11 février 2009

Pierre-Adrien Toulorge

Bien chers Amis,

Automne 1793. La Révolution française est entrée dans sa phase la plus violente, la Terreur. Les prêtres restés en communion avec le Saint-Siège sont pourchassés et jugés. Le 12 octobre au soir, à Coutances en Normandie, le Père Pierre Toulorge, 37 ans, rentre radieux du tribunal à la cellule qu’il partage avec d’autres détenus, prêtres et laïcs. « Alors, quelles nouvelles ? – Bonnes nouvelles, mon procès a été jugé en ma faveur ! » Tous croient qu’il a été acquitté. Cependant, il dévoile bientôt la réalité : il est condamné à mort ; la sentence est sans appel. La joie générale fait place à la douleur. Une religieuse, arrêtée en même temps que lui, Soeur Saint-Paul, fond en larmes. Alors le martyr lui dit avec force : « Madame, les larmes que vous répandez sont indignes de vous et de moi. Que diront les gens du monde s’ils savent qu’ayant renoncé au monde, nous avons peine à le quitter ? Si nous avons de la répugnance à mourir, nous donnerons aux enfants du siècle un mauvais exemple, et peut-être votre découragement fermera-t-il la porte du Salut à beaucoup d’âmes qui pourraient se trouver dans la même occasion. Apprenons-leur par notre constance ce qu’ils sont obligés de faire. Montrons la foi victorieuse des supplices et ouvrons-nous un passage au Ciel, à travers les derniers efforts de l’enfer » . Qui était ce témoin intrépide du Christ et de son Église ?

Pierre-Adrien ToulorgeNé et baptisé le 4 mai 1757 à Muneville-le-Bingard, dans la presqu’île du Cotentin, Pierre-Adrien est le troisième enfant de Julien Toulorge et de Julienne Hamel, propriétaires terriens exploitants. Le diocèse de Coutances, où il grandit, est resté, à l’époque du triomphe de Voltaire, une région de ferveur religieuse ; presque tous font leurs Pâques ; les vocations affluent. Pierre-Adrien est pieux ; quand se dessinent chez lui les premières aspirations au sacerdoce, il est pris en charge par un des vicaires de la paroisse, qui l’initie au latin. Bientôt, le jeune homme est envoyé au collège pour y faire ses humanités, puis ses études de philosophie. Vers 1776, il est admis au Grand Séminaire de Coutances, tenu par les Eudistes, dont le Supérieur, M. François Lefranc, sera martyrisé à Paris en septembre 1792. Ordonné prêtre en 1782, Pierre-Adrien Toulorge est nommé vicaire de Doville, paroisse de six cents habitants dont le curé est un chanoine prémontré, homme méthodique et zélé. La situation matérielle permet aux deux prêtres de vivre modestement, mais décemment. La paroisse comprend beaucoup d’indigents, par suite de la guerre d’Indépendance américaine qui a ruiné les métiers de la mer. Le curé et son vicaire ont à coeur de les assister.

Heureuse condition

Il nous est resté le texte d’un sermon du jeune vicaire sur le bonheur des justes et le malheur des méchants ; on y relève le passage suivant, vraiment prophétique : « Qu’elle est donc heureuse, mes Frères, la condition des enfants de Dieu ! Il les éprouve, mais Il les éprouve par amour. Il les afflige, mais Il leur rend les afflictions aimables ; ils souffrent, et déjà sa tendresse est émue, et s’empresse de les soulager ; elle verse dans leur coeur mille bénédictions de douceurs qui les réjouissent, qui les transportent. Oui, mes Frères, dans les tendres effusions de l’Esprit Consolateur, on est pénétré d’un plaisir divin, d’une joie ineffable qu’on ne peut exprimer. Les maux changent de nature, on les aime, on souffrirait de n’avoir rien à souffrir, et tout ce que désire une âme fidèle est de perpétuer ou de consommer son sacrifice » .

