1 juin 2020
Sainte Gemma Galgani
Bien chers Amis de l’abbaye Saint-Joseph,
Un soir, après s’être entretenue un moment avec son ange gardien, Gemma Galgani entend celui-ci lui ordonner d’aller au lit, « disant que cette nuit, comme elle le rapporte, je devrais rester seule, parce que s’il restait, jamais je ne dormirais. Puis il partit. Il est vrai que, lorsqu’il reste là, je ne dors pas : il m’apprend tant de choses qui se font au Paradis, et la nuit passe vite, vite. Il m’a laissée seule, et j’ai dormi. Cependant, je me suis réveillée plusieurs fois, et aussitôt il me disait : “Dors, sinon je m’en vais pour de bon.” » Sous un mode plaisant, Gemma reçoit ainsi du Ciel des enseignements profonds sur la conformité à la volonté de Dieu. Qui est cette jeune fille dont saint Maximilien Kolbe écrivait en 1921 : « J’ai lu la vie de Gemma… Cela m’a fait plus de bien qu’une série d’exercices spirituels » ?
Cinquième de huit enfants, Gemma naît le 12 mars 1878, en Toscane (Italie centrale). Le lendemain, elle reçoit au Baptême le nom de Gemma. Sa mère Aurélia Landi, mariée à Henri Galgani, un pharmacien-chimiste de Camigliano, est très pieuse. Elle aurait souhaité pour son enfant le nom d’une grande sainte ; mais le curé la console en disant : « Gemma ! Mais c’est au Paradis que l’on trouve les gemmes (pierres précieuses) ! Espérons qu’elle aussi sera une gemme du Paradis. » La mère s’applique à transmettre sa foi profonde à ses enfants : elle les fait prier, les emmène à la Messe et leur explique comment le Bon Jésus a donné sa vie pour nous. En avril 1878, la famille s’établit dans la ville de Lucques où M. Galgani a fait l’acquisition d’une vaste pharmacie. Dans le courant de l’année 1881, Gemma fréquente une école maternelle où se révèle sa vive intelligence. Son amour de la prière s’accroît beaucoup. Elle a environ quatre ans quand sa grand-mère, pénétrant dans sa chambre à l’improviste, la surprend les mains jointes, à genoux devant une image de la Vierge. « Que fais-tu là, Gemma ? », lui demande-t-elle après l’avoir contemplée quelque temps. « Je dis l’Ave Maria. Laisse-moi, je veux prier ! », répond l’enfant. D’autres fois, la mère et la fille sont à genoux, unies dans la même prière. Aurélia Galgani, atteinte de tuberculose, ne restera pas sur terre plus de huit ans après la naissance de Gemma. Souvent, elle lui répète : « Si je pouvais t’emporter avec moi au Paradis ! » Un jour vient où la malade est contrainte de garder le lit. « Je ne voulais plus me séparer de ma mère, dira Gemma, je ne sortais même plus de sa chambre, voulant partir avec elle au Paradis et craignant qu’elle ne s’envole toute seule vers le Ciel. »
Le 26 mai 1885, à l’âge de sept ans, l’enfant reçoit le sacrement de Confirmation. Elle entend alors pour la première fois une voix intérieure : « Gemma, veux-tu me donner ta maman ? – Oui, à condition que vous me preniez aussi. – Non ! Donne-la moi volontiers… Pour le moment, tu dois rester avec ton papa. Je la conduirai au Paradis, tu sais. » « Je fus obligée de répondre oui, raconte Gemma, mais je pleurais… » Elle reste plus que jamais auprès de sa mère à l’agonie. Craignant pour la vie de son enfant, M. Galgani la confie à la garde de sa tante. Aurélia, âgée de trente-huit ans, meurt le 17 septembre 1886, après avoir dit : « J’offre ma vie pour obtenir la grâce de revoir mes huit enfants au Paradis. »
Tous les jours un 10
Scolarisée chez des religieuses, Gemma a neuf ans lors de sa première Communion, le 17 juin 1887. Elle avait insisté pour obtenir cette grâce qu’on n’accordait pas alors aux enfants de cet âge. Henri Galgani ne supportait plus de voir sa fille pleurer de ne pas communier, et le curé lui avait conseillé de lui en donner la permission, de peur qu’elle ne tombe malade. Gemma confiera pourtant qu’elle avait la mauvaise habitude de toujours pleurer pour attendrir son père et obtenir ce qu’elle voulait. Elle découvre, en ce jour, combien les délices du Ciel diffèrent de celles de la terre. « Ce fut ce matin-là que Jésus me donna le grand désir d’être religieuse », écrira-t-elle à son père spirituel.
