8 août 2018
Bienheureux Laurent Salvi
Bien chers Amis de l’abbaye Saint-Joseph,
«Toi, homme de Dieu, tu as toujours tendu vers la justice, la piété, la foi, la charité, la patience et la douceur. Tu as combattu le bon combat de la foi (cf. 1 Tm 6, 11-12). Dans ce programme, donné par saint Paul à son disciple Timothée, nous pouvons voir l’annonce de l’itinéraire spirituel du bienheureux Laurent Salvi, homme de Dieu non seulement par son intense prière, mais aussi dans l’infatigable dévouement au ministère sacerdotal. Il avait une pleine conscience de la mission confiée par le Christ à tout apôtre, et il s’efforça toute sa vie de suivre les exemples du Fils de Dieu qui voulut sauver le monde au moyen de l’humiliation de la Croix » (Homélie du Pape saint Jean-Paul II lors de la béatification, le 1er octobre 1989).
Laurent Salvi naît à Rome en 1782, et il reçoit le Baptême au lendemain de sa naissance. Son père, Antonio Salvi, est l’administrateur des biens d’une des plus grandes familles de Rome. La mère de Laurent meurt un mois après la naissance de l’enfant. Antonio Salvi se remarie bientôt avec Anna Maria Costa ; ils auront d’autres enfants, et Laurent n’apprendra qu’au début de l’âge adulte qui était sa véritable mère. Son éducation se fait sous la direction des précepteurs du palais Carpegna ; il fréquente la proche église Saint-Eustache, où il aime à servir la Messe. Parmi les ecclésiastiques qui fréquentent le palais, on compte dom Mauro Capellari, moine camaldule qui deviendra Pape en 1831, sous le nom de Grégoire XVI. Laurent poursuit ses études au Collège Romain, alors dirigé par des prêtres séculiers. Il a pour condisciple Gaspard del Bufalo, fondateur de la Compagnie du Précieux-Sang, qui sera canonisé par le Pape Pie XII en 1954. Laurent fréquente aussi l’oratoire du Caravita, fondé par les Jésuites, où il acquiert une profonde dévotion mariale. Il prend également l’habitude de visiter, avec quelques amis, les principaux sanctuaires de la Ville.
À dix-huit ans, Laurent demande à son père la permission d’entrer chez les Passionistes, qu’il a connus grâce aux prédications enflammées de saint Vincent-Marie Strambi, alors célèbre à Rome. Cette congrégation est en pleine ferveur ; beaucoup de religieux ont connu le fondateur, saint Paul de la Croix, mort en 1775, et plusieurs seront élevés aux honneurs des autels. Malgré sa profonde foi chrétienne, Antonio Salvi répond à son fils : « Pendant un an, je ne veux pas entendre parler de vocation de religieux ni même de prêtre. » La ville de Rome, en effet, sort tout juste de plusieurs années d’occupation par les troupes françaises, et le Pape Pie VI, déporté, est mort en France, à Valence, le 29 août 1799 ; devenir séminariste ou religieux dans ces conditions n’est pas sans danger. Un an, jour pour jour, après cette première réponse négative, Laurent réitère sa demande. Après un moment de réflexion, son père lui dit : « Si tel est ton désir, fais ce que le Seigneur te demande, et quoi qu’il t’arrive, rappelle-toi que cette maison sera toujours celle de ton père à toi. Que le Seigneur te bénisse ! »
Toutes les minutes
Laurent gagne donc le couvent des Passionistes du Monte Argentario, au sud de la Toscane, où il doit accomplir son noviciat. Au moment de le commencer, Laurent se met sous la protection de l’Apôtre des Indes et prend pour nom de religieux Frère Laurent-Marie de Saint-François-Xavier, marquant ainsi par avance le caractère résolument marial et missionnaire de son apostolat. Mais bientôt, il est assailli par une grave tentation de découragement au sujet de sa vocation religieuse. Son maître des novices l’aide à surmonter l’épreuve, et, le 20 novembre 1802, il prononce les vœux de pauvreté, chasteté et obéissance, auxquels s’ajoute le quatrième vœu, propre aux Passionistes, de promouvoir la dévotion à la Passion de Jésus. À cette occasion, Laurent compose la prière suivante, qu’il récitera avec ferveur à chaque anniversaire de sa première profession :
