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7 octobre 2014 fête de Notre-Dame du Rosaire |
Le 5 juillet 1852, labbé Ernest André, jeune curé de Mesnil-Saint-Loup, un village pauvre du diocèse de Troyes (France), est reçu en audience privée par le bienheureux Pie IX. Agenouillé à ses pieds, il demande: «Très Saint-Père, voulez-vous donner à la Très Sainte Vierge honorée dans notre église le nom de Notre-Dame de la Sainte-Espérance ?» À ces mots, le Pape relève la tête, puis, après un moment de réflexion, il paraît rempli de joie et dit avec un accent de satisfaction bien marquée: «Notre-Dame de la Sainte-Espérance, oui!»
Notre-Dame de la Sainte-Espérance va, en peu dannées, sous limpulsion de son pasteur, non seulement transformer la paroisse de Mesnil-Saint-Loup, mais aussi répandre ses grâces bien au-delà du village.
Ernest André, qui restera connu sous le nom de Père Emmanuel, naît le 17 octobre 1826, à Bagneux-la-Fosse, dans lAube. À neuf ans, lenfant est atteint dune fièvre typhoïde qui le conduit aux portes de la mort. Après quarante jours presque sans connaissance, il guérit comme par miracle. Peu de temps après, il manifeste le désir dêtre prêtre. En 1839, Ernest entre au petit séminaire. Le sacrement de Confirmation, reçu à la fin de la première année, le marque profondément; plus tard, dans ses enseignements, il soulignera souvent le rôle de lEsprit Saint dans la vie du chrétien. Ses années de formation au grand séminaire se situent à lépoque où un souffle missionnaire dilatait le catholicisme français. Des condisciples de labbé André quittent le séminaire pour entrer chez les Frères Maristes ou les Pères de Picpus pour lévangélisation des terres lointaines. Lui-même vibre aussi de cette ardeur. Cependant, cest à la mission plus classique de pasteur dune paroisse de son diocèse quil va finalement se consacrer. Après les années sombres de la Révolution, une chrétienté nest-elle pas à refaire en France même?
«Il ne restera pas avec nous»
Ordonné prêtre le 22 décembre 1849, labbé André est nommé, à vingt-trois ans, curé de Mesnil-Saint-Loup, paroisse de trois cent cinquante âmes, à vingt kilomètres à louest de Troyes. Le 24 décembre, le nouveau curé arrive à Mesnil. Avisant un villageois, il lui demande le chemin de léglise; tout en laccompagnant, lhomme fait naïvement sa confession et celle de tout le pays: «Voyez-vous, Monsieur, ici nous ne sommes pas très dévots: oh! pour la Messe, nous ny manquons pas; mais nous aimons bien, après la Messe, aller boire la petite goutte.» À lentendre chanter la Messe de Minuit, les paroissiens se disent: «En voilà un qui chante trop bien, il ne restera pas avec nous.» Mais, de fait, il demeurera à Mesnil-Saint-Loup pendant cinquante-trois ans. Dans ce village où les gens vivent pauvrement, la pratique religieuse est habituelle, si lon sen tient du moins au nombre de personnes qui assistent à la Messe et aux Vêpres du dimanche. Mais le devoir de la Communion pascale nest guère rempli que par les femmes. Labbé André, dans lintensité de sa foi et lardeur de son zèle pastoral, ne saurait se contenter du minimum. Il veut plus et surtout mieux: des chrétiens fervents, désireux de sabreuver à la source des sacrements, qui se nourrissent de la Parole de Dieu et donnent une vraie place à la prière dans leur vie quotidienne. Le jeune curé se met aussitôt à sa tâche: visites aux paroissiens, en particulier les malades, catéchismes, préparation des premières Communions. Sa bonne humeur, son entrain, son rire franc et sonore réchauffent déjà les curs. Toute sa personne indique une exubérance de vie qui ne demande quà se dépenser pour le salut des âmes; mais labbé comprend vite que la moisson ne se fait pas le lendemain des semailles. Il constate que, parmi les communiants préparés lannée précédente par son prédécesseur, peu ont persévéré dans la vie sacramentelle; aura-t-il plus de succès en 1850? Il y déploie tout son zèle: «Un engagement de la vie est, dit-il, chose sérieuse; vous appartenez à Jésus-Christ.» Cependant quelques garçons lâchent pied. Les exhortations répétées du jeune prêtre, sa participation à leurs jeux en regagnent certains. Mais tout cela reste fragile.
