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8 février 2023

John Bradburne

Bien chers Amis,

« Vagabond du Bon Dieu, une belle âme qui aspire à une vie chrétienne parfaite, écrira de John Bradburne le supérieur des Pères de Sion à Louvain (Belgique)… Il n’est pas fait pour la vie religieuse sédentaire et se sent porté plutôt à imiter les exemples d’un saint Benoît-Joseph Labre (un pèlerin sans domicile fixe, du xviiie siècle) ou d’un Père de Foucauld. » Qui est donc cet homme hors du commun qui, après une vie très mouvementée, devint un admirable serviteur des lépreux?

John Bradburne est né le 14 juin 1921 dans le Norfolk (nord-est de l’Angleterre), au petit village de Skirwich. Son père en est le pasteur anglican. Sa mère, Erica, d’une famille modeste, est apparentée à Baden-Powell, le fondateur du scoutisme, et au futur Premier ministre Winston Churchill ; elle a passé sa jeunesse aux Indes, alors colonie britannique, et parle à ses cinq enfants de la misère des lépreux. John, le troisième, l’écoute attentivement. La musique et le chant sont particulièrement à l’honneur à la maison. Jeune enfant, John, qui ne tient pas en place, commence à grimper aux arbres et se plaît à des activités d’exploration de la “montagne” locale. En 1929, il est envoyé en pension à cent kilomètres de là. C’est un désastre : finie la belle liberté du village natal. Objet des brimades de ses camarades plus citadins, il pleure toutes les nuits. Au bout de cinq ans, son père le met dans une autre école, où il est encore plus malheureux. Très révolté, il finit par s’enfuir, et parcourt à pied les quarante kilomètres qui le séparent du presbytère paternel.

Grimper aux arbres

En 1934, son père change d’affectation et inscrit son fils à Holt dans la pension de Gresham, école réputée. John parvient à s’adapter et s’y fait des amis. On apprécie son humour et son talent d’imitation. Il se passionne pour Shakespeare, fait du théâtre, apprend à jouer de divers instruments de musique. Son activité préférée reste de grimper aux arbres et de s’installer sur une haute branche avec un bon livre. Les cours de religion le laissent indifférent, mais il apprend à maîtriser son impulsivité. En 1939, il réussit le concours d’entrée à l’école militaire des officiers. En septembre, l’Angleterre déclare la guerre à l’Allemagne. John est affecté au front asiatique comme sous-lieutenant. En 1941, on lui confie le commandement d’un peloton dans un régiment népalais de Gurkhas, troupes d’élite indigènes. Il s’entend très bien avec ses hommes. Ses excentricités les font rire : il grimpe parfois au sommet d’un grand arbre où il passe des heures à jouer de la flûte : « Crazy English ! » (« ce fou d’anglais ! »), commentent ses camarades.

En décembre de la même année, les Japonais envahissent la Malaisie ; les troupes britanniques reculent. Coupée du reste de l’armée, une partie du régiment de John se disperse dans la jungle ; le capitaine Hart et lui marchent à l’aveuglette pendant un mois. Une forme grave de paludisme terrasse John. Parvenus toutefois sur la côte, les deux hommes réussissent, le 15 février 1942, à atteindre Sumatra. Hospitalisé, entre la vie et la mort, John voit, dans son délire, une dame blanche, qu’il identifiera plus tard comme étant la Vierge Marie. Mais les Japonais approchent : il faut fuir à nouveau. Hart et lui parviennent à Ceylan. De là, John passe à Bombay, en Inde. Ayant recouvré la santé, il est envoyé dans l’Himalaya, à Dehra Dun, pour rejoindre un régiment de Gurkhas. Il s’y lie d’amitié avec John Dove, un jeune catholique anglo-irlandais. Tous deux partagent le goût de la musique, des longues discussions, de la boisson et des femmes. John parlera de ce temps comme de « deux années dissipées, sans profit, dans les clubs, les pubs et les jeux ». Cependant en mai 1943, il écrit à ses parents : « Ma vie est donnée au Christ une fois pour toutes. »

À l’automne de cette année, il rejoint les Chindits, troupes de choc qui doivent être larguées par des planeurs géants en Birmanie afin d’édifier dans la jungle des “forteresses” derrière l’armée japonaise. En mars 1944, John participe à cette grande opération aéroportée. Après de terribles combats, les Japonais commencent à se replier. John a été un soldat efficace et courageux, mais il est épuisé. L’année suivante, il est réformé et rentre en Angleterre, où il refuse de parler de ce qu’il vient de vivre. Comme des milliers de soldats démobilisés, il ne trouve plus sa place dans la société. Il s’éprend pourtant d’Anne Hardwicke et la demande en mariage. Il est embauché, en juin 1946, comme bûcheron. Ce travail lui rend la santé physique et mentale.