« Faites, ô Seigneur, que je vous serve fidèlement en cette sainte congrégation, tous les jours de ma vie. Vraiment, Vous êtes digne d’être servi de toutes les manières, digne de tous les honneurs et de la louange éternelle. Vous êtes vraiment mon Seigneur et mon Patron, et moi je suis votre pauvre serviteur, tenu à vous servir de toutes mes forces. C’est ce que je veux, c’est ce que je désire… Ô Sainte des saints, océan de grâce, Très Sainte et Immaculée Vierge, Mère de Dieu, obtenez-moi la force d’accomplir parfaitement en ce jour ce que j’ai promis à votre Fils. Dirigez-moi et protégez-moi à chaque heure et chaque minute. »
Saint Paul de la Croix, fondateur des Passionistes, est né en 1694. En 1721, il se retire, en compagnie de son frère, dans un ermitage où ils s’adonnent avec ferveur à la prière. En 1727, tous deux se rendent à Rome pour soigner les malades, et ils prêchent de fructueuses missions paroissiales centrées sur le mystère de la Passion du Christ. Ils inaugurent ainsi le genre de vie des Passionistes, qui allie la dimension contemplative stricte et la prédication. Par la force qu’il puise dans un continuel cœur-à-cœur avec Jésus, le fondateur est prêt à enflammer les cœurs des hommes de cet amour qui l’habite. En 1775, dans la règle qu’il donne à ses religieux, il écrit : « Comme une des principales fins de notre congrégation est, non seulement de nous adonner à l’oraison afin de nous unir à Dieu par la charité, mais aussi de conduire notre prochain à cette même union en l’y introduisant par une méthode aussi opportune et accessible que possible, nos religieux apprendront aux âmes à méditer sur les mystères, les souffrances et la mort du Christ. »
Sauvés par la Croix
Le 14 septembre 2008, le Pape Benoît XVI rappelait que Jésus nous sauve par le mystère de sa Passion : « Le Fils de Dieu s’est fait vulnérable, prenant la condition de serviteur, obéissant jusqu’à la mort et la mort sur une croix. C’est par sa Croix que nous sommes sauvés.
L’instrument du supplice qui manifesta, le Vendredi Saint, le jugement de Dieu sur le monde, est devenu source de vie, de pardon, de miséricorde, signe de réconciliation et de paix. “Pour être guéris du péché, regardons le Christ crucifié !”, disait saint Augustin. En levant les yeux vers le Crucifié, nous adorons Celui qui est venu enlever le péché du monde et nous donner la Vie éternelle. Et l’Église nous invite à élever avec fierté cette Croix, pour que le monde puisse voir jusqu’où est allé l’amour du Crucifié pour les hommes… C’est sur ce bois que Jésus nous révèle sa souveraine Majesté, nous révèle qu’Il est exalté dans la gloire. Oui, venez, adorons-Le ! »
Après ses études de philosophie et de théologie, Laurent Salvi est envoyé à Rome, au couvent des Saints-Jean-et-Paul pour se préparer au sacerdoce qu’il reçoit le 29 décembre 1805. En juillet 1809, le Pape Pie VII, qui n’a pas voulu accepter le divorce de Napoléon, est enlevé par les troupes du général français Radet. L’année suivante, un décret supprimant les ordres religieux, assorti d’une obligation pour les prêtres d’émettre un serment schismatique de fidélité à l’empereur, oblige le Père Salvi à exercer clandestinement son ministère pastoral dans Rome. En 1811, apprenant qu’une communauté de Passionistes s’est reconstituée discrètement dans un ancien couvent d’Augustins à Pieve Torina, petite ville d’Italie centrale, il s’y rend sans tarder, et éprouve une grande joie à reprendre la vie commune avec ses frères en religion. Se faisant tout à tous, le Père Laurent en vient même, à la demande des habitants du pays, à se faire instituteur dans l’école primaire du bourg, avec un grand succès parmi les enfants. En 1812, une apparition de l’Enfant Jésus le guérit d’une grave maladie, et lui donne une connaissance profonde et intime des mystères de l’enfance du Sauveur. Sa vie et son apostolat en sont profondément changés ; il fera même le vœu de propager la dévotion envers l’Enfant Jésus.