En juin 1852, labbé André entreprend un pèlerinage à Rome. En chemin, alors quil dit son chapelet, il est saisi intérieurement par une pensée qui lemplit de joie et démotion: Marie est Mère de la Sainte-Espérance, suivant lexpression biblique (cf. Si 24, 18). Il reçoit en même temps la certitude quil lui faudra, une fois parvenu à Rome, demander au Pape de donner le nom de Notre-Dame de la Sainte-Espérance à la statue de la Vierge de son église, et dinstituer une fête en son honneur. Laccord du Pape, pense-t-il avec raison, sera le signe que cette inspiration lui est donnée du Ciel. Contre toute attente, il obtient sans délai de Pie IX la permission de célébrer une fête liturgique en lhonneur de Notre-Dame de la Sainte-Espérance, le quatrième dimanche doctobre. Cette fête sera assortie, en 1854, dune indulgence plénière. Le rôle de Pie IX dans linstauration du culte de Notre-Dame de la Sainte-Espérance na rien de fortuit: il est primordial. Cest le Saint-Père, personnellement, qui a donné Notre-Dame de la Sainte-Espérance à la paroisse de Mesnil-Saint-Loup. Lui-même manifeste une grande dévotion envers la Vierge Marie depuis sa tendre enfance: le jour même de sa naissance et de son baptême, 13 mai 1792, Jean-Marie Mastaï avait été consacré par ses parents à une Madone, dite Notre-Dame dEspérance. Pie IX sera aussi le Pape de lImmaculée-Conception, dont il proclamera le dogme en 1854.
Pleurer la petite prière
De retour dans sa paroisse, le curé garde quelque temps secrètes les faveurs quil vient dobtenir du Saint-Père, se réservant de les proclamer lors de la solennité de lAssomption. Dans un sermon mémorable, laissant éclater sa joie et sa confiance filiale en Marie, labbé André adresse à la Vierge une série dinvocations, dont lune touche plus que les autres ses paroissiens: Notre-Dame de la Sainte-Espérance, convertissez-nous! Simple formule dont sempare la piété des fidèles; ils vont la redire en priant et en pleurant, au point que se forgera lexpression: pleurer la petite prière. Le curé ne demande pas à ses paroissiens de se convertir, mais demande à Marie dobtenir de son Fils leur conversion. La vie chrétienne est une conversion permanente; et cette conversion est un don reçu moyennant la prière.
La première est celle dErnest André lui-même, transformé en un ouvrier éclairé et efficace: «Avant la Sainte-Espérance, dira-t-il, jallais au hasard, je ne savais pas; avec elle jai été fixé, jai vu, jai compris.» Et, à lécole de Marie, le curé deviendra un pasteur et un incomparable formateur de chrétiens. À partir de ce jour, limmense puissance de conversion de la Sainte Vierge, omnipotentia supplex (la toute-puissance suppliante, expression des Pères de lÉglise), se manifeste de façon éclatante. Le dimanche 22 octobre 1852, la première fête de Notre-Dame de la Sainte-Espérance est célébrée très simplement, mais avec une grande allégresse. On navait pas lhabitude de communier un simple dimanche; le curé insiste, les femmes se rendent sans trop de difficultés, mais les jeunes gens quil a groupés autour de lui auront-ils le courage de sapprocher publiquement des sacrements? La plupart viennent se confesser à une heure assez tardive: le respect humain les tient encore. Mais le lendemain, ils communient à la Grand-Messe devant tout le monde. Cest la première victoire de Notre-Dame de la Sainte-Espérance. Sur Mesnil-Saint-Loup souffle alors un vent nouveau qui nest autre que le Saint-Esprit. La grâce du Baptême enfouie dans les curs réapparaît dans toute sa fraîcheur et sa force.