En classe, Gemma se distingue en français, arithmétique et musique ; mais elle désire surtout connaître ce qui concerne la Passion de Jésus. Sa maîtresse lui promet de lui en exposer un point particulier chaque fois qu’elle obtiendra un 10/10 en classe. « J’étais si heureuse, écrira-t-elle ; tous les jours j’avais un 10, et tous les jours j’avais mon explication. » Elle gagnera le Prix d’or pour sa connaissance du catéchisme. Mais vers l’âge de douze ans, sa ferveur se refroidit et elle sent Jésus s’éloigner de plus en plus. Son père, en effet, ne lui refuse rien et elle-même prend trop de plaisir à se montrer élégamment habillée. Elle garde cependant un grand amour des pauvres, et lorsqu’elle sort, elle dévalise la maison pour faire des aumônes. Devant cette prodigalité, Mgr Volpi (évêque auxiliaire de Lucques, puis évêque d’Arezzo ; 1860-1931), son confesseur, finit par lui interdire ces largesses, et son père ne lui accorde plus de quoi contenter son bon cœur. La jeune fille finit par ne plus sortir, de peur de rencontrer des pauvres qu’elle ne puisse secourir.
Les bijoux de l’épouse
Le 11 septembre 1894, Gino, son frère préféré, succombe à la tuberculose ; séminariste, il n’avait que dix-huit ans. Inconsolable, Gemma tombe malade pendant trois mois. Une fois guérie, elle reste entourée des prévenances de son père qui la comble de cadeaux. Il lui offre un jour une montre en or, qu’elle porte avec joie lors d’une sortie. Au retour, son ange gardien lui apparaît pour la première fois : « Souviens-toi que les bijoux précieux qui ornent l’épouse d’un Roi crucifié ne peuvent être que les épines et la croix. » Dès lors, la jeune fille se soumet à un grand dépouillement pour plaire à Jésus : on la verra très sobrement vêtue, sans autre parure que ses yeux clairs et son sourire céleste. Elle signera ses lettres : “La pauvre Gemma”. Son combat au quotidien se porte aussi contre ses défauts et ses fautes, afin d’accéder à l’humilité.
À la Noël de cette même année, son confesseur lui accorde de faire le vœu de chasteté ; elle est dans sa dix-septième année. Elle écrira plus tard à son père spirituel : « Ce matin, à la Communion, Jésus me disait : “Vois, Gemma, dans mon cœur il y a une petite fille que j’aime beaucoup et dont je suis bien aimé en retour. Cette fille me demande toujours amour et pureté, et moi qui suis le véritable amour et la vraie pureté, je lui en accorde autant qu’une créature humaine puisse en recevoir.” » Gemma demande à Jésus de beaucoup souffrir pour lui prouver son amour. Cette demande surprenante n’est pas l’expression d’un psychisme malade, mais bien celui d’un ardent désir de ressembler à Jésus dans sa Passion. Par sa grâce, Dieu nous donne la possibilité de participer à l’œuvre de la Rédemption qui fructifie dans la communion des saints.
« Vous êtes le corps du Christ, et membres, chacun pour sa part (1 Co 12, 27). La charité ne cherche pas son intérêt (1 Co 13, 5). Le moindre de nos actes fait dans la charité retentit au profit de tous, dans cette solidarité avec tous les hommes, vivants ou morts, qui se fonde sur la communion des saints. Tout péché nuit à cette communion… Ce terme (“communion des saints”) désigne la communion des “personnes saintes” dans le Christ qui est mort pour tous, de sorte que ce que chacun fait ou souffre dans et pour le Christ porte du fruit pour tous » (Catéchisme de l’Église catholique, nos 953, 961).
Gemma ne tarde pas à être exaucée : un abcès se déclare au pied, provoquant une douleur qu’elle accepte généreusement et cache de son mieux pour que Jésus seul la connaisse. Bientôt, le mal dégénère en carie osseuse. L’aggravation des douleurs l’oblige à consulter des médecins qui, pour éviter l’amputation, préconisent de gratter l’os. Gemma se reprochera « ses pleurs et hurlements », mais ses proches et les médecins eux-mêmes furent impressionnés par son silence et son sourire.