Pierre Toulorge se rend souvent à l’abbaye prémontrée de Blanchelande, toute proche. Fondé en Picardie par saint Norbert vers 1120, l’Ordre de Prémontré a pour fins la célébration en commun de l’Office divin et le ministère paroissial. Les prémontrés, appelés « chanoines réguliers » , sont habillés de blanc. Pierre-Adrien demande au Prieur de le recevoir dans sa communauté. Son but est double : se dévouer au ministère sacerdotal dans les campagnes, et pratiquer la vie communautaire afin d’y trouver un soutien spirituel. Agréé, il part faire son noviciat à l’abbaye de Beauport, en Bretagne. C’est en juin 1788 que le Chanoine Toulorge retourne à Blanchelande et y prononce ses voeux religieux. Il exerce le ministère dans les paroisses environnantes, spécialement par la prédication.

Cependant, en janvier 1789, les États généraux (assemblée générale du royaume) sont convoqués à Versailles par le roi Louis XVI. Les événements prennent bientôt une tournure révolutionnaire. L’Assemblée constituante qui, par un coup d’audace, s’est emparée du pouvoir, est de tendance voltairienne ; elle méprise les religieux et convoite leurs possessions. Le 13 février 1790, elle supprime les ordres monastiques, dont les biens sont nationalisés ; les chanoines réguliers sont assimilés aux moines. En avril, la municipalité de Saint-Sauveur-le-Vicomte envoie à Blanchelande une escouade de représentants pour un inventaire minutieux – il durera deux mois – des biens de l’abbaye, en vue de leur mise en vente. Puis on demande à chacun des cinq chanoines s’il désire « profiter des dispositions de la loi pour quitter la vie monastique » . Le Prieur et le Sous-Prieur répondent « oui » ; les trois autres Frères demandent à continuer à vivre ensemble et à suivre leur Règle. On leur annonce qu’il leur sera permis de se retirer dans le « couvent de concentration » départemental, où seront regroupés d’office les religieux de tous ordres. Devant cette perspective peu rassurante, les trois chanoines se retirent discrètement pour continuer leur service paroissial. Pierre Toulorge est hébergé pendant un an et demi dans une ferme voisine.

Erreur d’appréciation

En juillet 1790, l’Assemblée nationale a promulgué la « Constitution civile du Clergé » , acte schismatique qui place l’Église en France sous la tutelle du pouvoir civil. Les évêques et les curés seront désormais élus par le peuple, et le Saint-Siège est dépouillé de toute autorité. En novembre, une nouvelle loi impose aux prêtres fonctionnaires publics (évêques, curés, vicaires) de prêter un serment de fidélité à la Constitution civile, sous peine de déposition et, le cas échéant, de poursuites pénales. En mars 1791, le Pape Pie VI condamne la Constitution civile et interdit au clergé de prêter le serment schismatique. Entre-temps, de nombreux prêtres ont « juré » par ambition, cupidité, faiblesse ou ignorance. Certains se rétracteront lorsqu’ils auront connu la condamnation pontificale.

Le 26 août 1792, alors que la « machine révolutionnaire » avance inexorablement, une loi condamne à la déportation tous les ecclésiastiques fonctionnaires qui n’auront pas prêté serment. C’est désormais la haine du prêtre et de la religion qui anime ouvertement les persécuteurs. Les « réfractaires » qui resteraient en France, ou qui rentreraient après avoir émigré, seront bientôt passibles de mort. Le clergé fidèle prend en masse le chemin de l’exil. Le Père Toulorge commet alors une erreur d’appréciation : il pense être concerné par la loi de bannissement, alors qu’elle ne vise que les prêtres fonctionnaires. Il demande ses passeports et s’embarque le 12 septembre pour l’île anglo-normande de Jersey, toute proche. Il y retrouve plus de cinq cents prêtres du diocèse de Coutances et y mène pendant cinq semaines l’existence précaire d’un émigré sans ressources. Cependant, un confrère d’exil lui fait remarquer son erreur sur la portée de la loi de bannissement. Pierre-Adrien, songeant à son pays, désormais si dépourvu de prêtres fidèles, décide alors de revenir au plus tôt, dans l’espoir que son absence n’aura pas été remarquée. Il débarque clandestinement sur une plage du Cotentin et prend bientôt le maquis ; de novembre 1792 à septembre 1793, il vit dans la clandestinité, allant d’un village à l’autre, déguisé, pour célébrer la Messe chez des particuliers et administrer les sacrements. Vingt autres prêtres réfractaires exercent le même ministère dans le doyenné. Le Père Toulorge célèbre la sainte Messe avec des ornements de fortune ; il a recopié de sa main les principales prières du Missel. Son activité se poursuit malgré le harcèlement des commissaires et des clubs révolutionnaires locaux. Toute personne qui aura repéré un prêtre réfractaire est invitée à le dénoncer ; une récompense est promise.

