Télécharger comme pdf

18 février 2020

Saint Benoît Menni

Bien chers Amis de l’abbaye Saint-Joseph,

«Dieu est toujours du côté des petits, des pauvres, de ceux qui souffrent et qui sont marginalisés, disait saint Jean-Paul II. En se faisant homme et en naissant dans la pauvreté d’une étable, le Fils de Dieu a proclamé en lui-même la béatitude des affligés et a partagé en tout, excepté le péché, le destin de l’homme créé à son image. Depuis l’événement du Calvaire, la Croix, embrassée avec amour, devient la voie de la vie et enseigne à chacun que, si nous savons parcourir avec un abandon confiant la voie difficile de la douleur humaine, la joie du Christ Vivant, qui dépasse tout désir et toute attente, fleurira pour nous et pour nos frères » (5 janvier 2004). Au long de cinq siècles d’histoire, l’Ordre hospitalier de Saint-Jean-de-Dieu a donné à l’Église de nombreux modèles à imiter. L’exemple de saint Benoît Menni, canonisé par saint Jean-Paul II, rappelle que le service des malades et des nécessiteux est une voie sûre pour atteindre la sainteté.

Le 11 mars 1841, à Milan, près de la Porte-Neuve, Louise Figini, épouse de Louis Menni, accouche de son cinquième enfant (elle en aura encore dix autres) ; le jour même, dans l’église Sainte-Marie-de-la-Fontaine, située en face de la maison familiale, le nouveau-né reçoit au saint Baptême le prénom d’Angelo. Les Menni vivent, dans une modeste aisance, d’un commerce de bois. Chez eux, la foi est profonde, jointe à la charité envers les pauvres. Chaque jour, on récite le chapelet en famille. Après ses classes élémentaires, Angelo suit les cours du lycée voisin, puis, à seize ans, son diplôme en main, il est embauché dans une banque. Mais bientôt, sollicité de se prêter à des opérations louches, il préfère suivre les indications de sa conscience et quitter cet emploi.

Dévouement pour tous

Le 4 juin 1859, l’armée franco-piémontaise remporte sur les Autrichiens la victoire de Magenta. De nombreux blessés arrivent en gare de Milan : le jeune Menni s’offre à les secourir comme brancardier. À cette occasion, il remarque les Frères de Saint-Jean-de-Dieu et admire leur dévouement pour tous, alliés ou ennemis. Cette rencontre lui inspire la pensée de se consacrer lui aussi au soin des malades, dans la vie religieuse. Admis au noviciat des Frères le 13 mai 1860, il reçoit l’habit et le nom de Frère Benoît. L’année suivante, il prononce ses vœux temporaires et, le 17 mai 1864, ses vœux perpétuels.

Saint Jean de Dieu (1495-1550), avait commencé, dès sa huitième année, par mener une vie errante. Successivement vagabond, berger, militaire, vendeur ambulant, il écoute, le 20 janvier 1539, une prédication de saint Jean d’Avila, l’apôtre de l’Andalousie, sur la gloire de saint Sébastien, martyr fêté en ce jour. À l’exemple de ce parfait imitateur du Christ, dit le prédicateur, chacun doit s’ancrer dans la volonté de tout souffrir plutôt que de commettre le péché, mal plus dangereux que la peste qui menace la contrée. Bouleversé par ce qu’il vient d’entendre, Jean parcourt les rues de la ville en criant : « Miséricorde ! Miséricorde ! », déchirant ses vêtements, allant même jusqu’à se rouler dans la boue. Les enfants le poursuivent en criant : « Au fou ! au fou ! » Enfermé à l’hôpital Royal de Grenade, il connaît le sort des malades mentaux de l’époque : jeûnes, coups de fouet, jets d’eau glacée… administrés pour chasser le mal. Il comprend alors quelle est sa vocation : passer le reste de sa vie à secourir ceux qu’il a côtoyés à l’hôpital Royal, paralytiques, vagabonds, prostituées, et surtout malades mentaux. Il sera l’initiateur des hôpitaux modernes.

« La personne handicapée, disait le Pape Jean-Paul II, même lorsqu’elle apparaît blessée dans son esprit ou dans ses capacités sensorielles et intellectuelles, est un sujet pleinement humain, avec les droits sacrés et inaliénables propres à toute créature humaine. En effet, l’être humain, indépendamment des conditions dans lesquelles se déroule sa vie…, possède une dignité unique et une valeur particulière dès le début de son existence jusqu’au moment de sa mort naturelle. Le porteur de handicap lui-même, avec toutes ses limites et ses souffrances, nous oblige à nous interroger, avec respect et sagesse, sur le mystère de l’homme…, nous invite à reconnaître, accueillir et promouvoir en chacun de nos frères et sœurs la valeur incomparable de l’être humain créé par Dieu pour être fils dans le Fils » (ibid.).