Dieu fait petit enfant
«En ce temps de Noël, disait le Pape François lors de l’audience du 30 décembre 2015, nous nous retrouvons devant la crèche. La dévotion à l’Enfant Jésus est très répandue. Je pense en particulier à sainte Thérèse de Lisieux qui a voulu porter le nom de Thérèse de l’Enfant-Jésus et de la Sainte-Face. Elle a su vivre et témoigner de l’enfance spirituelle qui s’assimile en méditant, à l’école de la Vierge Marie, l’humilité de Dieu qui, pour nous, s’est fait petit. Que Dieu se soit fait petit enfant doit avoir un sens particulier pour notre foi. Il est vrai que nous connaissons peu de choses sur l’enfance de Jésus. Mais nous pouvons apprendre beaucoup de Jésus enfant si nous regardons la vie des enfants. Nous découvrons d’abord que les enfants veulent notre attention. Ils doivent être au centre parce qu’ils ont besoin de se sentir protégés. Il est donc nécessaire de mettre Jésus au centre de notre vie et de savoir, même si cela peut sembler paradoxal, que nous avons la responsabilité de le protéger. Il veut être entre nos bras et pouvoir fixer son regard sur le nôtre. Prenons l’Enfant Jésus entre nos bras et mettons-nous à son service, pour lui montrer notre amour et notre joie. Il est venu parmi nous pour nous montrer le visage du Père riche d’amour et de miséricorde. »
En 1814, l’empire napoléonien s’écroule ; le Souverain Pontife rentre à Rome, les décrets contre les religieux sont annulés, les communautés religieuses se reconstituent. Laurent rejoint alors le couvent des Saints-Jean-et-Paul. Mais, sur les 243 membres que comptait la congrégation avant la tourmente révolutionnaire, 151 seulement reprennent la vie régulière. Désormais, le Père Salvi, tout en laissant la première place dans sa vie à une prière nourrie et profonde, se livre à une intense activité de prédication de retraites et de missions, à la correspondance, à la direction des âmes, à l’édition d’opuscules de dévotion… Loin d’improviser ses prédications, il les prépare soigneusement, comme en témoignent ses nombreux cahiers de notes et d’homélies.
L’œuvre littéraire principale de Laurent Salvi s’intitule : “L’âme, amoureuse de Jésus Enfant”. Il y écrit : « Voici donc où nous voudrions conduire tout le peuple chrétien, voici la douce invite que l’on fait à tous les fidèles catholiques : être amoureux de Jésus Enfant. Ainsi, ayant continuellement devant les yeux les exemples des vertus que, dès la crèche, il nous enseigne, qu’ils se mettent à sa suite pour ramener sur le droit chemin les âmes égarées et servir de modèles à celles qui progressent. Autant les unes que les autres peuvent être sûres qu’en suivant les traces de ce céleste petit Enfant, elles ne pourront dévier du sentier qui conduit à la vie éternelle. Elles acquerront ce précieux caractère de l’enfance spirituelle dont Jésus Rédempteur veut que soient dotés ceux qui aspirent au Paradis : Si vous ne devenez comme de petits enfants, vous n’entrerez pas dans le Royaume des cieux (Mt 18, 3). Cette invitation à mettre tout son cœur à honorer assidûment l’enfance de Jésus-Christ ne doit sembler étrange à personne. En effet, si le zèle de tant de prêtres et religieux fervents à promouvoir dans le peuple chrétien la mémoire continuelle de la Passion et de la Mort de Jésus est très louable, comment ne serait-il pas aussi recommandable d’exciter les fidèles à se souvenir assidûment de sa naissance dans la grotte de Bethléem ? C’est là que le Verbe incarné ouvrit la première école publique de toutes les vertus. C’est là que tout ce qui entoure le saint Enfant gisant sur la paille crie à nos oreilles, selon ce qu’écrit saint Bernard : “Sa langue ne parle pas encore, mais tout ce qui l’entoure crie. L’étable crie ; la mangeoire crie ; ses larmes crient ; ses langes crient. Ses petits membres eux-mêmes ne cessent pas de crier, alors cependant que son enfance se tait.” »
Un religieux trop actif
Mais les épreuves ne manquent pas à Laurent. Dans sa communauté, on ne comprend pas toujours qu’il soit si actif, si souvent absent du couvent, et on s’étonne de voir un religieux voué à la contemplation de la Passion axer autant sa prédication sur la dévotion à l’Enfant Jésus. « Il ne se conforme pas aux usages communs de la congrégation ! », affirment certains. Toutefois, les résultats de son apostolat sont là pour montrer qu’il ne s’agit pas d’un activisme effréné mais bien de l’œuvre de Dieu sous la motion de l’Esprit Saint. Dans de nombreux villages et bourgs du Latium et de la Toscane, le souvenir de ses prédications et de ses miracles demeure vif. Au bourg de Vignanello, sa parole obtient la fin de plusieurs scandales, d’importantes restitutions et la solution d’anciens conflits de familles par des pardons chrétiens ; en outre, dix-sept jeunes gens demandent à être admis chez les Passionistes. À Marina, au sud de Rome, on déplorait des haines ancestrales entre plusieurs familles, assorties de bagarres et même de meurtres ; la prédication de Laurent entraîne la réconciliation publique de 200 personnes, ce qui produit un effet d’apaisement sur l’ensemble de la population. Dans une petite ville de 2000 habitants, après une semaine de mission, tous, sauf trois personnes, s’approchent avec dévotion des sacrements. En 1829 et 1830, le Père Salvi exerce son apostolat principalement à Rome. Il y prêche une mission aux 209 détenus du château Saint-Ange, qui est alors une prison ; une autre retraite est consacrée aux chapelains, médecins et infirmiers de l’hôpital Saint-Jean près du Latran. Son zèle va jusqu’à accepter de préparer lui-même les enfants de Rome à la première Communion.