Un pauvre gueux

Dans la soirée du 2 septembre 1793, près du village de Saint-Nicolas-de-Pierrepont, une passante voit surgir d’un fourré un vagabond « crotté, mouillé, fatigué » . Charitablement, la femme l’invite chez elle et allume un feu. Mis en confiance, le pauvre gueux se fait connaître : c’est le Père Toulorge. L’hôtesse, à son tour, dévoile son identité : Soeur Saint-Paul, une ancienne moniale bénédictine chassée de son prieuré par la Révolution. Le prêtre accepte l’hospitalité pour la nuit. Le lendemain matin, la religieuse le conduit, déguisé en femme, chez une amie, Marotte Fosse ; elle pense qu’il y sera plus en sécurité. Mais des ouvriers, en voyant passer cette étrange « citoyenne » , remarquent ses bas et ses chaussures d’homme… Alléchés par la récompense promise, ils suivent à distance les deux suspects jusqu’au domicile de Marotte, et vont prévenir le Comité révolutionnaire. Tandis que Pierre-Adrien, installé au grenier, se repose, des coups violents, frappés par trois gardes nationaux, ébranlent la porte de la maison : « Au nom de la Loi, ouvrez ! » Le Père fait le mort. Un garde va chercher Marotte, partie au travail, que l’on oblige à ouvrir. La maison est fouillée de fond en comble. Le prêtre s’est dissimulé sous des bottes de lin ; les gardes nationaux lardent de coups de baïonnettes le tas de bottes séchées. Rien ! … Ils vont repartir bredouilles, lorsque l’un d’eux remonte au grenier et découvre Pierre-Adrien qui sortait de sa cachette. Le prêtre est aussitôt arrêté et les pièces à conviction (ornements sacrés, calice…) saisies.

Le surlendemain, les prévenus sont conduits au directoire du district de Carentan pour être jugés. Afin d’échapper à la sentence de mort décrétée contre les « émigrés rentrés » , Pierre-Adrien dissimule le fait qu’il a quitté la France. Le commissaire Le Canut, espérant l’amener à se contredire, lui demande à brûle-pourpoint : « Ni à cette époque, ni en aucune autre, vous n’êtes point passé à Jersey, ni en aucune autre terre étrangère ? – Non. – Mais un prêtre réfractaire que nous avons interrogé il y a peu de temps nous a déclaré qu’il vous avait vu à Jersey (c’était une invention de Le Canut). – Je n’ai point quitté le territoire français et, si quelques personnes vous l’ont dit, elles se sont trompées ou elles avaient perdu la tête » . Puis on lui montre les ornements sacrés et les objets du culte saisis à la maison Fosse, et il admet en être le possesseur. Les juges, indécis, décident de renvoyer l’accusé devant le tribunal départemental de Coutances.

« Oui, oui ; non, non »

Le Père Toulorge avait donc, pour sauver sa tête, nié être allé à Jersey. Il est vrai qu’un accusé n’est pas tenu de se dénoncer tant que la preuve objective de sa culpabilité n’a pas été établie. Cependant, reconduit en prison, le religieux est aussitôt assailli par le remords. Il pense avoir manqué à la vérité. La parole de Jésus résonne dans son coeur : Que votre langage soit : « Oui, oui ; non, non » (Mt 5, 37). Il se sent poussé à dire toute la vérité, quelles que puissent être les conséquences. Dès l’aube du 8 septembre, fête de la Nativité de la Sainte Vierge, Pierre-Adrien avoue spontanément qu’il a séjourné à Jersey, et cette déposition le suit à Coutances, où il est écroué le même jour. Le prêtre normand arrive au plus mauvais moment dans le chef-lieu de la Manche : le représentant Lecarpentier y séjourne, envoyé par la Convention (le parlement de la République) pour « prendre toutes les mesures en vue d’exterminer les vestiges de la royauté et de la superstition » ; Lecarpentier restera célèbre sous le surnom de « Bourreau de la Manche » . En quelques jours, cent quarante personnes sont arrêtées.