Un aventurier ?

Benoît Menni souhaiterait devenir chirurgien au sein de l’Ordre. Mais le bien spirituel des Frères demande que certains parmi eux soient prêtres. Estimant qu’il possède les capacités pour accéder au sacerdoce, ses supérieurs l’envoient étudier à Rome. Il est ordonné prêtre le 14 octobre 1866. Il n’a pas vingt-six ans lorsque son supérieur général, le Père Alfieri, le choisit pour accomplir une tâche ardue : la restauration de l’Ordre en Espagne. À la suite des lois anticléricales de 1850, en effet, les Frères de Saint-Jean-de-Dieu avaient été expulsés de ce pays. Le 14 janvier 1867, le jeune prêtre est présenté au Pape Pie IX : « Allez, mon fils, en Espagne, lui dit le Saint-Père, avec la bénédiction du Ciel, restaurer l’Ordre en son berceau même ». Le Père Benoît Menni arrive à Barcelone le 26 avril. L’évêque, Mgr Navarro, le prend d’abord pour un aventurier et l’accueille plutôt froidement ; mais bientôt, rassuré par une lettre du Pape, il l’autorise à ouvrir dans la ville un petit centre d’une douzaine de lits destinés à des enfants handicapés.

Au début de 1873, la première République est proclamée en Espagne ; la persécution religieuse redouble, aggravée d’une guerre civile lors de la restauration du trône. En mars de la même année, des révolutionnaires font irruption dans le petit hôpital des Frères. Le Père Menni réussit à les convaincre qu’il n’y a là que des enfants malades dont personne ne veut. Il fait toutefois prendre aux Frères des habits civils et se rend chez des amis pour y cacher les vases sacrés. En route, il est fait prisonnier par des miliciens et n’est relâché qu’à condition de partir à l’étranger. Il s’exile alors à Marseille, mais revient secrètement deux fois à Barcelone ; la seconde fois, il est arrêté. Libéré grâce à son sang-froid, il part pour Tanger (Maroc) afin d’y étudier l’implantation d’un hôpital. Mais bientôt, l’interdiction de demeurer en Espagne est levée : on autorise les Frères de Saint-Jean-de-Dieu à soigner les blessés de la guerre civile espagnole. Ils se dévouent à Pampelune jusqu’en 1876, « sans distinction de parti, et pour le seul amour de Notre-Seigneur Jésus-Christ ». Les statuts de l’« Association des infirmiers, Frères de la Charité » sont approuvés par le gouvernement. Grâce à de généreux bienfaiteurs, le Père Menni achète un terrain pour y bâtir un hôpital psychiatrique, non loin de Madrid, à Ciempozuelos. La première construction, prévue pour cent lits, s’avère vite trop modeste ; il faut à nouveau bâtir pour recevoir cinq cents malades.

« La reconnaissance des droits (des personnes handicapées) doit être accompagnée par un engagement sincère de la part de tous pour créer des conditions concrètes de vie, des structures de soutien, une protection juridique capable de répondre aux besoins et aux dynamiques de croissance de la personne handicapée et de ceux qui partagent sa condition, à commencer par sa propre famille. Au-delà de toute autre considération ou intérêt particulier et de groupe, il faut tenter de promouvoir le bien intégral de ces personnes, et on ne peut leur refuser le soutien et la protection nécessaires, même si cela comporte un poids économique et social plus important. Peut-être plus que d’autres malades, les sujets atteints d’un retard mental ont besoin d’attention, d’affection, de compréhension et d’amour : on ne peut les laisser seuls, presque désarmés et sans défense, pour affronter la vie » (saint Jean-Paul II, ibid.).