Appartenir à Jésus
En 1897, Henri Galgani meurt d’un cancer de la gorge. Gemma en est très affectée, mais Jésus la fortifie intérieurement. On envoie alors Gemma chez sa tante paternelle ; elle l’aide à tenir une quincaillerie, à la satisfaction de tous. Plusieurs jeunes hommes la demandent en mariage. Mais elle, voulant appartenir tout entière à Jésus, décline ces offres ; un mal de dos l’oblige à revenir à Lucques. En fait, Gemma est atteinte du mal de Pot, une tuberculose osseuse qui affecte la colonne vertébrale. Bientôt paralysée, elle doit rester au lit. Sa grande souffrance est d’être auscultée par les médecins, car elle veille avec un grand soin à conserver par la pudeur une très grande pureté de corps et d’esprit : « Je ne manquais jamais de réciter chaque jour trois Ave Maria à genoux sur les doigts – pratique de pénitence que m’avait enseignée maman – afin que Jésus me libère des péchés contre la sainte pureté. »
« La pureté demande la pudeur. Celle-ci est une partie intégrante de la tempérance… Elle est ordonnée à la chasteté dont elle atteste la délicatesse. Elle guide les regards et les gestes conformes à la dignité des personnes et de leur union. La pudeur est modestie. Elle inspire le choix du vêtement. Elle maintient le silence ou la réserve là où transparaît le risque d’une curiosité malsaine. Elle inspire une manière de vivre qui permet de résister aux sollicitations de la mode et à la pression des idéologies dominantes. La pudeur naît par l’éveil de la conscience du sujet. Enseigner la pudeur à des enfants et des adolescents, c’est éveiller au respect de la personne humaine » (CEC, nos 2521-2524). Dans l’encyclique Sacra virginitas, le Pape Pie XII remarquait : « Pour conserver intacte la vertu de chasteté, ni la vigilance ni la pudeur ne sont suffisantes. Il faut encore utiliser ces recours qui dépassent nos forces naturelles : la prière, les sacrements de Pénitence et d’Eucharistie, et une dévotion ardente envers la Très Sainte Mère de Dieu » (25 mars 1954, n° 59).
Gemma confiera qu’après avoir souffert, elle était toujours déçue de constater le retour de ses forces, car elle voyait dans la mort la porte d’entrée au Paradis. Des Visitandines qui viennent la soigner lui proposent de faire une neuvaine à sainte Marguerite-Marie pour l’aider soit à guérir soit à bien mourir. Elle lit alors avec beaucoup de plaisir la vie d’un jeune religieux passioniste, Gabriel de l’Addolorata (mort en 1862, canonisé en 1920). Une grande amitié se noue entre eux et, tous les soirs, Frère Gabriel lui apparaît pour l’aider à faire la neuvaine. Par la suite, il s’entretiendra souvent avec elle. À la fin de la neuvaine, Gemma est entièrement guérie, à la grande stupéfaction des médecins. L’un d’eux la soupçonne d’hystérie, ce qui la blesse sans toutefois lui faire perdre sa grande tranquillité d’âme. Elle envisage d’entrer à la Visitation, mais Frère Gabriel lui conseille de promettre seulement de se faire religieuse et de se consacrer au Sacré-Cœur. Quand elle lui en demande la raison, il lui répond de façon énigmatique : « Sorella mia ! (ma petite sœur !) ».