Rétablir les vraies notions
«Pour rétablir le christianisme dans les murs, commente labbé André, il faut préalablement en rétablir les vraies notions dans les esprits. Tout le christianisme consiste à savoir et à reconnaître pratiquement ce que nous avons perdu en Adam, et ce que nous avons reçu en Jésus-Christ; doctrine sur le péché originel et ses conséquences dun côté, sur la grâce et sa nécessité de lautre.» Et plus tard, il précisera en quoi consiste la conversion: «Luvre de Notre-Dame de la Sainte-Espérance, à Mesnil-Saint-Loup, cétait simplement le rétablissement du christianisme, et cela parmi des hommes baptisés. Ici comme ailleurs, tout, à peu près, était envahi par ce froid et bas naturalisme qui ne permet pas à lhomme délever ses pensées au-dessus de ce quil sent. Ici comme ailleurs, la raison humaine et quelle raison!, lemportait sur la raison divine, cest-à-dire sur la foi. La grâce de Notre-Seigneur Jésus-Christ était une sublime inconnue... Toutes les vertus chrétiennes étaient méconnues et remplacées par cette vertu également facile et universelle que le monde appelle lhonnêteté. Notre-Dame de la Sainte-Espérance arriva, et dès le premier moment toutes les âmes comprirent quun grand changement allait devenir indispensable. Les pratiques extérieures du culte allaient être convaincues dinsuffisance; les motifs intérieurs des actions allaient avoir à subir des modifications essentielles; lamour de Dieu allait cesser de consister en une formule; lEsprit du Seigneur allait souffler sur des ossements desséchés, et faire surgir un peuple nouveau (cf. Ez 37).»
Le Pape François, dans ses catéchèses sur les dons du Saint-Esprit, explique le rôle de lEsprit Saint et limportance du don de crainte qui nest pas sans lien avec la vertu despérance. «Par la crainte filiale en effet, nous ne craignons pas que vienne à nous manquer ce que nous espérons obtenir grâce au secours divin, mais nous craignons de nous soustraire nous-même à ce secours. Cest pourquoi la crainte filiale et lespérance sont unies entre elles et se perfectionnent mutuellement» (saint Thomas dAquin, Somme théologique, IIa IIæ, 19, 9, ad 1um). «Quand lEsprit Saint, dit le Pape, fait sa demeure dans notre cur, il nous donne la consolation et la paix, et il nous aide à nous sentir tels que nous sommes, cest-à-dire petits, dans cette attitude, si souvent recommandée par Jésus dans lÉvangile, de celui qui dépose toutes ses préoccupations et ses attentes en Dieu et qui se sent enveloppé et soutenu par sa chaleur et sa protection, exactement comme un petit enfant avec son papa! Cest ce que fait lEsprit Saint dans nos curs: il nous fait nous sentir comme de petits enfants dans les bras de notre papa. En ce sens, nous comprenons bien alors combien la crainte de Dieu vient assumer en nous la forme de la docilité, de la reconnaissance et de la louange, comblant notre cur despérance. Si souvent, en effet, nous ne réussissons pas à saisir le dessein de Dieu, et nous nous rendons compte que nous ne sommes pas capables de nous assurer par nous-mêmes le bonheur et la vie éternelle. Toutefois, cest précisément dans cette expérience de nos limites et de notre pauvreté que lEsprit nous réconforte et nous fait percevoir que la seule chose importante est de nous laisser conduire par Jésus dans les bras de son Père. Voilà pourquoi nous avons tellement besoin de ce don de lEsprit Saint. La crainte de Dieu nous fait prendre conscience que tout vient de la grâce et que notre véritable force réside uniquement dans le fait de suivre le Seigneur Jésus et de laisser le Père reverser sur nous sa bonté et sa miséricorde. Ouvrir notre cur, pour que la bonté et la miséricorde de Dieu viennent en nous, cest ce que fait lEsprit Saint avec le don de la crainte de Dieu: il ouvre nos curs. Un cur ouvert, afin que le pardon, la miséricorde, la bonté et les caresses du Père viennent jusquà nous, parce que nous sommes des enfants infiniment aimés» (Audience générale du 11 juin 2014).
La confrérie de la Prière Perpétuelle
Dans les années 1852-1860, il ne se passe pas de fêtes pascales, de mois de mai, de fête de Notre-Dame de la Sainte-Espérance sans quil ny ait de véritables conversions, qui ramènent des âmes à Dieu en les séparant radicalement de la vie mondaine. La fréquentation des sacrements augmente, et on voit des hommes se joindre aux femmes pour réciter le chapelet. En 1853, malgré lopposition de certains paroissiens, on élève dans léglise un autel à Notre-Dame de la Sainte-Espérance. Cette même année, une confrérie pour la récitation de la petite prière est érigée. Afin quelle soit égrenée au long des heures du jour en une prière perpétuelle, les associés, par séries de douze, sengagent à dire, chacun à une heure fixe, un Je vous salue Marie encadré, avant et après, par linvocation: Notre-Dame de la Sainte-Espérance, convertissez-nous! Labbé André veut des associés fidèles et fervents plutôt que nombreux.
