27 janvier 2010
Bienheureuse Émilie de Villeneuve
Bien chers Amis de l’abbaye Saint-Joseph,
Binta, une adolescente africaine musulmane, vit en Guinée. Un jour de l’année 1994, elle avale de la soude caustique. Transportée à Barcelone, en Espagne, elle est sauvée par une opération, puis hébergée dans une résidence des «Soeurs Bleues». Mais bientôt, les médecins découvrent un ulcère énorme, une péritonite et une hémorragie stomacale. En dépit d’une nouvelle et longue opération, le pronostic est net: «Il n’y a plus rien à faire», affirme une infirmière. On prépare même le certificat de décès. Les Soeurs Bleues commencent une neuvaine à leur fondatrice, Émilie de Villeneuve, et placent dans la main de la jeune fille le portrait d’Émilie ainsi qu’une de ses reliques. Soudain, Binta ouvre les yeux et, sans explication médicale, se rétablit promptement. Après vingt-trois jours d’inconscience, elle se lève seule, et retourne à la résidence des Soeurs, complètement guérie. Ce miracle a permis la béatification d’Émilie de Villeneuve, le 5 juillet 2009, à Castres (Tarn).
Émilie de Villeneuve est venue au monde le 9 mars 1811 à Toulouse, dans une des familles nobles les plus anciennes du Languedoc. Deux filles l’ont précédée au foyer, Léontine et Octavie. Chaque été, la famille se transporte au château d’Hauterive, près de Castres. En 1815, après la naissance d’un garçon, Ludovic, la famille s’installe à Hauterive. Madame de Villeneuve assure l’instruction et l’éducation de ses enfants, malgré une santé précocement usée par les épreuves de la Révolution. Son époux est absorbé par la gestion de ses terres qu’il parcourt en tous sens, dirigeant labours et récoltes. Au château, la discipline est stricte: jamais de feu dans les chambres; silence à table; au salon, les enfants, relégués au fond de la pièce, ont défense de faire du bruit. En revanche, dans le parc, ils peuvent prendre une pleine détente. L’autorité maternelle, à la fois ferme et souple, après avoir enseigné les principes chrétiens d’une conduite juste et bonne, s’appuie beaucoup sur la confiance.
La différence d’âge provoque entre Émilie et ses soeurs une certaine distance, laissant celle-là dans une sorte d’isolement; elle traverse les années de l’enfance avec une insensibilité déconcertante: «Un coeur qui avait l’air de ne rien sentir, un esprit froid, dépourvu même de cette gentillesse des petits raisonnements si gracieux de l’enfance», dira d’elle Coralie, une de ses amies. À cela se joint un trait de caractère bien exceptionnel à cet âge: un amour passionné de l’exactitude, des choses faites à l’heure marquée. Bientôt, sa mère la charge d’enseigner les rudiments de l’instruction à son petit frère. Émilie sait se faire obéir, sans brusquerie, de cet enfant turbulent. Elle-même en tire un goût croissant pour l’étude.
Sensible mais fermée
En 1825, Madame de Villeneuve s’éteint après une douloureuse agonie. Habituée à ne pas extérioriser des sentiments pourtant bien réels, car, de son propre aveu, elle est portée «à la sensibilité et à la tendresse», Émilie reste comme insensible. Mais cette attitude dénote un drame intime: la tendresse maternelle, davantage concentrée sur les deux aînées, lui a trop manqué et la jeune fille s’est refermée sur elle-même. Lors de sa première communion, en janvier 1826, elle ne laisse rien paraître au-dehors de sa ferveur. Peu après, Monsieur de Villeneuve, nommé maire de Castres, confie ses enfants à sa propre mère qui habite Toulouse. Cette dame, très âgée et aveugle, leur laisse une liberté quasi totale. Son salon est un lieu de réunion pour toute la ville. Léontine et Octavie en sont ravies: elles plaisent, et le monde leur plaît. Quant à Émilie, malgré sa magnifique chevelure blonde, elle n’attire pas: «Sa taille grande et maigre était dépourvue de grâce, affirme Coralie… Sa vue excessivement courte lui donnait un air maladroit, quelquefois même impoli, et provoquait un clignotement qui donnait à sa physionomie quelque chose d’étrange.»
