien de plus désirable ni de plus précieux que des âmes. Cela, Jésus le savait; aussi, au moment de sa mort, voulant me laisser une mesure de son amour, confia-t-il l’Église dans la personne de saint Jean à ma protection maternelle… Viens donc à moi, et amène-moi l’Église tout entière, que j’ai portée dans mon sein depuis le temps où j’ai porté son Auteur, Jésus. Que le saint Vicaire de mon Fils proclame de sa croix que je suis la Mère de cette Église! Qu’il s’unisse à son Maître en disant aux nations de la terre, «Voici ta Mère», et qu’il consacre l’Église qui lui est confiée à mon coeur maternel, et moi je montrerai que je suis sa Mère!» Ce désir se réalisera un siècle plus tard, le 21 novembre 1964, lorsque le Pape Paul VI proclamera Notre-Dame «Mère de l’Église», lors de la clôture de la troisième session du concile Vatican II.

La Vierge Marie «a apporté à l’oeuvre du Sauveur une coopération absolument sans pareille par son obéissance, sa foi, son espérance, son ardente charité, pour que soit rendue aux âmes la vie surnaturelle. C’est pourquoi elle est devenue pour nous, dans l’ordre de la grâce, notre Mère… Le rôle maternel de Marie à l’égard des hommes n’offusque cependant et ne diminue en rien l’unique médiation du Christ: il en manifeste au contraire la vertu. Car toute influence salutaire de la part de la bienheureuse Vierge… découle de la surabondance des mérites du Christ; elle s’appuie sur sa médiation, dont elle dépend en tout et d’où elle tire toute sa vertu» (Vatican II, Lumen gentium, 60-62).

En octobre 1882, Mère Marie se rend à Rome avec quelques Soeurs pour solliciter du Pape Léon XIII l’approbation de son institut. À leur grande joie, elles sont invitées à assister à la Messe du Pape, puis à une audience privée au cours de laquelle le Saint-Père les invite à rester à Rome pour y fonder une maison. La fondatrice accepte cette offre et bientôt engage la construction d’un hôpital à proximité du Latran; il sera achevé en 1908. Les constitutions de la Petite Compagnie sont alors élaborées; elles seront approuvées par le Saint-Siège, le 31 mai 1886. «Ce n’est pas mon oeuvre, reconnaît humblement la Mère, mais celle de Dieu. Quiconque considère cette oeuvre comme mienne l’amoindrit.»

À partir de 1885, les fondations se multiplient, d’abord en Australie, sur invitation de l’archevêque de Sydney, puis en Italie et en Irlande. Si le travail essentiel de la Petite Compagnie est d’être auprès de ceux qui achèvent leur vie sur terre, la fondatrice n’exclut a priori aucun apostolat. Parmi ses autres oeuvres, il faut compter le soin des nouveaux nés. Mère Marie souhaite que, pour imiter la Très Sainte Vierge Marie dans le mystère de la Visitation à sa cousine Élisabeth, les membres de son institut prêtent une main secourable aux mères pauvres pour les aider au moment de l’accouchement et des semaines qui suivent. Mais assister les jeunes mères est une nouveauté par rapport aux activités traditionnelles des religieuses; le Cardinal Manning, archevêque de Westminster, estime nécessaire de l’interdire comme n’étant pas convenable pour des femmes consacrées. Toutefois le Saint-Siège, auquel en appelle la Mère, accorde en 1886 une permission d’abord limitée, puis élargie en 1905, de s’adonner à ce service.

«Elle a aimé Dieu»

Au printemps de 1913, la nouvelle se répand dans Rome que «la santa Madre» est gravement malade. De nombreux visiteurs se rendent à son chevet. Le 4 avril 1913, le Cardinal Merry del Val, secrétaire d’État, envoie à Mère Marie une bénédiction spéciale du Pape saint Pie X. Elle avait souvent affirmé que le jour où elle ne pourrait plus communier serait son dernier. Le 9 avril, pendant la célébration de la Sainte Messe dans sa chambre, au moment de la consécration, elle étend les bras en prononçant à plusieurs reprises le saint Nom de Jésus. Ayant perdu conscience, elle rend paisiblement son âme à Dieu alors que la Messe s’achève. En apprenant sa mort, un prêtre qui l’a bien connue affirme: «La Mère n’a fait qu’une chose dans sa vie: elle a aimé Dieu.»

À la mort de la fondatrice, la Petite Compagnie comptait seize maisons répandues en Europe, Amérique du Nord, Australie et Afrique. Aujourd’hui encore, les Soeurs continuent, sur les cinq continents, à servir les mourants et tous ceux qui souffrent. En 1988, le Pape Jean-Paul II a déclaré Marie Potter vénérable. D’abord inhumée à Rome, sa dépouille mortelle a été transférée en 1997 à la cathédrale de Nottingham.

Dans une réflexion sur le développement de son institut, Mère Marie Potter écrivait: «Comme Dieu a été bon pour nous! Si seulement nous pouvions Le remercier! Les siècles éternels seuls pourront nous permettre de remercier notre Dieu. Quand nous regardons en arrière la vie qu’il nous a fait mener, quels motifs de gratitude trouvons-nous? Le fait que nous ayons eu la grâce de marcher, avec Jésus, sur le chemin de la croix, que nous ayons souffert un peu et ayons été méprisées, humiliées. Pour ces grâces, nous avons une dette envers Notre-Seigneur, car nous ne l’aurions pas pu de nous-mêmes. Non, à l’heure de notre mort, notre gloire ne sera pas dans les couvents ou les hôpitaux que nous avons construits, mais nous dirons avec l’Apôtre: Pour moi, que jamais je ne me glorifie, sinon dans la croix de Notre-Seigneur Jésus-Christ (Ga 6, 14).»

Demandons à la vénérable Marie Potter de nous obtenir la grâce de suivre Jésus jusqu’au Calvaire afin de parvenir au Ciel. Qu’elle nous encourage à accompagner les mourants et nous inspire des paroles et des attitudes qui les aident à passer paisiblement à Dieu!

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