Le développement sera cependant rapide: si, à la fin de 1854, on ne compte encore que 272 inscrits, ils seront plus de 4000 en décembre 1855. En 1856, le curé de Notre-Dame-des-Victoires, à Paris, labbé Desge-nettes, affirme en parlant de luvre de Notre-Dame de la Sainte-Espérance: «Toutes ces tempêtes ne sont soulevées contre luvre que parce quelle est bien plantée sur le roc de saint Pierre. Cest un jeune arbre qui deviendra grand et fort, parce que ses racines ont pénétré dans le rocher pour y puiser la sève catholique à sa source.» En effet, la Prière Perpétuelle rayonne rapidement au-delà de la paroisse; des associés se présentent de toute la France et même de létranger. Encouragée par plusieurs brefs du Saint-Siège, la Prière Perpétuelle sera érigée en archiconfrérie, le 27 août 1869. Moins de dix ans après, lassociation comptera 100000 associés. Le 25 mars 1877, commencera à paraître le Bulletin mensuel de Notre-Dame de la Sainte-Espérance.
La métamorphose de la paroisse de Mesnil est luvre de Notre-Dame; mais le curé y coopère lui-même avec un grand zèle. «Il me faut, dit-il, des chrétiens tels que le Baptême les a faits. Ils existent en germe; je les cultiverai et je les obtiendrai. Il me les faut tels, parce que cest ainsi que Dieu les veut: et je suis le coopérateur de sa grâce. Je ne tolérerai pas le mélange de lesprit du monde qui déforme le chrétien, qui le diminue, et, même sous certaines apparences religieuses, le tue tout à fait. Chrétiens de toutes pièces, chrétiens de lÉvangile, chrétiens qui, loin de senvelopper dans des ignorances calculées, cherchent la lumière, afin de se mettre en tout daccord avec la lumière: voilà mon programme.»
Pour cela, labbé André institue des conférences le dimanche après-midi; ce sera chez lui le souci constant dinstruire ses fidèles, déclairer leur foi. Il commente les livres de la Sainte Écriture, la liturgie, les sacrements. Il va jusquà leur apprendre les rudiments du latin pour quils comprennent les chants de la Messe et les Psaumes: car les dimanches et jours de fêtes, de nombreux paroissiens viennent à léglise chanter une partie de lOffice divin (Laudes, Vêpres et Complies). Les instructions sont entrecoupées de jeux sur la place, et la journée du dimanche se conclut par une prière du soir dont le but est avoué: mettre fin aux bals et combattre linfluence du cabaret. De fait, au bout de quelques années, cabaret et bal disparaîtront du paysage de Mesnil. La conversion se manifeste aussi par la modestie du costume. Le pasteur fait la guerre à la vanité et aux tenues immodestes: «La modestie, dit-il, est une des marques de la présence du Saint-Esprit dans une âme. Les hommes ne sauraient en général être chastes si les femmes ne sont pas modestes.» En 1878, il regroupera les femmes les plus décidées dans la Société de Jésus couronné dépines.
La vengeance de Marie
Pourtant, il serait faux de penser que ce mouvement nait pas rencontré dopposition. Certains, au sein du village, ne veulent pas de Notre-Dame de la Sainte-Espérance: de jeunes libertins créent une deuxième paroisse dans une écurie transformée en salle de danse, où ils parodient les cérémonies du culte. Notre-Dame se venge à sa manière: un dimanche du mois de Marie de 1854, tandis que ces jeunes gens sen vont à une partie de plaisir, le meneur sarrête net et décide de rentrer. Les railleries de ses compagnons nont pas de prise sur lui. Il dira par la suite: «Cétait comme si la médaille de la Sainte Vierge métait tombée sur la tête.» Il se met à dire le chapelet, puis, au mois doctobre, se confesse. Enfin, il se fait moine à labbaye de la Pierre-qui-Vire.