Des amis intimes
La spécificité de la vie de Gemma se trouve dans son caractère simple et monotone, uni à une extraordinaire familiarité avec le monde surnaturel. Elle s’entretient avec les anges et les saints comme avec autant d’amis intimes. Le journal qu’elle a rédigé par obéissance à son directeur en témoigne. Le Jeudi Saint, 30 mars 1899, Jésus crucifié s’adresse à elle : « Regarde ma fille, et apprends comment on aime. Vois-tu cette croix, ces épines, ces plaies ? Tout est l’œuvre de l’amour, et de l’amour infini. Vois-tu jusqu’où je t’ai aimée ? Veux-tu m’aimer vraiment ? Apprends d’abord à souffrir ; la souffrance enseigne à aimer. » Le lendemain, pour la première fois, Notre-Seigneur Jésus-Christ lui donne la Communion de Sa main, car, malade, elle n’a pas la permission d’assister aux offices. Elle s’unit aux cérémonies du Vendredi Saint confinée dans sa chambre : « Mon ange gardien vint et nous priâmes ensemble. Nous assistâmes Jésus dans toutes ses peines ; nous compatîmes aux douleurs de notre Maman (c’est ainsi qu’elle appelle la Sainte Vierge). Mais mon ange ne manqua pas de me faire un doux reproche en me disant de ne pas pleurer quand j’avais quelque sacrifice à faire à Jésus, mais de remercier ceux qui m’en donnaient l’occasion. »
Dans l’encyclique Spe salvi, le Pape Benoît XVI rappelle le sens des petits sacrifices : « La pensée de pouvoir “offrir” les petites peines du quotidien, qui nous touchent toujours de nouveau comme des piqûres plus ou moins désagréables, leur attribuant ainsi un sens, était une forme de dévotion, peut-être moins pratiquée aujourd’hui, mais encore très répandue il n’y a pas si longtemps… Il faut se demander si quelque chose d’essentiel, qui pourrait être une aide, n’y était pas contenu de quelque manière. Que veut dire “offrir” ? Ces personnes étaient convaincues de pouvoir insérer dans la grande compassion du Christ leurs petites peines, qui entraient ainsi d’une certaine façon dans le trésor de compassion dont le genre humain a besoin. De cette manière aussi les petits ennuis du quotidien pourraient acquérir un sens et contribuer à l’économie du bien, de l’amour entre les hommes. Peut-être devrions-nous nous demander vraiment si une telle chose ne pourrait pas redevenir une perspective judicieuse pour nous aussi » (n° 40).
En mai 1899, Gemma frappe à la porte de la Visitation de Lucques, mais sa santé trop précaire ne permet pas son admission. Le 8 juin suivant, veille de la fête du Sacré-Cœur, elle reçoit la grâce de la stigmatisation, c’est-à-dire de l’impression, dans ses mains et son côté, de plaies semblables à celles reçues par Jésus dans sa Passion. « Jésus est apparu avec ses blessures ouvertes, rapporte Gemma, mais de ces blessures ne s’écoulait plus du sang mais des flammes de feu. En un instant ces flammes sont venues toucher mes mains, mes pieds et mon cœur. Je me suis sentie mourir et j’aurais dû m’écrouler par terre si ma Mère (la Vierge Marie) ne m’avait pas retenue. »
Heures de souffrance et de joie
Jusqu’à sa mort, chaque semaine, du jeudi soir à 20 h au vendredi à 15 h, elle revivra la Passion, en portant dans ses mains, ses pieds et au côté les marques de l’amour de Dieu pour les hommes. Jésus Lui-même lui impose aussi, dans le même temps, sa couronne d’épines. Gemma s’abîme en sentiments de reconnaissance, car elle peut ainsi soulager Jésus et Lui témoigner son amour. Ces heures de souffrance sont aussi des heures de joie par l’intimité qu’elle ressent si vivement avec le Sauveur. Elle intercède pour ceux qu’elle aime et aussi pour les pécheurs. Gemma d’ailleurs demande aussi pardon pour ses propres péchés.
« En opérant la Rédemption par la souffrance, écrivait le Pape Jean-Paul II, le Christ a élevé en même temps la souffrance humaine jusqu’à lui donner valeur de Rédemption. Tout homme peut donc, dans sa souffrance, participer à la souffrance rédemptrice du Christ. » (Lettre apostolique Salvifici doloris, 11 février 1984, n° 19). Gemma Galgani a été unie d’une manière toute spéciale à la Croix du Christ. Mais tous nous avons à souffrir par fidélité à la vérité, à la justice et à l’amour : « Souffrir avec l’autre, pour les autres, explique le Pape Benoît XVI, souffrir par amour de la vérité et de la justice, souffrir à cause de l’amour et pour devenir une personne qui aime vraiment, ce sont des éléments fondamentaux d’humanité ; leur abandon détruirait l’homme lui-même… En sommes-nous capables ? L’autre est-il suffisamment important pour que je devienne pour lui une personne qui souffre ? La vérité est-elle, pour moi, si importante pour payer la souffrance ? La promesse de l’amour est-elle si grande pour justifier le don de moi-même ? À la foi chrétienne, dans l’histoire de l’humanité, revient justement ce mérite d’avoir suscité dans l’homme, d’une manière nouvelle et à une profondeur nouvelle, la capacité de souffrir de la sorte, qui est décisive pour son humanité… La foi chrétienne nous a montré que Dieu – la Vérité et l’Amour en personne – a voulu souffrir pour nous et avec nous » (Spe salvi, n° 39).