Octavie décède en 1828, à l’âge de vingt ans. Toute la famille est en pleurs, sauf Émilie que ses proches considèrent comme «une bûche». Cependant, cet événement produit sur elle un effet étonnant: «Ici commence pour Émilie une nouvelle existence, écrit Coralie… Une charité ineffable, un amour tendre et vif, animèrent désormais toutes ses actions. La prière, la fréquentation des sacrements, faisaient ses délices; et lorsque des amis aimables et pieux venaient voir sa grand-mère, elle se rapprochait du cercle, les écoutait avec avidité, surtout lorsqu’ils parlaient de Dieu et des choses du Ciel.» Son coeur, longtemps renfermé, se donne plus entièrement à Dieu et, par Lui, aux âmes.
À la fin de novembre 1829, Léontine se marie. Émilie devient alors maîtresse de maison au château d’Hauterive, passablement négligé depuis quelques années. Son père démissionne en 1830 de sa charge de maire de Castres mais multiplie ses activités agricoles. Très apte au gouvernement, Émilie a tôt fait de remettre de l’ordre, à la grande satisfaction de son père. Ludovic, pour sa part, s’agace du sérieux de sa soeur: «À ton âge et dans ta position, lui dit-il, adopter une vie aussi retirée, c’est absurde! Tes amies sont aussi ridicules que toi, vous n’avez pas le sens commun. Qui vous ôte les sermons ou les solennités de l’Église, vous ôte tous les plaisirs.» Chaque matin, Émilie se rend à la Messe. Elle partage avec les pauvres toute la pension que son père lui donne, visite les jeunes filles, les instruit, les assiste dans leurs maladies. Le Père Leblanc, Jésuite qui réside à Toulouse, la guide dans sa vie spirituelle.
Un attrait irrésistible
Émilie atteint ses vingt-trois ans et confie à Coralie: «Je ne me marierai pas… mais, ce qui me tourmente, c’est une vocation pour laquelle je me sens un attrait irrésistible, et le Père Leblanc ne veut pas encore se prononcer… Je sens le désir de me consacrer aux pauvres dans l’admirable société des Filles de Saint-Vincent-de-Paul.» Lorsque, enfin, le Père Leblanc approuve son dessein, sa joie est immense. Mais Monsieur de Villeneuve, et sa famille avec lui, demande un report de quatre années. Le Père Leblanc conseille à sa dirigée d’accepter ce délai. Elle poursuit donc ses activités et seconde si bien son curé que ses amies l’appellent «Monsieur le Vicaire». Un jour, arrive une lettre de Monsieur de Barre, chrétien fervent qui prie longuement dans les églises et occupe le reste de son temps à soulager la misère des pauvres. Il a eu pendant la Messe une inspiration: Émilie devrait établir à Castres une maison dirigée par des religieuses pour s’occuper de l’éducation des enfants que leurs parents ne peuvent élever eux-mêmes. Après quelques mois de discernement et de prières, le Père Leblanc conclut que l’oeuvre est voulue de Dieu. Monsieur de Villeneuve, rassuré par la pensée que sa fille ne s’éloignera pas trop de lui, donne son consentement et l’archevêque d’Albi approuve, lui aussi.
L’aide financière paternelle permet à Émilie d’acheter une maison à Castres. Elle donne à la Société qu’elle fonde le nom de «Congrégation de l’Immaculée-Conception»; l’habit des Soeurs sera bleu. Avec deux compagnes, elle se rend à la Visitation de Toulouse pour un mois de noviciat. Le 8 décembre 1836, a lieu à Castres la prise d’habit, la profession religieuse temporaire et l’installation des trois soeurs dans leur maison, en présence de l’archevêque. Émilie prend le nom de Soeur Marie. Les premières Règles définissent le but de la nouvelle Congrégation: l’éducation des enfants abandonnés, le service des pauvres et des prisonniers, l’instruction et la formation professionnelle des jeunes filles. Le 19 mars 1837, un ouvroir est ouvert pour trente élèves, mais bientôt les couturières de la ville crient à la concurrence déloyale. La population, qui avait été très favorable aux Soeurs lors de leur installation, se retourne contre Soeur Marie avec aigreur, par des propos malveillants voire des calomnies. Le clergé se laisse lui aussi impressionner, mais le Père Leblanc encourage les Soeurs à aller de l’avant.