Malgré ces signes, labbé André nemportera pas, semble-t-il, ladhésion unanime de ses paroissiens. Cependant, de tout le diocèse et de plus loin encore, les gens accourent, attirés par le renom de Notre-Dame de la Sainte-Espérance, par latmosphère de prière qui lenveloppe, par la beauté de la célébration de sa fête. Progressivement, la fête du quatrième dimanche doctobre devient lobjet dun pèlerinage, et les inscriptions à la Prière Perpétuelle affluent. Dans son bulletin de novembre 1878, le curé écrira: «On va en pèlerinage là où il y a une source, une source miraculeuse. Il y a quelques semaines, vint un pauvre. Celui-là venait de loin, armé de deux béquilles. Il nous demanda la charité et nous fit ses petites réflexions. Ah! on vient ici en pèlerinage? Oui, au mois doctobre. Ah! comme ça, vous avez une source? Vous avez une source! Voilà la vraie bonne explication du pèlerinage à Notre-Dame de la Sainte-Espérance. Combien dâmes qui ont soif de la grâce de Dieu, des consolations den haut, et qui viennent ici croyant y trouver une source. Et de tous ceux qui y sont venus, nul na jamais dit: jai été trompé dans mon attente. Oui, il y a une source en Notre-Dame de la Sainte-Espérance, en celle que lÉglise appelle Mater, fons amoris: Marie est mère, mère et source damour.» Aux pieds de Notre-Dame, les pèlerins déposent des ex-voto: «Merci à Notre-Dame de la Sainte-Espérance, elle ma converti. Elle ma retirée de la vanité.» Telle est bien la grâce propre de cette dévotion: Marie sy révèle la toute-puissante convertisseuse, la Reine des curs.
Vie monastique
Laffluence des pèlerins et le mauvais état de léglise paroissiale conduisent à entreprendre la construction dun nouveau sanctuaire. Le chantier sétalera sur une dizaine dannées. La Sainte Vierge ne sen tient pas là, elle va aussi combler les plus chers désirs de labbé André. Ce dernier avait toujours eu un attrait pour la vie monastique. En 1864, il parvient à fonder, au village même, un petit monastère, et prend alors le nom de Père Emmanuel. En 1886, le monastère se rattache à la Congrégation bénédictine italienne du Mont-Olivet. Déchargé à partir de 1899 du soin de sa paroisse, le Père Emmanuel assiste avec une profonde douleur, en 1901, à la dissolution de sa communauté, objet, comme tant dautres, des rigueurs laïcistes. Quand il meurt, le 31 mars 1903, le monastère est soumis à la liquidation judiciaire. Une communauté sy rassemblera à nouveau en 1920. En 1948, les moines partiront pour redonner vie à labbaye du Bec-Hellouin. Un groupe de moines reviendra à Mesnil en 1976. Si la vie du Père Emmanuel sest achevée ainsi dans le dépouillement, la dévotion à Notre-Dame de la Sainte-Espérance, le pèlerinage et la paroisse demeurent bien vivants.
En 1923, le diocèse de Troyes obtient de Rome que la fête de Notre-Dame de la Sainte-Espérance soit célébrée chaque année, dans tout le diocèse, le 23 octobre. Larchiconfrérie compte plus de 150000 associés et lévêque constate que la Prière Perpétuelle continue de faire beaucoup de bien. On peut, encore aujourdhui, sassocier à larchiconfrérie de la Prière Perpétuelle en sadressant à la maison paroissiale (Place du Père-Emmanuel, 10190 Mesnil-Saint-Loup).
Le 6 juillet 1952, à Mesnil-Saint-Loup, plusieurs évêques commémorent le centenaire de larchiconfrérie, journée daction de grâces parce que pendant cent ans Notre-Dame de la Sainte-Espérance a converti dinnombrables âmes. Pour les 150 ans, le 7 juillet 2002, une Messe a été célébrée pour rendre grâce de ces bienfaits et demander que ces fruits se perpétuent.
À nous, qui vivons aujourdhui «dans un monde sans espérance» (Benoît XVI, Spe salvi, n. 42), la Mère de la Sainte-Espérance est toujours disposée à accorder la grâce de la conversion; elle nattend que notre petite prière pour faire de nous des témoins et des apôtres de lEspérance qui ne déçoit pas ! (cf. Rm 5, 5).