John Dove rentre en Angleterre à l’automne 1946, et les deux amis se retrouvent. Bradburne se fait instruire de la foi catholique malgré ses préjugés contre le catholicisme, et fréquente le monastère bénédictin de Buckfast. Il lit l’Apologie de Newman dont l’itinéraire vers Rome lui sert de guide. Son père l’envoie consulter un clergyman qu’il juge très sûr, le révérend Paul Osborne. Celui-ci l’informe qu’il est lui-même sur le seuil de l’Église Romaine, et il lui apprend à réciter le chapelet. Après une nuit de discussions, John prend sa décision et, le 26 octobre 1947, dimanche du Christ-Roi, il est reçu dans l’Église catholique puis fait sa première Communion. Osborne deviendra catholique sept ans après.

Chercher la vérité

À la suite de Newman et de bien d’autres anglicans, John a reconnu que l’Église catholique est vraiment l’Église fondée par Jésus-Christ. En effet, « Dieu a lui-même fait connaître au genre humain la voie par laquelle, en le servant, les hommes peuvent obtenir le salut et le bonheur dans le Christ. Cette unique vraie religion, nous croyons qu’elle subsiste dans l’Église catholique et apostolique à laquelle le Seigneur Jésus a confié le mandat de la faire connaître à tous les hommes, lorsqu’il dit aux Apôtres : Allez donc, de toutes les nations faites des disciples, les baptisant au nom du Père, et du Fils, et du Saint-Esprit, et leur apprenant à observer tout ce que je vous ai prescrit (Mt 28, 19-20). Tous les hommes, d’autre part, sont tenus de chercher la vérité, surtout en ce qui concerne Dieu et son Église ; et, quand ils l’ont connue, de l’embrasser et de lui être fidèles » (Concile Vatican II, Déclaration Dignitatis humanæ, n° 1).

Bientôt, se pose pour John la question d’une vocation monastique. Aussi Anne et lui renoncent-ils à leur projet de mariage ; cette rupture se fait sans heurt et ils resteront amis. Toutefois, en tant que nouveau converti, il doit attendre deux ans avant de pouvoir entrer au monastère. Au printemps de 1948, John accepte donc un poste d’enseignant dans une école catholique. Il commence à écrire des poèmes et découvre saint François d’Assise qui l’enthousiasme. Au début de 1949, son ami John Dove lui annonce son entrée chez les Jésuites. En juin, Bradburne quitte l’école et demande la main d’une collègue, Margaret Smith, de douze ans son aînée, qui refuse ce mariage. À l’abbaye de Buckfast, on ne veut plus l’accueillir comme postulant. John Dove l’invite alors à faire un pèlerinage à Lourdes pour guérir “son cœur malade” ; il en gardera une forte impression. En février 1950, il se fait recevoir comme portier à la chartreuse de Parkminster, où il reste six mois. L’empreinte de ce séjour le marque pour toujours. En septembre, il part en pèlerinage à Rome, tous frais payés par un diamantaire juif ; il voit là un signe d’une vocation missionnaire auprès du peuple juif. Il poursuit jusqu’en Terre Sainte où il reste sept semaines à Jérusalem, à la Maison Saint-Pierre des Pères de Sion (congrégation fondée au xixe siècle par le Père Théodore Ratisbonne, juif converti, pour l’évangélisation des juifs). Le supérieur croit distinguer en lui une vocation pour son Institut, et il l’envoie au noviciat de Louvain en Belgique. Là, John se rend souvent dans une église proche pour prier sur la tombe du Père Damien de Veuster, l’apôtre des lépreux. En octobre 1951, il commence des études de philosophie, mais confie au supérieur qu’il ne se voit pas prêtre.