La jeune stigmatisée, confondue par les marques de prédilection qu’elle porte sur son corps, fait son possible pour les cacher. Mgr Volpi, troublé par ces événements, met souvent la jeune fille à l’épreuve ; il souhaite venir avec un médecin susceptible d’examiner les stigmates. Malgré une lettre de Gemma qui lui enjoint, de la part de Jésus, de venir seul, sans quoi il ne verra rien, il se fait accompagner par un médecin auprès de la jeune fille en extase. Celui-ci nettoie les plaies avec du coton : le sang ainsi absorbé laisse apparaître la peau intacte. Le docteur est formel, il s’agit d’un cas d’hystérie ; la jeune patiente se serait piquée avec des aiguilles. Les proches de Gemma se mettent alors à douter de la réalité des manifestations surnaturelles. La disparition des stigmates devant le médecin est une épreuve pour l’humilité de la jeune femme.
Une fille préférée
Au début de l’été 1899, des religieux passionistes (membres d’une congrégation fondée au xviiie siècle par saint Paul de la Croix) prêchent une mission à Lucques. Gemma constate avec surprise que les Pères portent le même habit que son “Frère Gabriel” ! Elle entend alors dans son cœur Jésus lui demander : « Aimerais-tu revêtir aussi ce même habit ?… Tu seras une fille de ma Passion et une fille préférée ! Un de ceux-là sera ton père. Va et révèle tout ! » La jeune fille se confie à l’un des religieux, qui lui interdit quelques pénitences extraordinaires qu’elle pratique sans permission. Il la met ensuite en relation avec la famille Giannini, où elle sera accueillie et cachée aux yeux du monde. Les époux Giannini, qui ont douze enfants, reçoivent volontiers Gemma chez eux car ils apprécient sa vertu et sa piété. Elle est alors mise en relation avec le Père Germano, religieux passioniste, qui la guidera avec sûreté et fermeté. Gemma lui écrit souvent ; elle lui obéit en tout, allant jusqu’à congédier Jésus, quand le temps d’oraison qui lui a été fixé est achevé. Cette obéissance la protège des illusions diaboliques. Le Père Germano, discernant une vraie vie mystique, laisse avec grand soin le Saint-Esprit œuvrer en elle.
L’existence de Gemma se poursuit, toute d’effacement et d’humbles services : elle participe avec assiduité aux travaux domestiques, raccommode les chaussettes et tient en ordre le linge de chacun. Souvent, l’extase la saisit là où elle se tient ; lorsqu’elle est passée, Gemma continue simplement son travail, en silence. Elle désire ardemment entrer en religion mais en vain : les religieuses passionistes craignent de la recevoir une postulante à la vie spirituelle si extraordinaire. Les démarches qu’elle fait en vue de la fondation d’un couvent de Sœurs passionistes à Lucques n’aboutissent pas davantage. À partir de la Pentecôte 1902, elle tombe malade et cesse de s’alimenter ; la sainte Communion devient sa seule nourriture. C’est une période d’intense “réparation” offerte au Sacré-Cœur, et de particulière intercession pour la sanctification du clergé. Le 21 septembre, apparaissent les premiers symptômes manifestes de la tuberculose pulmonaire. Notre-Seigneur lui révèle qu’elle passera encore par un douloureux calvaire : « J’ai besoin, lui dit-Il, d’une expiation immense, particulièrement pour les péchés et les sacrilèges dont Je Me vois outragé par les ministres du sanctuaire. » Les tourments qu’elle endure pendant plusieurs mois sont indicibles, mais sa patience ne faiblit point. Son amour inconditionnel de Dieu lui permet de voir dans la lumière divine le “scandale du mal” et de la souffrance. En janvier 1903, elle est transférée dans une petite chambre isolée, à cause de la contagion. C’est là qu’elle meurt le 11 avril 1903, Samedi Saint, à l’âge de vingt-cinq ans.
Le couvent des Passionistes de Lucques, dont elle souhaitait ardemment la fondation, est ouvert en 1905, et il reçoit le corps de leur céleste protectrice qui avait prophétisé : « Les Passionistes ne m’ont pas voulue vivante, mais elles m’auront morte. » Le 2 mai 1940, Pie XII a canonisé Gemma Galgani après une minutieuse enquête sur les phénomènes mystiques de sa vie.
Sainte Gemma Galgani, obtenez-nous de Jésus et de Marie la grâce de la patience, par amour de Jésus crucifié !
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