«Je suis si faible…»
À la fin de 1837, la vague de critiques est passée et quatre postulantes sont admises. Au début de l’année suivante, la municipalité de Castres confie aux Soeurs le soin des prisons. Le 1er mai 1838, la communauté s’installe dans l’ancien petit séminaire. Soeur Marie s’occupe de chacune des élèves avec une affectueuse sollicitude et celles-ci sont attirées par la paix que dégage sa personne. Elle-même livre, dans des écrits intimes, certains aspects de sa vie spirituelle: «Ô, mon Dieu, mon Créateur et mon Sauveur, je vous fais l’offrande de moi-même, la plus entière et la plus parfaite que je puisse faire… Je ne vous prie pas de m’envoyer des croix et de grandes épreuves, parce que je suis si faible que je ne sais pas si, après les avoir demandées, je les supporterais comme il faut… Abandon, confiance, c’est tout pour moi.» Sa devise est «Dieu seul!»
Au cours de l’année 1840, de graves difficultés se font jour dans la communauté : quelques mauvais exemples entraînent un relâchement. La Mère Marie de Villeneuve ne brusque rien mais prie. Une organisation encore imparfaite ne permet pas à la formation religieuse qu’elle donne de produire tous ses fruits. Elle décide de séparer les novices des religieuses professes, puis entreprend la rédaction de Constitutions qui seront approuvées par l’archevêque d’Albi à la fin de 1841. La Supérieure générale devrait être élue pour trois ans, mais les Soeurs obtiennent de l’archevêque que leur fondatrice soit Supérieure à vie. Celle-ci exerce sur elles une action toute de délicatesse et de vigilance discrète. Elle saisit très vite leurs incertitudes, leurs troubles, leurs peines, et trouve aussitôt le mot qui convient pour les ramener à la sérénité. Elle met le plus grand soin à ne se soustraire en rien à la règle commune et souhaite pouvoir, de temps en temps, balayer sa cellule ou faire la vaisselle.
La Mère acquiert, dès avril 1841, un terrain pour faire construire la maison mère de la Congrégation. Mais la flamme d’amour divin qui embrase son coeur la pousse vers les missions lointaines: «Le désir de faire aimer Jésus-Christ et de Le servir dans ses membres ne se bornera pas aux limites de la France. La Congrégation a encore pour fin de se dévouer à la belle oeuvre des missions étrangères, surtout aux missions des Noirs, et généralement des peuples les plus méprisés et les plus délaissés. En quelque lieu que les appelle la voix du pauvre et de l’orphelin, elles s’y rendront sans hésiter.»
Sans espérance parce que sans Dieu
Le 11 mai 2008, le Pape Benoît XVI rappelait le besoin fondamental que nous avons du Christ: «Le Christ est notre avenir… Privée du Christ, l’humanité est «sans espérance et sans Dieu dans le monde (Ep 2, 12), sans espérance parce que sans Dieu» (Encyclique Spe salvi, 3). En effet, «celui qui ne connaît pas Dieu, tout en pouvant avoir de multiples espérances, est dans le fond sans espérance, sans la grande espérance qui soutient toute l’existence» (Ibid., 27)… C’est donc un impérieux devoir pour tous d’annoncer le Christ et son message salvifique. Malheur à moi, affirmait saint Paul, si je n’annonçais pas l’Évangile (1 Co 9, 16)» (Message pour la journée mondiale des Missions). Un an plus tard, le Pape ajoutait: «Le but de la mission de l’Église est en effet d’éclairer, par la lumière de l’Évangile, tous les peuples sur leur chemin historique vers Dieu, pour qu’ils aient en Lui leur pleine réalisation et leur plein accomplissement. Nous devons ressentir le désir profond et la passion d’éclairer tous les peuples, par la lumière du Christ, qui resplendit sur le visage de l’Église… L’Église n’agit pas pour étendre son pouvoir, ou pour affirmer sa domination, mais pour apporter à tous le Christ, salut du monde… Ce qui est en question, c’est le salut éternel des personnes, la fin et l’accomplissement même de l’histoire humaine et de l’univers» (29 juin 2009).