« Il n’était pas fou ! »

À la fin du printemps de 1952, John veut repartir en Terre Sainte ; toutefois, il se rend d’abord à Assise. Ne trouvant pas de passage gratuit pour Israël, il se fait embaucher comme sacristain dans une paroisse du sud de l’Italie où le curé l’apprécie beaucoup. En février de 1953, John fait le vœu privé de chasteté. Son père lui avait écrit pour Noël : « C’est une grande joie pour moi de savoir que tu es heureux et que tu vas bien, avec tes pieds en sécurité sur le chemin que, dans mon vieil âge, j’en viens à voir de plus en plus clairement comme le chemin de Dieu pour toi. » Au mois de mai suivant, ce père meurt et, en septembre, John rentre en Angleterre pour assister sa mère. Il séjourne d’abord en famille puis s’installe en ermite dans une cabane. La supérieure d’une communauté de Sœurs maristes auxquelles il rend quelques services, dira de lui : « Il faisait le fou, mais ne l’était pas du tout ; c’était pour lui une façon de déguiser sa vie spirituelle profonde. »

Sur le conseil de John Dove, il demande à entrer à l’abbaye bénédictine de Prinknash. D’abord ravi, il ne s’adapte pas à la vie des moines, trop réglée pour lui. Quatre mois plus tard, il rentre à Londres. En janvier 1957, il est pris comme cinquième sacristain à la cathédrale catholique de Westminster. Quelques mois après, l’archevêque Mgr Godfrey, avec lequel il a des entretiens spirituels, lui demande de devenir le gardien de sa résidence de campagne. Mais, en janvier 1961, nommé cardinal, l’archevêque entreprend des travaux pour transformer la résidence en maison d’accueil ; John finit par s’en aller. Le Père Dove, devenu missionnaire en Rhodésie (aujourd’hui le Zimbabwe), lui propose de rendre des services dans les missions franciscaines de la brousse. Le 6 août 1962, John est accueilli par son ami à l’aéroport de Salisbury. Le calme apparent de la colonie, où 5 % d’Européens possèdent la moitié des terres et tout le pouvoir, est trompeur. La Rhodésie prépare son indépendance par rapport à la Grande-Bretagne, sous un régime d’apartheid dominé par les Blancs. Les missions franciscaines sont des oasis de convivialité. Une de leurs tâches primordiales est d’aider les Africains à prendre en mains, dans un esprit chrétien et sans perspective de vengeance, la destinée de leur pays.

Le 11 août 1962, John est envoyé dans une mission tenue par des franciscains irlandais à Wedza, à 160 km au sud de la capitale, Salisbury. Le 4 octobre, le Père Gilda l’emmène fonder un nouveau secteur de mission assez loin dans la brousse. John se révèle un excellent coadjuteur qui s’attache, par sa bonne humeur, tant les Noirs que les Blancs. Au début de 1963, il accompagne un autre missionnaire, le Père Pascal Slevin, qui ouvre, lui aussi, une nouvelle mission. Malgré son manque de sens pratique, il participe à la construction de la maison et de la première chapelle. Cependant, la situation du pays se dégrade ; les colons blancs déclarent unilatéralement l’indépendance du pays, tout en renforçant leur domination, et l’on voit apparaître un front anti-apartheid noir, armé par la révolution internationale. S’ensuivent attentats et représailles du gouvernement.

Sympathique trait d’union

En 1964, les jésuites offrent à John le gardiennage d’une grande maison à M’bébi, au nord de Salisbury, qu’ils veulent transformer en noviciat. Il y vit en ermite. De juillet 1964 à février 1965, il anime des émissions mensuelles télévisées sur des sujets bibliques. Le Père Dove organise alors à Silveira House, près de Salisbury, des ateliers de formation professionnelle, réservés aux Noirs. John le rejoint en décembre 1964, et se fait apprécier comme un sympathique trait d’union entre les jésuites et les indigènes. Là, il fait la connaissance de Luisa Guidotti, missionnaire laïque et médecin. En 1967, une paroisse de Salisbury décide de monter pour Pâques une pièce de théâtre sur la Passion du Christ, “L’homme né pour être roi”. John y joue le rôle de Jésus. La pièce a un grand succès.