Le 22 septembre 1793, Pierre-Adrien comparaît devant la Commission administrative de Coutances, chargée d’apprécier s’il doit être déclaré « émigré rentré » . Longuement interrogé malgré son épuisement physique, il reconnaît sa brève émigration à Jersey. Les juges, qui craignent Lecarpentier mais voudraient sauver la tête du prêtre, déclarent que « l’accusé doit être réputé émigré » , en s’appuyant sur les passeports établis à son nom ; mais ils ne font pas état de ses aveux, pour lui laisser une chance de se disculper ; puis ils le renvoient devant le tribunal criminel, auquel il incombe de prononcer sa sentence. Le juge président de cette instance, Loisel, quoique jacobin, n’est pas un « terroriste » fanatique – on n’aimait pas faire couler le sang en Basse-Normandie. Avant la séance, il essaie de sauver l’accusé en lui suggérant de rétracter ses aveux d’émigration à Jersey et d’alléguer vaguement une résidence quelconque en France ; le tribunal voudra bien s’en contenter, et Toulorge évitera la guillotine. Des juges sont même prêts à répondre à la place du Père aux questions du président, afin qu’il n’ait pas à charger sa conscience ; il lui suffira de garder le silence. Mais lui préfère mourir plutôt que de ne pas dire toute la vérité, même devant un tribunal révolutionnaire.

Le Compendium du Catéchisme de l’Église Catholique, publié par le Pape Benoît XVI, répond à la question : Quel est le devoir de l’homme à l’égard de la vérité ? : « Toute personne est appelée à la sincérité et à la véracité dans sa conduite et dans ses paroles. Chacun a l’obligation de chercher la vérité et d’y adhérer, ordonnant toute sa vie selon les exigences de la vérité. En Jésus-Christ, la vérité de Dieu s’est manifestée tout entière. Il est la Vérité. Qui le suit vit dans l’Esprit de vérité et fuit la duplicité, la simulation et l’hypocrisie » (n. 521). L’attachement à la vérité a conduit le Père Toulorge à cette décision héroïque.

Dans l’arrêt du Tribunal criminel rendu le 12 octobre 1793, on peut lire : « Toulorge, interpellé de dire s’il est en état de justifier qu’il n’a pas quitté le territoire de la République française, a dit qu’il n’en pouvait justifier, et a même convenu avoir quitté le territoire français et s’être retiré à l’île anglaise de Jersey » . La fin de cette phrase (« et a même convenu… » ) a été ajoutée dans la marge au procès-verbal préparé à l’avance ; ce détail montre que le tribunal avait prévu d’invoquer le bénéfice du doute en faveur de l’accusé. Mais ses aveux sans équivoque ont « obligé » les juges à appliquer la loi terroriste.

Adieu, Messieurs, jusqu’à l’Éternité !

Un silence impressionnant suit la lecture de l’arrêt. On entend alors Pierre-Adrien prononcer ces paroles : « Deo gratias ! (merci, mon Dieu)… Que la volonté de Dieu soit faite et non la mienne ! Adieu, Messieurs, jusqu’à l’Éternité, si vous vous en rendez dignes ! » Son visage rayonne de joie. Des ménagères qui le rencontrèrent, tandis qu’on le reconduisait à la prison, crurent qu’il avait été acquitté. Le soir venu, le condamné soupe de bon appétit, puis se confesse et parvient à écrire trois lettres. À un ami : « Je vous annonce une très heureuse nouvelle. On vient de me lire ma sentence de mort. Demain, à deux heures, je quitterai cette terre toute chargée d’abominations pour aller au Ciel. Ce qui est ma consolation maintenant, c’est que Dieu me donne une joie et une sérénité très grandes ; et ce qui me fortifie, c’est l’espérance que, bientôt, je posséderai mon Dieu » À son frère : « Réjouis-toi, tu auras demain un protecteur dans le ciel, si Dieu, comme je l’espère, me soutient, comme Il l’a fait jusqu’ici. Réjouis-toi de ce que Dieu m’ait trouvé digne de souffrir non seulement la prison, mais la mort même pour Notre-Seigneur Jésus-Christ. Ce n’est pas aux biens périssables qu’il faut s’attacher. Tourne donc tes yeux vers le Ciel, vis en bon chrétien, élève tes enfants dans la sainte Religion catholique, apostolique et romaine, hors de laquelle il n’y a point de salut » . Enfin, il annonce son martyre imminent à une personne non identifiée, et ajoute : « Je ne méritais pas une marque si évidente de la bonté de Dieu » .