En 1842, la Mère Marie de Villeneuve est mise en relation avec le Père Libermann, fondateur des Missionnaires du Saint-Coeur de Marie. Un projet de coopération entre les Soeurs de Castres et les Pères Missionnaires s’établit. Au début de juin 1843, la Mère se rend à Paris et tente, d’ailleurs en vain, d’obtenir du gouvernement l’approbation civile pour ouvrir des écoles communales. Elle rencontre le Père Libermann. «Je préfère, écrira-t-elle, ses conversations à ses lettres… Nos vues concordent toujours d’une façon vraiment extraordinaire. C’est un homme animé du véritable esprit de Dieu, d’une prudence consommée, et je n’ai encore rencontré personne qui m’ait inspiré autant de confiance.» De retour à Castres, la fondatrice constate que les dépenses nécessitées par la construction du couvent dépassent les ressources. Pour obtenir les fonds nécessaires, les Soeurs se proposent de faire pénitence durant quarante jours. La Mère accepte, tout en orientant ses filles d’abord vers la conversion intérieure. Le 30 avril 1844, la communauté s’installe dans le couvent enfin achevé.
En juillet 1846, Mère Marie fonde un Refuge pour accueillir les femmes que leur extrême misère a jetées dans le vice. «Les Soeurs que l’obéissance consacrera à cette oeuvre importante devront être animées d’un saint zèle et d’un véritable esprit de foi, écrit-elle dans les Constitutions; elles envisageront moins dans ces pauvres âmes le honteux état où les a réduites le péché, que le Sang divin qui est leur rançon, et Notre-Seigneur dont elles sont les membres et qu’elles sont appelées à aimer et à glorifier, peut-être plus parfaitement qu’elles-mêmes, pendant toute l’éternité… Il est très important que les Soeurs ne montrent jamais, auprès des pénitentes, quelques torts qu’elles aient à leur reprocher, ni impatience, ni dégoût de leur société, ni mépris pour leurs personnes. Elles les traiteront toujours, au contraire, avec une douceur et une affection toutes saintes.»
Mais la Mère songe toujours aux missions lointaines. Un premier départ de quatre Religieuses pour l’Afrique est fixé au 22 novembre 1847; d’autres auront lieu en 1849 et 1850. Le Père Libermann prodigue aux Soeurs des conseils avisés: «On cherche, sans y penser, à amener les gens du pays à prendre le ton et les manières d’Europe… Il faut prendre le contre-pied, laisser aux indigènes les moeurs et les habitudes qui leur sont naturelles, les perfectionner en les animant par les principes de la foi et des vertus chrétiennes, et corrigeant ce qu’elles ont de défectueux.» Par-dessus tout, le Père exhorte les Soeurs à cultiver une patience à toute épreuve.
La source
Le Coeur de Jésus, dans lequel la Mère met toute sa confiance, est la source où «l’on peut puiser l’attention, la tendresse, la compassion, l’accueil, la disponibilité, l’intérêt pour les problèmes des gens, et les autres vertus nécessaires aux messagers de l’Évangile pour tout quitter et se consacrer entièrement et inconditionnellement à la diffusion dans le monde du parfum de la charité du Christ» (Benoît XVI, 11 mai 2008).
En novembre 1847, la Mère de Villeneuve se rend à Amiens pour reprendre un projet ancien cher au Père Libermann: installer un noviciat en vue des missions, au hameau de Saint-Pierre, près de la ville. Là, une jeune femme et une ancienne religieuse désirent fonder un tiers-ordre. On envisage de joindre le noviciat de l’Immaculée-Conception avec le futur tiers-ordre. Dans la pratique, les difficultés rencontrées sont telles que la Mère est contrainte d’abandonner cette implantation en mai 1851. Le Père Libermann décède le 2 février 1852; son successeur souhaite que la Mère reprenne ce projet de fondation. Longtemps perplexe, et douloureusement affectée par les difficultés qui surgissent un peu partout, dans les missions comme à Castres, la fondatrice traverse une période spécialement éprouvante où elle perd le sommeil et l’appétit. Quand elle est, ou croit être seule, elle se laisse aller à des larmes qui trahissent sa profonde sensibilité mais aussi sa fatigue. Heureusement, cet état ne dure pas et bientôt la Mère retrouve sa sérénité, son calme et son courage ordinaires. Elle décide de s’en tenir à la fondation d’un pensionnat à Paris sans reprendre le projet de Saint-Pierre, et rejoint Castres à la fin de juin 1853.