En décembre 1968, Bradburne entend parler pour la première fois d’une colonie de lépreux qui connaît des difficultés de gestion, située à Mutemwa, à 160 km à l’est de Salisbury. La léproserie, que surplombe le mont du Chigona, a été fondée en 1937 et a compté près de deux mille lépreux, mais la plupart ont été renvoyés dans leurs familles. John s’y rend en mars 1969. Le responsable du “Comité des Amis de Mutemwa”, association qui patronne la léproserie, lui offre le poste de directeur, qu’il refuse, se sentant incapable. Pour le convaincre, on lui explique que, s’il ne prend pas en main la colonie, personne ne le fera. Il s’installe donc, en août 1969, au milieu des lépreux : « Je suis un marginal et ils sont des marginaux ; nous nous comprendrons », écrit-il au Père John Dove. Le premier contact est pourtant effrayant : quelque quatre-vingts personnes au visage et aux membres déformés, aux plaies non soignées, habitent des cases misérables et sont dans un état de grande saleté ; ils souffrent de malnutrition et la plupart sont affectés d’autres maladies. À force d’être maltraités, ces lépreux sont devenus méfia nts. Mais bientôt, la gentillesse et la bonne humeur de John les gagnent. Il accompagne les mourants, ce qui touche tout le monde. La partie médicale des soins est assurée par trois vierges consacrées italiennes de la mission “All Souls” ; elles viennent chaque semaine et laissent médicaments et instructions pour John. Mais celui-ci se montre fantaisiste et, à partir de décembre 1969, le docteur Luisa Guidotti s’efforce de le former. Unis par la foi en Jésus-Christ et l’amour des lépreux, tous deux deviennent de bons amis. Les dimanches, si l’aumônier ne vient pas, John anime le service religieux pendant une heure et demie, et use de l’autorisation qu’il a reçue de distribuer la sainte Communion. Dans ses temps libres, il monte au sommet de la colline, pour prier et écrire des poèmes. Le Père Dove, son confesseur habituel, lui rend souvent visite.

Un malheureux conflit

Toutefois, dès 1970, commence un conflit avec les éleveurs du lieu qui laissent leurs bêtes saccager le potager de la léproserie. En 1971, le “Comité des Amis de Mutemwa” se transforme en “Association rhodésienne contre la lèpre”, et une femme médecin visite le centre. Impressionnée par les résultats obtenus par John, elle exige pourtant qu’il tienne une comptabilité rigoureuse ; à sa surprise, celui-ci obtempère et lui envoie des registres bien tenus. Elle entre avec lui en dissension sur un autre plan : estimant que les lépreux ne doivent pas avoir d’enfants, elle demande qu’on donne systématiquement aux femmes la pilule contraceptive. John refuse.

Le Pape Jean-Paul II confirmera la justesse de la position prise par John Bradburne sur la contraception : « L’Église condamne comme une grave offense à la dignité humaine et à la justice toutes les activités des gouvernements ou des autres autorités publiques qui essaient de limiter en quelque manière la liberté des conjoints dans leurs décisions concernant les enfants… Toute violence exercée par des autorités en faveur de la contraception, voire de la stérilisation ou de l’avortement provoqué, est à condamner absolument et à rejeter avec force. » Et le Pape explique : « Lorsque les époux, en recourant à la contraception, séparent les deux significations (union et ouverture à la procréation) que le Dieu créateur a inscrites dans l’être de l’homme et de la femme comme dans le dynamisme de leur communion sexuelle…, ils manipulent et avilissent la sexualité humaine…, en altérant la valeur de leur donation totale… En revanche lorsque les époux, en observant le recours à des périodes infécondes, respectent le lien indissoluble entre les aspects d’union et de procréation de la sexualité humaine, ils se comportent comme des ministres du dessein de Dieu… La différence anthropologique et en même temps morale existant entre la contraception et le recours aux rythmes périodiques, est beaucoup plus importante et plus profonde qu’on ne le pense habituellement… ; elle implique deux conceptions de la personne et de la sexualité humaine irréductibles l’une à l’autre » (Jean-Paul II, Exhortation Familiaris consortio, 22 novembre 1981, nos 30, 32).