Être juste et doux

La restauration de l’Ordre en Espagne, mise en œuvre par le Père Menni, réclame la fidélité à une discipline exigeante. Or, certains de ses religieux se plaignent de lui au supérieur général, l’accusant de manigances pour trouver de l’argent, et de dureté envers ses subordonnés. « Cherche à être juste et doux, lui écrit le Père Alfieri : tu as besoin de renoncer absolument à ton habitude invétérée de vouloir tenir “mordicus” à tes idées et à tes projets ; ne précipite pas les choses. » En 1878, l’évêque de Grenade permet au Père Benoît de reprendre la maison où, le 8 mars 1550, saint Jean de Dieu a rendu le dernier soupir. En ce « berceau de l’Ordre », sont mis en place un orphelinat pour enfants pauvres et un hospice pour prêtres âgés. Au fil des années, le Père Menni établira plus d’une quarantaine d’hôpitaux en Espagne, dans différents pays d’Europe et jusqu’au Mexique. Selon les constitutions de l’Ordre, les hôpitaux sont réservés aux hommes. Ne trouvant pas d’aide auprès de diverses congrégations féminines pour prendre en charge les femmes malades, le Père s’adresse à la Sainte Vierge. La Providence lui fait alors rencontrer deux jeunes femmes de Grenade désireuses de se consacrer à Dieu : María José Recio et Antonia Giménez.

Le Père Benoît commence par les mettre à l’épreuve : il demande à leur confesseur de les détourner de leur projet. Constatant qu’elles persévèrent dans leur résolution, il les loge chez une vieille femme, à Ciempozuelo, dans une pauvre chambre. Elles mènent là une vie très rude, travaillant à la blanchisserie de l’hôpital et faisant de la couture. Deux autres femmes les rejoignent bientôt. De Barcelone, le Père leur adresse une longue lettre où il les exhorte à la prière, au travail, à l’endurance, à l’amour de Dieu et au silence. Bientôt, elles déménagent dans une maison plus vaste. Le Père place dans leur chapelle une belle image de Notre-Dame du Sacré-Cœur. En 1882, l’évêque ayant approuvé les constitutions que le Père Menni leur a données, elles prennent l’habit religieux. Les Sœurs, dont le nombre s’accroît rapidement, s’occupent maintenant de femmes malades mentales. Le 30 octobre 1883, Sœur María José, la supérieure, meurt victime de son dévouement, agressée et piétinée par une aliénée. En 1892, le Saint-Siège approuve leur communauté sous le nom de “Sœurs hospitalières du Sacré-Cœur de Jésus”. Se tournant vers une image de la Sainte Vierge, le Père leur dit : « Voici votre Supérieure ! » Le Sacré-Cœur de Jésus et l’amour de la Sainte Vierge seront leur consolation et leur joie dans leur difficile apostolat. « Servir les malades, a écrit le Père Benoît, n’exclut pas l’assistance spirituelle, mais, naturellement, la suppose. » Soigner à la fois le corps et l’âme était aussi le but que se proposait saint Jean de Dieu, et une des clés de son œuvre. Les Sœurs, comme leurs Frères, orientent les âmes des malades vers le terme unique de notre vie : le salut éternel.

« Les personnes handicapées, en révélant la fragilité radicale de la condition humaine, sont une expression du drame de la douleur et, dans notre monde assoiffé d’hédonisme et aveuglé par la beauté éphémère et trompeuse, leurs difficultés sont souvent perçues comme un scandale et une provocation, leurs problèmes comme un fardeau à éliminer ou à résoudre de façon expéditive. Au contraire, icônes vivantes du Fils crucifié, elles révèlent la beauté mystérieuse de Celui qui s’est anéanti pour nous et s’est fait obéissant jusqu’à la mort. Elles nous montrent que l’importance ultime de l’être humain, au-delà de toute apparence, réside en Jésus-Christ… C’est pourquoi ces personnes peuvent enseigner à tous ce qu’est l’amour qui sauve, elles peuvent devenir des messagers d’un monde nouveau, non plus dominé par la force, par la violence et par l’agressivité, mais par l’amour, la solidarité, l’accueil, un monde nouveau transfiguré par la lumière du Christ, le Fils de Dieu incarné, crucifié et ressuscité pour nous » (saint Jean-Paul II, ibid.).

Un honneur paradoxal

Toutefois, les œuvres du Père Menni ne rencontrent pas que des approbateurs. En octobre 1891, il écrit à l’une de ses religieuses : « Je remercie Dieu de m’avoir fait l’honneur d’être beaucoup persécuté, traité de voleur, de coquin, d’hypocrite et de menteur ; et de m’avoir aidé à souffrir, pour son amour, avec une joie intérieure intense et une parfaite conformité à sa volonté. » En 1893, il est accusé auprès du Saint-Office par un prêtre et trois religieuses, des fautes les plus infamantes. Ce prêtre, son confrère, est chapelain de l’hôpital de Palencia. L’évêque du lieu s’informe auprès des trois Sœurs ; celles-ci révèlent que le prêtre accusateur, qui est leur confesseur, leur a fait signer, sous peine d’excommunication, un feuillet qu’elles n’ont même pas pu lire, et les a obligées à garder sur l’affaire un secret absolu. Après trois années d’enquête, le Saint-Office reconnaîtra la complète innocence du Père Menni.