L’admirable zèle sacerdotal de Laurent Salvi illustre par avance les recommandations faites par le Pape Benoît XVI, le 10 mai 2010 : « Chers prêtres, paissez le troupeau de Dieu qui vous est confié, veillant sur lui, non par contrainte, mais de bon gré… en devenant les modèles du troupeau (1 P 5, 2-3). N’ayez donc pas peur de guider vers le Christ chacun des frères qu’Il vous a confiés, certains que chaque parole et chaque comportement, s’ils découlent de l’obéissance à la volonté de Dieu, porteront du fruit ; sachez vivre en appréciant les qualités et en reconnaissant les limites de la culture dans laquelle nous vivons, dans la ferme certitude que l’annonce de l’Évangile est le plus grand service que l’on puisse rendre à l’homme. En effet, il n’y a pas de bien plus grand dans cette vie terrestre que de conduire les hommes à Dieu, réveiller la foi, sauver l’homme de l’inertie et du désespoir, donner l’espérance que Dieu est proche et qu’il guide notre histoire personnelle et celle du monde : tel est, en définitive, le sens profond et ultime du devoir de gouverner que le Seigneur nous a confié. Il s’agit de former le Christ dans les croyants, à travers le processus de sanctification qui est conversion des critères, de l’échelle des valeurs, des comportements, pour permettre au Christ de vivre dans chaque fidèle. Saint Paul résume ainsi son action pastorale : Mes petits enfants, vous que j’enfante à nouveau dans la douleur jusqu’à ce que le Christ soit formé en vous (Ga 4, 19). »
Au couvent des Saints-Jean-et-Paul, où il réside, Laurent se lie d’amitié avec le bienheureux Dominique Barberi, lui aussi Passioniste, qui s’adonnera à un important apostolat dans le nord de l’Europe. Il aurait souhaité l’accompagner dans ses missions, mais l’obéissance à ses supérieurs le retiendra en Italie. Entre-temps, tous deux nouent une étroite relation d’amitié avec les membres de la communauté anglaise de Rome, où se trouve Patrick Wiseman, futur cardinal de l’Église Romaine.
Ce n’est rien !