Dans sa vie spirituelle toute simple, la Mère de Villeneuve cherche avant tout à accomplir la volonté de Dieu. «Quand on parle, agit, écrit pour le bien d’une âme, pour quelque affaire importante, disait-elle à ses filles, ne pas tant se proposer le bien de cette âme, la réussite de cette affaire, qu’uniquement la volonté de Dieu, ne voulant ce qu’on se propose que selon Ses intentions souvent différentes des nôtres.» Elle accorde une grande importance à la prière: il faut s’accoutumer «à converser avec Jésus au milieu de ses occupations, prier de coeur en allant et venant dans la maison». Elle-même apprécie les moments où elle est seule avec Dieu. Mais sa vie spirituelle se passe souvent dans l’aridité de la foi pure, et elle parle d’expérience quand elle écrit à l’une de ses filles: «Ne vous inquiétez pas de votre état intérieur qui, d’après ce que vous me dites, est un peu ténébreux. Dieu se trouve partout, même dans les ténèbres et peut-être mieux encore.» À une autre, elle conseille: «Vous devez toujours redouter un peu l’illusion et préférer être conduite par la foi nue et sans goût… Méfiez-vous de ces désirs si élevés de la perfection; contentez-vous de désirer l’accomplissement de la volonté de Dieu… Je redoute pour vous et les autres la voie des consolations et je préfère la foi seule, les ténèbres, enfin les croix.»
Une singulière humilité
Deux mois après son retour à Castres, la Mère de Villeneuve jette ses filles dans l’émoi en donnant sa démission de Supérieure générale. Les raisons qu’elle invoque se résument ainsi: la soif ardente qu’elle éprouve de pratiquer l’obéissance jusque dans les plus petites choses, l’avantage pour la Congrégation qui sera un jour ou l’autre privée de sa conduite, la crainte que ses filles lui obéissent plus par le motif de la confiance et de la tendre affection que par celui de la foi et du pur amour de Dieu. Par-dessus tout, la Mère ne se considère nullement comme nécessaire, ni même désirable, au poste de Supérieure. Non sans souffrances, le Chapitre général de septembre 1853 entérine sa décision. Toutefois, disposée à apporter son concours à la nouvelle Supérieure, la fondatrice reçoit les charges d’assistante générale et de Maîtresse des novices qu’elle portera discrètement et efficacement. Cet exemple d’humilité et de détachement est très certainement une source sans pareille de fécondité pour sa Congrégation.
Vers le milieu de 1854, le choléra se répand dans le midi de la France et gagne la ville de Castres. Une épidémie de suette (maladie fébrile contagieuse) se déclenche dans le même temps. La Mère de Villeneuve engage une véritable croisade de prières et suscite une atmosphère de confiance. Le choléra ne pénètre pas dans le couvent des Soeurs, mais la fondatrice est victime de la suette et, le 7 septembre, elle doit s’aliter. Au début d’octobre, son état s’aggrave et l’aumônier lui donne l’Extrême-Onction. Peu après, elle rend son âme à Dieu, tandis que les soeurs récitent les prières pour les agonisants.
La Congrégation des Soeurs Bleues de Castres compte aujourd’hui plus de six cents membres répartis en 123 communautés. Elle est présente en Europe, en Afrique, en Amérique du Sud et en Asie.
Dans une homélie à de nouveaux évêques, le 21 septembre 2009, le Cardinal Hummes, Préfet de la Congrégation pour le Clergé, disait: «L’Église sait qu’il y a une urgence missionnaire dans le monde entier, pas seulement «ad gentes» (en faveur des païens)… mais aussi dans les pays du monde chrétien… Tous nos pays sont devenus terres de mission, au sens strict… Il faut d’urgence se lever et partir à la recherche, d’abord, de tous ces baptisés qui se sont éloignés de la participation à la vie de nos communautés, et ensuite également de tous ceux qui ne connaissent que peu ou rien de Jésus-Christ.» Le 6 janvier 2008, le Pape Benoît XVI rappelait, dans le même sens, que «chaque chrétien est appelé à éclairer les pas de ses frères par la parole et par le témoignage de sa vie… Avec la lumière qu’il porte en lui, il peut et doit venir en aide à celui qui se trouve à ses côtés et qui a peut-être de la peine à trouver la route qui conduit au Christ.»
Que la bienheureuse Émilie de Villeneuve nous obtienne la grâce d’être de véritables évangélisateurs, passionnément attachés à répandre partout le Royaume de Dieu.
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