En juin 1897, la mère d’une malade mentale, son concubin, et les directeurs de deux journaux, imputent au Père Benoît des actions infâmes vis-à-vis de la malade ; de plus, sous prétexte de clore l’affaire, ils lui réclament une forte somme. Constatant que le Père ne répond pas à leur chantage, ses accusateurs le dénoncent au tribunal de Getafe (Madrid), qui l’innocente. Passant outre, les calomniateurs continuent leur campagne diffamatoire dans les journaux anticléricaux. Une lettre de cette époque aux sœurs de Madrid révèle les dispositions intimes du saint prêtre : « Chaque jour, je perds le goût des choses d’ici-bas. Je désire seulement tenir mon cœur totalement uni à Jésus. Que Dieu m’accorde de savoir souffrir pour le salut d’âmes innombrables… Mon seul désir est d’aider les âmes à se sauver. Je voudrais jusqu’au jour du jugement être tourmenté, humilié et méprisé pourvu que ce soit par amour de Jésus ! » Dans ses Exercices spirituels, saint Ignace présente un idéal similaire : le troisième degré d’humilité, le plus élevé, porte le disciple à imiter Jésus-Christ, notre Seigneur, dans sa pauvreté, à souffrir des mépris à cause de Lui (cf. la huitième Béatitude, Mt 5, 11) et même à désirer « d’être regardé comme un homme inutile et insensé, par amour pour Jésus-Christ, qui le premier a été regardé comme tel, plutôt que de passer pour un homme sage et prudent aux yeux du monde » (n° 167). Toutefois, considérant le bien de l’Église, l’archevêque de Madrid engage le Père à poursuivre ses accusateurs en justice afin de défendre la réputation des Frères hospitaliers. En 1900, les calomniateurs ainsi que les deux directeurs de journaux seront sévèrement condamnés.

Douloureuse dénonciation

Dans le même temps, le Père est attaqué à l’intérieur même de sa congrégation : en décembre 1898, une vingtaine de religieux de la province espagnole le dénoncent à la Congrégation romaine des Évêques et Réguliers. Ils demandent sa destitution, lui imputant un autoritarisme excessif, une mauvaise administration des biens de l’Ordre et sa sujétion aux religieuses qu’il a fondées. Parmi les délateurs figure encore le chapelain de Palencia qui, peu après, sortira de l’Ordre. Cette dénonciation n’aura pas de suites. Parallèlement, d’ailleurs, le Père Menni est réélu, pour la cinquième fois, Provincial d’Espagne. Quand on lui parle de ses accusateurs, il explique : « Ils veulent obtenir, licitement ou non, des emplois qu’ils jugent plus convenables à leurs talents ou à leurs goûts. »

En 1903, cependant, après trente-six ans de gouvernement ininterrompu, le Père n’est pas réélu dans ses fonctions. Plus libre de son temps, il prie davantage et se dévoue auprès des Sœurs hospitalières. En 1909, le Pape saint Pie X le nomme visiteur apostolique de tout l’Ordre, puis, le 21 avril 1911, supérieur général pour une durée de six ans. Au mois de juin de l’année suivante, le Père Menni convoque à Rome les supérieurs provinciaux et quelques membres du chapitre général pour traiter de divers problèmes, en particulier de la réforme des Constitutions. Mais les discussions s’avèrent difficiles : des contestations s’élèvent contre un supérieur général qui a le tort d’avoir été choisi directement par le Souverain Pontife. Prétextant les infirmités du Père, certains religieux persuadent le cardinal préfet de la Congrégation des Religieux qu’il est devenu incapable de gouverner. Aussi, le 10 juin 1912, le Père Menni présente-t-il sa démission pour motif d’âge avancé et de mauvaise santé. Par la suite, le cardinal regrettera amèrement d’avoir écouté les plaignants, d’autant que, sous leurs arguments, se dissimulaient certaines idées modernistes que ne partageait pas le Père Menni. La faculté de visiter toutes les maisons de religieuses qu’il a fondées est cependant laissée au Père. Le lendemain de sa démission, au cours d’une audience privée, le Pape Pie X lui dit : « Voici venu pour vous le moment de prier et de donner des conseils. – Sainteté, j’ai dû comparaître devant tous les tribunaux de ce monde. J’en suis sorti heureusement ; je souhaite de même sortir un jour absous du tribunal de Dieu et rencontrer sa miséricorde. – Vous la trouverez ! », lui affirme plusieurs fois le saint Pontife.