La spiritualité de Laurent est marquée à la fois par la force et la douceur. Sa parole marque profondément ses auditeurs parce qu’elle est fondée sur une expérience personnelle de Dieu et de la vie spirituelle. De petite taille, très vif, avec des talents et des goûts artistiques développés, Laurent se fait vite remarquer par sa grande humilité, sa simplicité, sa douceur et son obéissance aux supérieurs et à la Règle, qu’il s’efforce d’observer même au cours de ses voyages. Le soir de Noël 1840, alors qu’il est supérieur de la maison des Saints-Jean-et-Paul à Rome, Laurent décide de faire une petite crèche, avec l’aide de deux confrères. Le travail est en cours lorsque arrive, sans explication, l’ordre du supérieur général de suspendre toute décoration. Les frères sont tentés de murmurer, mais Laurent leur dit, avec sa douceur habituelle : « Faisons ainsi ; sainte obéissance, sainte obéissance ! » Son intense vie spirituelle comporte aussi des phénomènes mystiques. Surpris en état de lévitation dans l’église du couvent du Saint-Ange, à Viterbe, il répond à ceux qui l’interrogent : « Ce n’est rien. N’en parlez pas ! » Il est aussi parfois gratifié du don de lire dans les consciences et de connaître certains événements futurs ou à distance. Plusieurs témoins assurent avoir vu l’Enfant Jésus présent dans sa chambre. De plus en plus, on l’appelle “le saint”. Un jour, à Viterbe, il se tourne vers une dame et lui dit : « Écoutez ces gens ! Je suis un scélérat, et ils disent : “Voici le saint !” »
Laurent opère de nombreux miracles en présentant l’image de Jésus Enfant. Un cahier d’archives des Passionistes sur les missions entre 1828 et 1870 contient le récit de cinq guérisons miraculeuses obtenues par son intercession auprès de l’Enfant Jésus. On y lit notamment qu’une moniale, à la suite d’un accident vasculaire grave, avait perdu l’usage d’une jambe ; notre passioniste la guérit par le contact d’une image de l’Enfant Jésus. Une femme de Viterbe souffre d’une forte maladie de cœur qui la rend invalide ; sachant que Laurent doit passer dans une maison proche, elle s’y fait porter. Là, une foule considérable attend le Père. Lorsque celui-ci arrive à son niveau, il s’arrête ; il lui révèle de quel mal elle souffre et ajoute : « Que l’Enfant Jésus vous libère de cette terrible maladie ! », puis il la bénit. La femme est immédiatement et définitivement guérie. Une autre fois, une mère lui présente son enfant malformé, sourd, muet et aveugle. Le missionnaire le caresse longuement puis dit à la mère de le poser à terre en lui assurant qu’il ne lui arrivera rien de mal. L’enfant s’écrit alors : « Maman, maman, je vois ! » En 1855, il obtient la fin d’une épidémie de choléra à Viterbe, grâce à un triduum solennel en l’honneur de l’Enfant Jésus. Les guérisons spirituelles opérées par Laurent sont encore plus nombreuses, comme en témoigne son immense correspondance.
Tirer la charrette
Les années 1842 à 1845 sont l’occasion d’un travail incessant : vingt retraites et sept missions populaires. En 1847, son apostolat extérieur est si intense qu’il ne passe que vingt-sept jours en communauté. Dans les dernières années de sa vie, Laurent est atteint d’une maladie nerveuse qui lui procure de nombreuses souffrances. Il se rappelle la précarité de la vie, et purifie ses intentions ; il avoue : « Malgré la fatigue, je continue à tirer la charrette ; tout le mérite en revient à l’Enfant Jésus qui me soutient fortement. » En février 1854, un accident cardio-vasculaire le met à terre pendant quelques heures. Néanmoins, au mois de mai, il est en mesure de participer au chapitre général de sa congrégation ; là, on le nomme une nouvelle fois conseiller provincial. En avril 1855, il évite de peu un grave accident, qui lui laisse tout de même une blessure au bras. Deux mois plus tard, le 10 juin, il est appelé à Capranica, à quelques kilomètres au sud de Viterbe, pour bénir les malades et administrer les sacrements à quelques malheureux. En quittant son couvent, il affirme au frère portier : « Je pars, mais je ne reviendrai pas ; je vais mourir à Capranica. » Le 12 au matin, il célèbre la Messe, écrit quelques lettres, visite des malades, puis se retire dans sa chambre. Vers le soir, la maîtresse de maison, alertée par des bruits curieux, pénètre dans sa chambre et le trouve debout, dans un état grave. Le médecin diagnostique un ictus cérébral ; Laurent reçoit les derniers sacrements. Le soir, presque sans agonie, il rend son âme à Dieu.
« Laurent Salvi combattit le bon combat de la foi, selon l’esprit de sa congrégation religieuse, travaillant intensément dans la prédication des missions au peuple, dans les retraites, dans le ministère de la confession. À tous ceux qu’il approchait, il cherchait à transmettre l’amour du Christ pauvre et humble, moyennant la propagation de la dévotion à l’Enfant Jésus et à la Passion de Notre-Seigneur, temps où se révèlent au maximum l’humilité et la douceur du Sauveur. Convaincu de l’infinie miséricorde du Cœur du Christ, il ne se lassait pas d’exhorter les âmes à la confiance, à l’exemple du petit enfant qui se confie pleinement aux bras forts et aimants de son père » (Saint Jean-Paul II, Homélie de la béatification). Que l’Enfant Jésus soit aussi la joie et l’amour de nos cœurs !
Pour publier la lettre de l’Abbaye Saint-Joseph de Clairval dans une revue, journal, etc. ou pour la mettre sur un site internet ou une home page, une autorisation est nécessaire. Elle doit nous être demandée par email ou sur la page de contact.