Puis le condamné s’endort du sommeil du juste. Le lendemain, dimanche 13 octobre, il se montre joyeux et serein. Il demande qu’on le coiffe et qu’on lui rase la barbe ; il s’entretient du ciel avec ses compagnons. Il dit avec eux le bréviaire et s’arrête à l’hymne de complies (la prière du soir), après avoir récité ce vers : « Quand luira, Seigneur, votre jour qui ne connaîtra pas de déclin ? » Puis il s’écrie, plein d’allégresse : « Je chanterai bientôt ce cantique en action de grâces au Ciel » . Quand le bourreau vient le chercher, Pierre Toulorge bénit les assistants. La guillotine était dressée en plein centre de Coutances ; c’était la première fois, depuis la Révolution, qu’elle fonctionnait dans la petite ville. Arrivé au pied de l’échafaud, Pierre-Adrien dit : « Mon Dieu, je remets mon âme entre vos mains. Je vous demande le rétablissement et la conservation de votre Sainte Église. Pardonnez, je vous prie, à mes ennemis » . Après l’exécution, le bourreau saisit la tête par les cheveux et la montre au peuple. Selon le récit d’un témoin oculaire, Pierre-Adrien fut enterré par des personnes pieuses, au cimetière Saint-Pierre, selon l’usage observé pour les prêtres défunts : la face découverte et tournée vers l’occident. Il avait gardé sur son visage une grande sérénité. Soeur Saint-Paul et les personnes accusées d’avoir caché le Père Toulorge furent acquittées ; le martyr, du haut du Ciel, avait étendu sur elles sa protection.

Lorsqu’en 1922 furent entrepris les divers procès diocésains des martyrs normands de la Révolution française, la cause du Père Pierre-Adrien Toulorge a été considérée comme la plus digne d’intérêt parmi celles des cinquante-sept prêtres assassinés dans cette province. Le procès diocésain en béatification a été terminé en 1996 et la cause se poursuit actuellement à Rome.

Un témoignage quotidien

Dans son encyclique Veritatis splendor du 6 août 1993, le Pape Jean-Paul II a écrit : « Le martyre est un signe éclatant de la sainteté de l’Église : la fidélité à la Loi sainte de Dieu, à laquelle il est rendu témoignage au prix de la mort, est une proclamation solennelle et un engagement missionnaire usque ad sanguinem (jusqu’à l’effusion du sang) pour que la splendeur de la vérité morale ne soit pas obscurcie dans les moeurs et les mentalités des personnes et de la société. Un tel témoignage a une valeur extraordinaire en ce qu’il contribue, non seulement dans la société civile, mais aussi à l’intérieur des communautés ecclésiales elles-mêmes, à éviter que l’on ne sombre dans la crise la plus dangereuse qui puisse affecter l’homme : la confusion du bien et du mal qui rend impossible d’établir et de maintenir l’ordre moral des individus et des communautés… Si le martyre représente le sommet du témoignage rendu à la vérité morale, auquel relativement peu de personnes sont appelées, il n’en existe pas moins un témoignage cohérent que tous les chrétiens doivent être prêts à rendre chaque jour, même au prix de souffrances et de durs sacrifices. En effet, face aux nombreuses difficultés que la fidélité à l’ordre moral peut faire affronter même dans les circonstances les plus ordinaires, le chrétien est appelé, avec la grâce de Dieu implorée dans la prière, à un engagement parfois héroïque, soutenu par la vertu de force par laquelle – ainsi que l’enseigne saint Grégoire le Grand – il peut aller jusqu’à « aimer les difficultés de ce monde en vue des récompenses éternelles » » (n. 93).

Au Père Toulorge, le peuple du Cotentin a décerné le nom de « martyr de la vérité » . Que ce prêtre nous obtienne, par son intercession, la grâce de rendre, par toute notre vie, témoignage au Christ qui est la Vérité même !

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Bienheureux Francisco Palau

3 décembre 2008

Monseigneur Pallu

6 janvier 2009