Notre conformité au Christ

Le Compendium du Catéchisme de l’Église catholique enseigne : « À la mort, l’âme et le corps sont séparés, le corps tombe en corruption, tandis que l’âme, qui est immortelle, va vers le jugement de Dieu et attend d’être réunie au corps quand il sera transformé, lors du retour du Seigneur. » Et il précise que le jugement particulier « est le jugement de rétribution immédiate que chacun, à partir de sa mort, reçoit de Dieu en son âme immortelle, en relation avec sa foi et ses œuvres. Cette rétribution consiste dans l’accession à la béatitude du ciel, immédiatement ou après une purification proportionnée, ou au contraire à la condamnation éternelle de l’enfer » (nos 205, 208). « C’est aujourd’hui, dans le présent, commentait le Pape Benoît XVI, que se joue notre destin ; c’est par notre comportement concret dans la vie quotidienne que nous décidons de notre sort éternel. À la fin de notre vie terrestre, au moment de la mort, nous serons jugés en fonction de notre conformité ou non à l’Enfant qui doit naître dans la grotte de Bethléem, puisque c’est Lui l’unité de mesure que Dieu a donnée à l’humanité » (Angélus, 9 décembre 2007). Le Père Benoît vivait de ces vérités, comme saint Jean de Dieu : « Je vous en prie, écrivait ce dernier à une duchesse, pour l’amour de Jésus-Christ, ayez constamment à l’esprit ces trois vérités : l’heure de la mort, à laquelle personne ne peut échapper, les peines de l’enfer, la gloire et l’infini bonheur du Paradis. La mort, en effet, pensez-y bien, détruit tout, nous dépouille de tout ce que nous a donné ce misérable monde, et ne nous laisse emporter qu’un pauvre morceau de toile usée et mal cousue. Si nous mourons en état de péché mortel, des plaisirs de courte durée, des divertissements ô combien passagers, devront être expiés dans le feu éternel de l’enfer. La gloire et le bonheur, au contraire, Notre-Seigneur les réserve à ses serviteurs. Ce sont des félicités que l’œil n’a jamais vues, que l’oreille n’a jamais entendues et que le cœur de l’homme n’a jamais pu ressentir (cf. 1 Co 2, 9). Enfin, ma chère sœur en Jésus-Christ, encourageons-nous tous, pour l’amour de Notre-Seigneur, et ne nous laissons pas vaincre par nos ennemis : le monde, le démon, la chair. Par-dessus tout, ayez toujours la charité, c’est la mère de toutes les vertus. »

Bientôt toutefois, le Père Menni est remplacé dans la mission de visiter les diverses maisons des religieuses hospitalières, et certaines Sœurs lancent de nouveau contre leur fondateur toutes sortes d’accusations sans preuves ; il lui est alors interdit de résider à Rome ou en Espagne. En novembre 1912, tout contact lui est même défendu avec les Sœurs. Épuisé par l’épreuve autant que par la paralysie, le Père Menni rend son âme à Dieu le 24 avril 1914 à Dinan, en France. Par la suite, toute la lumière sera faite sur les accusations qui ont tenté de le déshonorer, et le Père Menni sera béatifié en 1985, puis canonisé en 1999.

Le Père Menni, « comme tous ceux qui ont suivi le Christ, affirmait le Pape Jean-Paul II, n’a pas échappé aux incompréhensions et aux souffrances, même de la part de ceux qui lui étaient très proches… En profonde communion avec l’Église et le Christ, il sut résister aux attaques et mener de l’avant son œuvre féconde… Sans une profonde dévotion au Sacré-Cœur de Jésus et une vénération particulière pour la Mère de Dieu, sans le feu du Saint-Esprit, il n’aurait jamais pu mener à bien l’œuvre merveilleuse qu’il a accomplie. » Nous aussi, laissons-nous guider en toutes circonstances par le Saint-Esprit !

Pour publier la lettre de l’Abbaye Saint-Joseph de Clairval dans une revue, journal, etc. ou pour la mettre sur un site internet ou une home page, une autorisation est nécessaire. Elle doit nous être demandée par email ou sur la page de contact.