En 1972, William Ellis, catholique ayant quitté l’Église, entre dans “l’Association rhodésienne contre la lèpre” avec des sentiments hostiles à l’action de John. Le dévouement de celui-ci ne se ralentit pourtant pas ; on le verra même porter sur son dos un lépreux jusqu’au dispensaire distant de plusieurs kilomètres. Il a l’art de valoriser les malades en les faisant jouer, chanter et collaborer aux tâches de l’établissement. Il sait aussi les réprimander quand il le faut, surtout en matière d’alcoolisme et de promiscuité. Il se fait toutefois davantage aimer des lépreux par son amour et son respect de chacun ; il les considère comme un don de Dieu. Sachant que « l’Église ne connaît pas d’autre moyen que le Baptême pour assurer l’entrée dans la béatitude éternelle » (CEC, n° 1257), John le propose avec douceur aux non-chrétiens, sans les forcer. Les lépreux comprennent que leur personne et leur destinée éternelle comptent aux yeux de ce Blanc venu vivre avec eux, à la fois ermite et serviteur des plus pauvres.

Un refus indigné

De nombreux visiteurs de Mutemwa sont vivement impressionnés et spirituellement transformés par leur rencontre avec John et les lépreux. Pourtant Ellis lui demande de diminuer les rations de nourriture et de mettre une plaque d’identification au cou de chaque lépreux. John refuse avec indignation : les lépreux ne sont pas du bétail. Le comité décide son expulsion. Le 1er mai 1973, John s’éloigne et s’installe au sommet du Chigona, où il reste six mois. Tous les matins, il redescend pour donner la Communion aux lépreux. Lorsque l’un d’eux est mourant, il se glisse de nuit entre les cases pour passer des heures à l’assister. Les désordres du nouveau directeur entraînent le retrait des sœurs soignantes italiennes, puis du docteur Luisa Guidotti. Le suivi médical est interrompu, ainsi que l’envoi des colis de médicaments en provenance d’Italie. Dans le même temps, la guerre civile s’intensifie. La police, qui l’estime, permet à John de résider dans une case, à cent mètres du centre.

Le 28 juin 1976, le docteur Luisa Guidotti est arrêtée pour n’avoir pas dénoncé des rebelles. Elle est finalement acquittée. Mais plusieurs missionnaires, qui aidaient pourtant les populations indigènes, sont massacrés. En août 1978, John, frappé d’une encéphalite aiguë, est sauvé par le docteur Luisa Guidotti. Le 6 juillet 1979, celle-ci meurt, atteinte par une rafale de mitraillette à un barrage de police (son procès de béatification a été introduit). En 1979, malgré des négociations de paix entre les deux camps, les combats continuent. Dans la nuit du 2 au 3 septembre, John est saisi par une douzaine d’hommes armés et livré à de jeunes rebelles, qui l’abreuvent d’outrages. Le soir du 4 septembre, le commandant des rebelles communistes de la zone déclare John innocent et propose de l’expulser au Mozambique. John répond qu’il ne peut pas abandonner ses lépreux. Le 5 septembre au matin, il se met en route avec des paysans qui rentrent dans leurs villages. Deux jeunes guérilleros les accompagnent. Lors du passage d’un ruisseau, ils entraînent John en contrebas et l’un d’eux vide dans son dos le chargeur de son arme. John tombe, mort. Le lendemain, un missionnaire, le Père David Gibbs, trouve le corps. Le journal local annonce : « L’ami des lépreux a été tué… C’était un homme de Dieu, entièrement bon ; il a donné toute sa vie pour les lépreux qui l’aimaient beaucoup ; c’était aussi un excellent poète. » Le 10 septembre, on se presse dans la cathédrale de Salisbury pour ses obsèques, mais aucun lépreux de Mutemwa n’a pu venir. Deux ans auparavant, le provincial des franciscains avait fait parvenir à John son propre habit car, disait-il, « il est plus franciscain que nous tous réunis ». John Bradburne est enterré avec cet habit auquel il tenait beaucoup, en tant que tertiaire de l’Ordre.

« Je n’ai pas d’argent, mais j’aime Dieu, je me réjouis en Lui », faisait chanter John Bradburne. Le 30 avril 2019, la conférence épiscopale du Zimbabwe a décidé d’ouvrir sa cause de béatification. « Que son amour du Christ et de Marie sa mère, dans son service dévoué de ceux qui sont considérés comme les moindres dans le monde, nous soit un modèle à suivre! » demande-t-on dans la prière pour obtenir cette béatification.

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